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Tohu-bohu sur l'aéroport de Tours

Publié le 08 janvier 2009 par Dominique Lemoine @lemoinedo

Le vote au conseil communautaire du 17 décembre concernant le syndicat mixte destiné à la gestion de l’aéroport international de Tours fait débat. Que des idées divergentes s’opposent, rien de plus normal en démocratie.
Mais j’ai pu constater que certains opposants à l’aéroport (ce qui est leur droit), ne cherchent pas le débat contradictoire qui est toujours une richesse mais privilégient la voie de l’insulte, de la diffamation et du non respect du droit à l’image.
Bien évidemment, bien que je sois toujours prêt à débattre démocratiquement, je ne répondrais pas à leurs insultes par l’insulte mais présentant sereinement ma vision actuelle des choses.
En préambule, je voudrais dénoncer ces « écolos » qui sont certains de connaître la « Vérité Absolue » (quelle prétention !) et qui considèrent que tous ceux qui ne pensent pas comme eux sont des « mauvais écolos » qu’il faut vilipender et qu’il faudrait « brûler sur la place publique ».
En tout état de cause, j’assume pleinement la position que j’ai prise que je pense raisonnée et raisonnable (pour mémoire, le modem régional a voté sans réserve le soutien financier de l’aéroport).
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Je vais maintenant expliquer ma position actuelle et le domaine dans lequel elle s’applique.
Eléments préalables de réflexion
  • paramètres énergétiques, avec une impérieuse obligation à s’engager dans la voie de l’efficacité énergétique dans tous les domaines, y compris celui des transports.
  • paramètres environnementaux où les publications 2008 du GIEC montrent que nous sommes au bord d’une zone critique. Raisons pour lesquelles il faut prendre en compte les émissions de CO2 du transport aérien dans la « taxe carbone ».
  • paramètres réels de déplacement où la distance à parcourir est un paramètre majeur. Il faut également rappeler que les déplacements ne concernent pas uniquement les loisirs…

Pour le transport aérien, il y a lieu de faire une distinction entre :
  • les vols « long courrier » où chaque passager émet autant d’équivalent carbone que s’il parcourait le même parcours, seul, dans une voiture puissante ou familiale.
  • les vols « court courrier » (moins de 1000 km) où les émissions de GES explosent sous l’impact de la surconsommation au décollage et à l’atterrissage et dont chaque passager émet autant d’équivalent carbone que s’il parcourrait le même trajet, seul, dans un petit camion.

Enfin, il convient de prendre en compte deux éléments importants :
  • notre excellente technologie TGV qui permet de relier généralement les centres villes avec efficacité, rapidité, régularité et avec un faible taux d’émission de gaz à effet de serre (si la production d’électricité n’émet pas de gaz à effet de serre et n’utilise pas trop abondamment les ressources non renouvelable comme le pétrole)
  • les distances à parcourir dans l’hexagone pour rejoindre deux régions françaises ou deux pôles de forte attractivité dont les distances qui les séparent sont généralement inférieures à 1000 km.

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En prenant en compte les paramètres ci-dessus (énergétique, environnementaux, distance de déplacement, pollution amplifiée pour des vols intérieurs de moins de 1000 km alors que ces liaisons peuvent être réalisés par le rail, notamment le TGV), je suis hostile au déploiement de lignes intérieures à partir de l’aéroport de Tours.
En complément d’information je considère qu’il faudrait même supprimer de nombreuses liaisons aériennes intérieures et reporter le trafic vers le rail (à condition de structurer différemment et de densifier le réseau ferré, de construire de nouvelles LGV transversales pour relier l’ouest et l’est de la France sans passer obligatoirement par Paris, développer de nouvelles lignes LGV comme Paris-Toulouse, Paris-Bordeaux …)
Un redéploiement est possible, il suffit de regarder par exemple comment se sont réorganisées les liaisons Paris- Bruxelles et ce qui se passe depuis la mise en service du TGV Sud Est.
Concernant maintenant les liaisons internationales :
J’ai longtemps été hostile au développement de lignes aériennes internationales (moyens et longs courriers) à partir de Tours car je considérais qu’il suffisait de rejoindre Paris par le TGV.
Aujourd’hui, je pense qu’une analyse globale de liaisons aériennes internationales n’est pas pertinente et qu’il est nécessaire de prendre en compte deux cas très différents.
  • pour toutes les lignes internationales « long courrier » qui desservent les plus souvent les aéroports parisiens : je suis défavorable au développement de lignes aériennes à partir de Tours car nous pouvons utiliser le rail pour rejoindre les aéroports parisiens (position qui est cependant très égoïste puisque l’on accepte de polluer les autres).

  • Pour certaines lignes européennes, ma position a évolué ces derniers temps car je suis convaincu qu’il est nécessaire de construire des clusters européens avec des régions européennes ciblées et sur des thématiques structurantes.

Nous sommes nombreux à considérer qu’il faut renforcer l’Europe, que nous avons besoin de plus d’Europe, que l’Europe est un bon niveau pour faire face aux nombreux défis qui se dressent actuellement devant nous.
Parmi ces défis: la recherche et l’innovation, l’éducation et la culture, l’indépendance énergétique actuelle et future, la lutte contre le réchauffement climatique sont des thématiques qui ne pourront trouver des réponses à la hauteur des enjeux qu’en travaillant au niveau Européen.
Si nous voulons véritablement intégrer la dimension européenne et en devenir un des acteurs, il faut alors être capable de construire et d’intégrer des clusters où plusieurs régions européennes unissent leurs forces et leurs financements.
Il nous faut également construire des rapprochements entre régions, favoriser la circulation des étudiants, des femmes et des hommes afin de construire une Europe positive où les citoyens s’affranchissent de leurs réflexes nationalistes pour construire, ensemble, un destin commun européen où chaque citoyen a sa place.
Est-il possible d’avoir cette ambition européenne sans développer des modes de déplacements adaptés aux distances à parcourir ?
Notre territoire étant relié aux autres aéroports régionaux, faut-il considérer que nos partenaires n’ont qu’à atterrir sur un aéroport régional comme Nantes, Poitiers et finir le trajet par la route ?
Faut-il considérer que l’Europe est suffisamment petite pour n'utiliser que les déplacements doux (en vélo ?)
Je ne cherche pas à vanter les qualités du transport aérien, je connais ses inconvénients mais je pense qu’il faut savoir trouver le juste milieu :
Ne faudrait-il pas que chaque territoire possède une stratégie de déplacements dans laquelle les vols aériens européens en nombre modéré et limité ont leur place ?
⇒ Pour travailler avec Bruxelles par exemple, pas besoin d’avion puisque nous avons un moyen efficace qui est le TGV.
⇒ Mais, pour nouer des partenariats fertiles avec des régions plus éloignées, nous savons que la dématérialisation facilite la communication sans supprimer les déplacements physiques. Alors nos partenaires prendront un avion pour un aéroport régional voisin (Nantes, Angers, Poitiers) et finiront leur trajet, en voiture…
A moins qu’ils ne décident de construire des partenariats qu’avec des régions avec lesquelles la communication est viable.
Voici l’élément central de ma réflexion qui me conduit à être favorable à quelques liaisons aériennes bien ciblées et en nombre limité avec des régions européennes.
Pour cela, il nous faut un outil de gestion : le syndicat mixte en question et j’y souscris complètement.
Je connais les problèmes induits par le transport aérien, il est important de les intégrer dans l’analyse globale et dans le plan climat de l’agglomération.
Si l’ensemble des données me conduit donc à me prononcer favorablement au déploiement de quelques lignes aériennes européennes en les limitant au strict minimum, je considère, en revanche, que cet outil n’a pas pour vocation de subventionner des billets d’avion low-cost et que son évaluation ne doit pas être basée sur des critères quantitatifs (comme le nombre de passagers) mais qualitatifs intégrant plus de paramètres que le simple PIB qui risquerait de nous entraîner dans la surenchère du nombre de vols».
Je sais qu’il faut diminuer le nombre de déplacements en utilisant le plus souvent possible les outils de dématérialisation, mais je suis également convaincu que les contacts humains restent la meilleure voie pour collaborer, se connaître et construire ensemble l’avenir.
Certains déplacements sont inutiles, il faut les supprimer mais je ne suis pas pour supprimer tous les déplacements et nous replier en village Gaulois car nous n’avons pas de potions magiques pour faire face aux réalités.
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Quelques éléments concernant les nuisances aériennes
Quelques éléments sur le transport aérien
Prenons un avion récent de type Airbus A340 avec 380 passagers à bord.
Pour parcourir 13900 km (son rayon d’action), cet appareil consommera de l’ordre de 194 800 litres ce qui fait, en condition optimale, environ 3,8 litres de kérosène au 100 km par passager.
Dans la pratique, les statistique montre que le taux de remplissage d’un avion long courrier n’est pas de 100% mais qu’il approche de 70% à 80%, ce qui conduit à considérer que la consommation moyenne de chaque passer pour un vol international est de l’ordre de 5 litres aux 100 km pour un avion récent.
La distance moyenne d’un vol «long courrier» est de 6450 km. Sur cette distance, l’avion consomme 240 litres de kérosène par passager et émet 165 kg d’équivalent carbone pour le seul CO2 et 330 kg d’équivalent carbone si on tient compte de l’ensemble des émissions.
  • il en résulte que chaque passager aérien long courrier émet autant de gaz à effet de serre que s’il était seul en grosse voiture sur la même distance.

Dès que l’on réduit fortement les distances, alors l’impact du décollage et de l’atterrissage qui est proportionnellement plus gourmand, la consommation par passager augmente de manière significative et, pour un vol court courrier (500 km par exemple), un passager consomme le double au km, soit un équivalent de 25 kg d’équivalent carbone pour 500 km pour le seul CO2, soit 50 kg avec toutes les émissions.
  • il en résulte que chaque passager émet autant de CO2 que s’il réalisait le trajet dans un petit camion et ceux, pour un gain de temps négligeable !

Quelques rappels sur l’équivalent carbone
Afin de pouvoir faire des comparaisons (ce qui est essentiel pour pouvoir faire des plans d’action, car tant que l’on ne sait si il est préférable d’éviter l’émission de 1 kg de CO2 ou 1 kg de méthane), il est possible de calculer, pour chacun des gaz à effet de serre, un pouvoir de « réchauffement global » (PRG) qui permet de savoir de combien on augmente l’effet de serre lorsque l’on émet un kg du gaz considéré.
Le pouvoir de réchauffement global d’un gaz définit comme le « forçage radiatif » cumulé sur une durée qui est généralement fixée à 100 ans, d’une quantité de gaz donnée.
* Par définition, un kg de CO2 vaut 0,2727 kg d’équivalent carbone, c'est-à-dire le poids du carbone seul dans le composé « gaz carbonique »
Dominique Lemoine

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