Sous-genre : Dystopie
Auteur : Paul Auster
Titre original : In the country of last things
1ère édition : 1987
Nb de pages : 266
Lu : janvier 2009
Ma note:
Résumé :
In the Country of Last Things est le titre original du Voyage d’Anna Blume. De ce ” pays des choses dernières ” où elle tente de survivre au froid, aux prédations et au désespoir, Anna Blume - venue chercher son frère disparu, William - écrit une longue lettre dont on ne sait si elle trouvera jamais son destinataire : ses errances dans une ville aux rues éventrées, sa lutte pour subsister parmi les ” chasseurs d’objets ” et les ” ramasseurs d’ordures “, la mort omniprésente, la difficulté de vivre des amours durables… revêtent ici une force symbolique d’une actualité étonnante. Et cette lettre, en même temps qu’elle éveille en lui un passé de terreurs et d’apocalypse, interroge d’insidieuse façon le lecteur sur son rapport au monde… et au langage.
Mon avis:
Comme je l’avais déjà évoqué lors de ma lecture de Dans le Scriptorium, je me lance dans un marathon Paul Auster. Depuis le temps que j’avais envie d’approfondir la chose, j’ai du retard à rattraper ! Hier soir l’alimentation de mon portable a commencé à montrer des signes de faiblesses, des étincelles jaillissaient du câble, j’ai donc passé une bonne parrtie de la nuit et de la journée privée d’ordinateur. Ce qui explique que j’ai déjà terminé Le voyage d’Anna Blume, et quel voyage !
Entamé hier soir, je l’ai terminé tout à l’heure, ébahie, émue, intriguée. Anna blume adresse à son ami d’enfance une très longue lettre qu’elle n’est même pas sûre de pouvoir lui envoyer. Fille de bonne famille, Anna Blume a connu une enfance et une adolescence dorées jusqu’à ce que son frère William, journaliste, disparaisse à l’étranger lors d’un reportage. Déterminée à le retrouver, elle ira le rejoindre dans ce nouveau monde, loin de se douter de ce qui l’attend. Arrivée par bateau dans une ville dévastée, elle devra vite renoncer à retrouver son frère, trop préoccupée par sa propre survie dans une cité aux allures de post-apocalypse. On ne sait rien des causes, Anna nous fait un constat déprimant de ce qu’est devenue la vie dans un cadre de fin du monde. Elle avoue elle-même ignorer bien des choses quant à l’économie du moment et à son fonctionnement. Mais ce qu’elle sait, ce qu’elle a vu et observé, elle nous le décrit avec assez de précisions pour nous donner froid dans le dos. Le travail est quasi-inexistant, chacun doit rivaliser d’imagination pour s’adapter et gagner de quoi se nourrir. Une nouvelle organisation sociale se créée, précaire. La lutte pour la survie dans le dénuement le plus total modifie les relations humaines. La narratrice va devoir s’adapter aux privations en tous genres, la nourriture, le confort, mais aussi l’amitié et l’amour, avant de renouer le contact avec autrui.
La lutte permanente pour la survie, l’effort constant et surhumain pour mettre encore et malgré tout un pied devant l’autre, tout contribue à l’annihilation de l’individu, qui ne devient qu’un corps à peine vivant, un organisme que l’instinct de survie pousse encore à chercher sa pitance. Comme le dit Anna Blume, la vie met longtemps à mourir. Et Anna mettra longtemps à voir au-delà des limites de la cité isolée, et à espérer.
L’univers dépeint est hautement anxiogène, je déconseille la lecture de ce livre aux dépressifs profonds, et pourtant, la narration captive, fascine, et le récit à la première personne ajoute une authenticité troublante. Un long voyage donc, au-delà de la misère et du désespoir, qui rappelle une certaine réalité, certes accentuée par Auster, mais bien d’actualité. Superbe !