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Les pesticides et l’Europe, le premier pas …. Insuffisant.

Publié le 14 janvier 2009 par Chezfab
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Hier les députés européens ont voté un texte sur les pesticides qui est un premier pas intéressant, mais loin d’être suffisant. Certes le texte promet l’éradication de 22 substances sur 500 actuellement utilisés, car neurotoxiques ou mutagènes. Un autre texte promet lui l’interdiction d’utilisation de pesticides dans les jardins publics et l’épandage par avion.

Alors bien entendu, je pourrais faire comme mes amis Verts, et dire que c’est une grande victoire. Et bien non désolé, ce n’est pas une grande victoire, juste un petit pas qui sera largement insuffisant.

Je m’explique. Déjà, avant que ces textes n’entrent en vigueur, il va falloir que la navette avec la commission se fasse. Ensuite, il y a les délais : en effet, on nous parle d’une application totale de ces textes pour … 2018 ! Alors que le problème des perturbateurs endocriniens est connu depuis plus de 20 ans déjà, nous allons encore attendre 10 ans pour éliminer ceux déjà identifiés. Soit pas loin de 30 ans. Et attention : ne seront retirés que 22 molécules sur les 500 actuelles ! Pourquoi seulement 22 ? Parce qu’elles sont identifiés comme dangereuses. Cela ne signifie en rien que les 488 autres ne le soient pas, cela signifie simplement que ce n’est pas prouvé ni démontré. Souvent faute de… recherches !

Je suis désolé, mais je vais enfoncer le clou et être un peu désagréable avec l’Eurodéputée Hiltrud Breyer. Elle est membre des Grünen (Verts allemands) et affirmait pour rassurer les industriels que la loi portait sur peu. "Il s'agit de 22 substances sur 500, soit moins de 5 %", expliquait le 18 décembre l'eurodéputée verte allemande. (Le monde). Ben oui c’est très juste de souligner cela. C'est-à-dire que cela représente ce que demandaient (ou plutôt ce qu’étaient prêts à accepter) les industriels. Pourquoi ? Tout simplement parce que les 22 molécules dont nous parlons tombent toutes dans le domaine public (ou presque) d’ici 2018 ! Ce qui signifie qu’elles auraient pu être « copiées » par des concurrents, et donc moins rentables !

En clair, la loi votée est largement peu contraignante (même si elle peut paraitre l’être) et plutôt favorable au secteur concerné.

"C'est une honte. On a abusé [des agriculteurs] avec des informations erronées. (...) Maintenant, l'industrie a toutes les raisons d'innover pour fabriquer des produits sûrs". (Le monde). Cette phrase est aussi de Hiltrud Breyer.

Quand je lis une telle phrase, je me demande si elle a déjà essayé de comprendre comment fonctionne l’industrie. Pourquoi feraient-ils autrement que jusqu'à maintenant les industriels ? 30 ans pour voir supprimer les molécules, et encore, seulement 5 % ! Soit au-delà de la durée des brevets ! Aucunes pertes, même s’ils font demain des saloperies sans nom. Aucunes sanctions immédiates, rien. Alors pourquoi changeraient-ils parce que cette loi existe ?

Le Mouvement pour le droit et le respect des générations futures (MDRGF) a salué la nouvelle législation dans un communiqué, mais regrette que les débats aient dilué certaines restrictions initialement imposées à des produits susceptibles de "conséquences neurologiques et immunologiques graves pour le développement prénatal des enfants". Le MDRGF déplore l'absence de "mesure forte pour protéger les résidents des milieux agricoles exposés aux pulvérisations de pesticides", de "zone tampon" près des cours d'eau et d'interdiction "pure et simple" de l'usage des pesticides en milieu urbain. (Le monde)

Ben oui mais c’est là toute la force du texte justement : il va dans le sens des industriels fabricants et de l’agriculture intensive. Ce texte est un cache misère.

Au fait, et quid des nouvelles molécules ? Et bien elles seront soumises à REACH, enfin selon le tonnage produit (donc peu de chance en fait). Elles n’auront pas de suivis particuliers. En gros on continue comme avant…

J’aurais pu apprécier un texte protecteur réellement, c'est-à-dire mettant en demeure les industriels de prouver l’innocuité de leurs molécules sous 3 ans. Protégeant les cours d’eau. Protégeant les agriculteurs. Protégeant la vie. Mais là je ne peux que voir que ce qui est présenté comme une victoire n’est en fait qu’un cache sexe bien pensé de l’industrie phytosanitaire.

De toute façon, sans réforme en profondeur de la PAC, sans mise en obligation de l’agriculture biologique, sans relocalisation, il est illusoire d’imaginer changer les choses. Le seul texte viable qui pourrait et relancer l’emploi et éradiquer les risques sanitaires serait un texte imposant la conversion en biologique de l’ensemble des cultures d’Europe en 10 ans. D’ici là, nous pouvons continuer à morfler en paix, pour le plus grand plaisir de la croissance…


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