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Bernard Tapie, cette part sombrement télégénique de nous-mêmes !

Publié le 02 janvier 2009 par Petiterepublique

Après tous ses déboires avec la justice, ses peines de prison, Bernard Tapie aurait dû disparaître définitivement du paysage médiatique. Mais depuis l’élection de Nicolas Sarkozy et ses grandes théories sur l’art de décomplexer les Français d’avoir trop d’argent, Tapie a refait surface au meilleur moment. L’ancien ministre qui a désormais les poches pleines, parade sur le service public, et juge la vie politique française, et se paye en plus le luxe de voir la pièce de théâtre dans laquelle il joue être diffusée le soir de Noël.

Curieusement, les Français ne haïssent pas cette personnalité qui a pourtant trahi leur confiance et piétiné les vertus républicaines. Pourtant ils ont dû rembourser le trou du crédit Lyonnais, cette banque qui avait permis autrefois à Tapie de racheter des entreprises en difficultés avant de les couler totalement avec tous leurs salariés.(1) Mais l’homme a de la ressource et compose à merveille le personnage de la victime, de plus ses amis ont su mettre à profit ses talents de show-man démagogique en lui faisant prolonger sa carrière politique au cinéma, au théâtre et dans des séries télé.

Bernard Tapie n’a jamais disparu du paysage audiovisuel, ses complices de TF1 ayant fait le nécessaire pour que l’homme soit toujours en vue. Le comble étant que celui qui fut condamné pour corruption et fraude fiscale joue un policier à la télévision et soit convié lors d’émissions de société pour donner son avis sur les réformes à entreprendre et les différentes personnalités qui composent la vie politique française.

Bernard Tapie n’a jamais quitté les projecteurs et de là lui vient l’estime publique qu’il recueille encore parmi les Français. La télévision lui a offert le droit de demeurer sous les yeux des spectateurs qui attendent chaque soir dans leur salon, le passage des héros, politiques, médiatiques et crapuleux ; et en le conservant de la sorte en garde à vue, la télévision n’a jamais fait disparaître des consciences Bernard Tapie. Bien au contraire, ses démêlés avec la justice sont devenus comme la saga d’un héros venu du peuple que les aristocrates de l’Etat voulaient éliminer. Fadela Amara n’a-t-elle pas expliqué sur Canal+ (14/09) que si l’on s’en prenait autant à Bernard Tapie, « c’était à cause de ses origines populaires» ?

Bernard Tapie, héraut d’un peuple en souffrance qui pourfend l’élite dominatrice avec ses armes, le vice, l’absence de morale et le mensonge. Voilà bien un personnage télévisuel que l’on ne peut s’empêcher d’admirer. Dès lors, ses simagrées, ses bobards apparaissent comme des gestes de bravoure, ses paroles deviennent la représentation de ce que le peuple aurait aimé dire, si lui aussi pouvait venir sur la scène télévisuelle. Mais c’est bien connu, la télévision n’est réservée qu’à ceux qui nous oppriment par leurs lois, leur justice froide, leurs impôts, leur morale républicaine.

La télévision a le pouvoir de transformer une crapule en héros, de redonner de la légitimité à un repris de justice alors que le déshonneur aurait dû lui faire quitter définitivement la place publique. Ils sont nombreux, ces hommes politiques, à avoir de nouveau conquis les urnes, Balkany, Carignon,… la liste est longue et toutes ces personnalités ont en commun la couverture médiatique et la persistance télévisuelle dont ils ont bénéficié.

Les passages télé de politiciens corrompus, la starification du pire et de la médiocrité sont autant de phénomènes qui montrent au grand jour cette part sombre de nous-mêmes que la morale nous enjoint pourtant de réfréner. Mais le Surmoi, la vertu ne sont pas télégéniques, car ce sont autant de principes et de valeurs qui nous renvoient sans cesse à ce qui nous est interdit, refusé par une élite bien-pensante.

Laurent Monserrat

  1. Quand Tapie licenciait à tout va : reportage réalisé par France 2
  • Photographie : Bernard Tapie dans le Commissaire Valence

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