Le dernier mini-remaniement ministériel m'amène à exprimer mon jugement sur l'ouverture telle que la pratique Sarkozy. Besson, ancien homme de gauche, à l'immigration, c'est
quand même exactement le contraire d'une politique d'ouverture. L'ouverture c'est apporter une différence par des gens différents. Mais si on leur fait faire le contraire de ce que leur
différence pourrait apporter, comme pour Besson, alors on ne profite pas de la différence qu'ils pourraient apporter. Sans parler du reniement par l'intéressé de ses valeurs.
Heureusement l'ouverture, ce n'est pas que lui. L'ouverture, c'est avant tout l'ouverture à la société civile. La droite avait l'habitude de s'ouvrir à la société civile en employant des
chefs d'entreprise, et un ancien sportif pour le ministère des sports, mais Sarkozy innove en reprenant d'authentiques hommes et femmes de gauche qui militaient dans le monde associatif. C'est le
cas de Fadéla Amara, de Martin Hirsch et dans une moindre mesure de Bernard Kouchner. Là, il s'agit d'une ouverture véritable parce que ces militants associatifs ont une fonction en rapport avec
leur engagement.
Martin Hirsch a directement été chargé de mettre en oeuvre ce pour quoi il militait : le RSA. Aujourd'hui il se trouve à un autre poste, qu'il n'aurait sans doute pas accepté en 2007, et
où je ne vois pas encore tout ce qu'il pourra apporter. Mais il n'était sans doute pas possible de le nommer ministre des affaires sociales.
Fadéla Amara est tout à fait dans le poste qu'il lui fallait. Il aurait été possible de lui donner un ministère gadget à la condition féminine, un peu comme à l'époque Mitterrand, mais ça
n'aurait pas apporté grand-chose. J'espère qu'elle est bien entourée, parce que son ministère et surtout le plan banlieues (dont je parlais dans un précédent article) nécessite une grand expérience des administrations locales et nationales, de leur fonctionnement et des freins
qu'elles peuvent poser.
Bernard Kouchner, lui, n'est pas tout à fait dans le même cas. Ca fait longtemps qu'il est passé de militant associatif à responsable politique. Mais les affaires étrangères sont un
domaine où la droite et la gauche mènent, peu ou prou, la même politique. Primauté de l'Europe, politique arabe de la France, alliance naturelle avec les Etats-Unis, ... Kouchner a la
particularité d'être plus atlantiste que sa famille politique, de même que Sarkozy. Leur alliance présente donc une opportunité toute particulière.
L'ouverture ne se trouve pas qu'au gouvernement. L'ouverture, c'est aussi avoir confié au PS la présidence de la commission des finances de l'assemblée nationale. Quand on connait
l'importance des commissions au parlement, et quand on sait que la réforme des institutions et du règlement des assemblées va les rendre encore plus importantes, on comprend que cette
ouverture n'est pas une ouverture gadget. L'ouverture, c'est aussi confier des missions d'étude à des personnalités socialistes qui ont l'avantage d'avoir déjà travaillé sur ces sujets pour leur
famille politique, comme ce qui a été fait avec Jack Lang pour la réforme des institutions. Là, c'est plutôt le PS qui n'a pas joué le jeu en s'opposant à cette réforme qui n'était pas
partisane.
Je n'oublierai évidemment pas que l'ouverture concerne bien sûr les radicaux et les centristes. Sarkozy profite de l'expérience de Jean-Louis Borloo et de sa capacité à mener des réformes
consensuelles. Avec le nouveau centre, c'est différent. Ce nouveau et minuscule parti politique peine à trouver sa place. Il faut dire que l'UMP et le gouvernement ne l'aident pas, en ne
l'impliquant pas assez en amont. Il semble que ce parti se retrouve à voter des textes à l'assemblée sans avoir participé à leur rédaction, un peu comme s'ils étaient dans l'opposition.