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Résistance aux antibiotiques

Publié le 30 janvier 2009 par Marieclaude

La résistance aux antibiotiques fait occasionnellement la une des médias de masse. A-t-on raison de s'inquiéter?

Dans les esprits, résistance bactérienne rime le plus souvent avec infection acquise à l'hôpital. Pourtant, c'est un phénomène complexe et omniprésent. Et il n'est pas récent!

L'aventure des antibiotiques a commencé en 1928 avec la découverte, par l'Anglais Alexander Fleming, de la pénicilline: on pouvait enfin vaincre les pneumonies, syphilis et autres rhumatismes articulaires aigus qui faisaient tant de morts et d'éclopés par le passé. La Deuxième Guerre mondiale a accéléré leur diffusion, car dans les mouvements de troupes et de civils d'alors, les bactéries étaient des ennemis non moins redoutables que les *** fanatisés. Avec les vaccins, les antibiotiques constituaient à l'époque la plus formidable victoire de la médecine. Il était bien impossible alors d'imaginer que les antibiotiques n'allaient pas livrer toutes les formidables promesses qu'ils annonçaient...

L'aventure de la résistance aux antibiotiques commence, elle... tout de suite après. Le premier cas de staphylocoque doré résistant à la pénicilline a été rapporté en 1945, alors que cet antibiotique avait été utilisé pour la première fois en 1942 pour traiter un patient! De manière encore plus surprenante, la première description d'une enzyme bactérienne capable de détruire la pénicilline a été publiée en 1940...

On insiste beaucoup de nos jours sur les infections à staphylocoques dorés résistants à la méthicilline ou oxacilline (SARM) acquises à l'hôpital ou infectant les sportifs professionnels dans la promiscuité des vestiaires. On entend parler des épidémies d'entérocoques résistants à la vancomycine (ERV) en centre hospitalier. Pourtant, il existe plusieurs mécanismes de résistance aux antibiotiques.

Qu'est-ce que c'est, la résistance?
Les antibiotiques tuent les bactéries, mais chaque médicament tue seulement certains types de germes présents. La résistance, c'est quand on observe en laboratoire qu'une bactérie survit alors qu'elle est mise en présence d'un antibiotique spécifique et à une dose qui la tuait auparavant. Par contre, ce n'est pas toujours parce qu'une bactérie a l'air résistante en laboratoire qu'un patient atteint de cette même bactérie ne guérira pas alors qu'on lui a donné ce même médicament. Et ce n'est pas parce que quelqu'un est porteur d'une bactérie que cela le rend malade. On dit alors qu'il est «colonisé», plutôt qu' «infecté». Des milliards de bactéries, résistantes ou non, cohabitent en nous. Certaines nous rendent même de grands services.

Les causes de résistance bactérienne ne sont pas entièrement claires.

On entend souvent parler de mutation- par laquelle la bactérie peut modifier sa structure -, ce qui fait que l'antibiotique ne peut plus pénétrer sa membrane, ne peut plus se fixer à son site d'action, ou encore qu'elle a acquis un nouveau matériel génétique lui permettant de neutraliser ou de détruire l'antibiotique par des enzymes.

Dans certains cas, il est vrai que l'utilisation inadéquate d'un antibiotique favorise l'augmentation de la résistance vis-à-vis de cet antibiotique. Les bactéries qui ne sont pas tuées vont se multiplier et prendre la place des mortes. Et ces bactéries peuvent plus tard causer des infections qui ne seront pas guéries par les antibiotiques usuels. C'est pourquoi il est important de faire bon usage des antibiotiques, c'est-à-dire:

  • de prendre la bonne dose d'antibiotique, pour toute la durée prescrite, pour une infection bactérienne actuelle, diagnostiquée par un médecin: c'est ce qu'on appelle la «compliance» du patient;
  • d'éviter de traiter des infections virales par des antibiotiques.

En effet, la majorité des infections chez l'humain sont causées par des virus qui ne sont pas inactivés par ces médicaments. Par exemple, on ne traite pas un rhume avec des antibiotiques, à la déception de certains patients qui ont l'impression qu'ils ne guériront jamais s'ils ne quittent pas le bureau du médecin avec une prescription en main. Par contre, des infections bactériennes peuvent rendre très malade et il faut les traiter.

Le partage de microbes

Cependant, l'usage répandu des antibiotiques n'explique pas tout. Il est, par exemple, bien connu que les enfants fréquentant une garderie sont plus fréquemment colonisés avec des pneumocoques résistants à la pénicilline. Cependant, bien qu'on utilise beaucoup de pénicilline depuis très longtemps, les streptocoques du groupe A (les bactéries qui causent, entre autres, des amygdalites) n'ont jamais été trouvées résistantes à cet antibiotique.

On pense que l'utilisation très répandue d'antimicrobiens pour traiter le bétail destiné à l'alimentation humaine aurait joué un rôle dans le développement de la résistance, ainsi que les voyages et la densité de population. En augmentant la promiscuité, on augmente proportionnellement l'échange de microbes.

La résistance à l'hôpital

À l'hôpital, lieu d'élection des infections nosocomiales, on retrouve plus souvent des germes résistants aux antimicrobiens. Les gens hospitalisés y sont plus fragiles. Ils reçoivent des antibiotiques, ils ont des plaies et sont perforés par toutes sortes de tubes et autres corps étrangers qui ouvrent la voie aux bactéries. Celles-ci se transmettent entre les patients, soit en se touchant, soit par les mains du personnel soignant, soit par des instruments de soins mal nettoyés. On isole les patients qui sont colonisés ou infectés par des microorganismes particulièrement résistants, pour éviter la propagation aux autres patients.

La résistance dans la communauté

Depuis peu, on parle de l'apparition de SARM acquis en communauté, c'est-à-dire en dehors des milieux de soins de santé. Ces souches ont une origine différente et ont évolué en parallèle. Elles causeraient surtout des infections de la peau et des pneumonies. Les enfants risqueraient davantage de contracter ce type d'infection. En pratique, on ne connaît pas bien l'étendue de la colonisation par ce germe chez monsieur ou madame Tout-le-Monde et on observe peu de ces infections chez les enfants hospitalisés au Québec.

Le lavage de mains

Chacun a un rôle à jouer pour ralentir l'apparition de bactéries résistantes. La mesure la plus simple, la moins coûteuse et de loin la plus efficace pour éviter d'attraper un microbe ou de le transmettre à une autre personne, c'est le lavage des mains. À la garderie et à l'école, les lavabos devraient être facilement accessibles et le personnel devrait veiller à ce qu'ils en fassent bon usage, entre les activités, avant les collations. Il faut également avoir une bonne hygiène corporelle.

En cas de blessure, la peau doit rester propre. S'il y a suintement de sécrétions, il faut:

  • nettoyer la plaie, puis la recouvrir de pansements qui seront jetés rapidement après leur retrait;
  • éviter de partager les produits d'hygiène personnel ainsi que les articles qui entrent en contact avec les lésions;
  • se laver les mains après avoir touché à une blessure ou à un objet potentiellement contaminé.

Des recommandations canadiennes spécifiques existent pour différents groupes, dont les enfants en garderie ou à l'école, ainsi que pour les sportifs.

Bonne journée, Marie claude ref: service-vie.com  Par Maude St-Jean, Microbiologiste-infectiologue et pédiatre

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