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La bonne affaire Thomson

Publié le 01 février 2009 par H16

Comme l'a prouvé avec brio James Cameron dans son film Titanic, les meilleurs naufrages sont ceux qui durent longtemps, dans lesquels on peut découvrir une tendre bluette aux accents shakespeariens, et ... qui finissent mal. Cependant, Cameron n'a investi, finalement, que 200 millions de dollars dans la réalisation filmée de son récit. En Fraônce, on sait faire les choses bien, mieux même qu'Hollywood, et on n'hésite donc pas à larguer des milliards pour s'assurer d'un grand spectacle. L'affaire Thomson en est la parfaite illustration.

Symptomatique destin que cette société, au départ privée, issue de l'industrie électrique et de l'Amérique innovante du début du XXè Siècle...
D'un côté, la maison mère aura fusionné avec la société Edison pour donner la toute puissante General Electric, encore en activité actuellement, et dans les principales capitalisation boursières de la planète, rien moins.
De l'autre, la filiale française sera passée par bien des formes juridiques, aura subi les multiples interventions de la sphère publique, et, grâce aux vigoureux coups de boutoirs de l'Etat, aura finalement atteint un stade avancé de décrépitude qu'on ne pourra pas s'empêcher de rapprocher de celui du pays, les mêmes causes produisant généralement les mêmes effets.
Rappelez-vous (nostalgie, nostalgie) !
Thomson, c'était, suite à la nationalisation de 1982, un magnifique fleuron national dont la production de micro-ordinateurs, les MO6, MO7, TO6 et TO7, aura pu inonder les collèges et transformer des centaines de milliers de petites têtes blondes en ninja de l'informatique à stylo optique baveux intégré... D'ailleurs, il serait intéressant de mettre en parallèle les flamboyantes aventures du Thomson nationalisé avec celles, toutes aussi cocasses, d'un autre joyeux compère du même plan Informatique Pour Tous, j'ai nommé Bull.


Un concurrent du Macintosh... Enfin... Bref...
Pour l'un comme pour l'autre acteur technologique, l'arrivée au capital de l'Etat Français aura permis aux deux sociétés de s'exprimer en toute confiance sur le marché mondial, et donner une bonne idée de ce que la puissance publique permet en terme de bonne gestion, d'innovation et de bénéfice pour l'intérêt collectif. A ce titre, Bull et Thomson sont, véritablement, les Dupond et Dupont des nationalisations mitterrandiennes.
Mais ce qui caractérise Thomson, c'est que ce n'est pas la première fois que son naufrage est annoncé clairement, au contraire de Bull où la rumeur circule depuis 20 ans et qui constitue maintenant une bonne blague.
Et ce n'est pas la première fois que la France se penche lourdement sur le cas de ce fleuron industriel dans la tempête des pertes financières. Tout comme le Titanic qui mit des heures à couler aussi bien en réalité qu'à l'écran, Thomson fait preuve depuis sa nationalisation d'une lenteur pachydermique à s'enfoncer mammouthesquement dans la boue gluante des refinancements publics à la fin desquels on distingue de mieux en mieux une faillite carabinée. Rappelez-vous (nostalgie, encore), en 1996, alors que Juppé nous imposait sa pénible présence au gouvernement : Thomson, après une recapitalisation de 11 milliards de francs (une paille), devait être vendue à Daewoo ... pour 1F symbolique. Opération qui échoua, bien sûr : Juppé, en bon habitué de l'opération depuis les grèves de 1995, baissa son pantalon.
Certes, depuis 2003, l'Etat, petit malin, a pris soin de larguer discrètement ses dernières participations en 2003 pour pouvoir se dégager ainsi de toute responsabilité lorsque l'autopsie sera faite. Mais les faits sont là : Thomson ne s'est jamais remis des interventions étatiques.

Flamboyant, n'est-ce-pas ?
Quand on sait que les résultats ci-dessus se font à une période pendant laquelle l'économie mondiale ne partait pas totalement en sucette, on peut redouter le pire pour les années de contraction qui viennent.
Cependant, je suis mauvaise langue : si, en 1996, Juppé en proposait 1F symbolique, le moment n'est plus très loin où Thomson se verra proposer 1€ symbolique pour le reprendre. De 1F à 6.55F, c'est tout de même six fois mieux, en 13 ans, ce qui est une bonne performance, notamment pour l'Etat.

Parfois, la réalité dépasse la fiction
Et l'avenir ne semble en effet pas rose pour cette entreprise qui aura bu, pendant de longues et pénibles années, au poison public : avec la dégradation de sa note, la chute de son cours de Bourse concomitante à ses besoins de financement dûs à une dette de plus en plus gênante, le défaut de paiment bien glauque n'est plus très loin.
Eh oui : l'état dispose de ce pouvoir magique et rare qui consiste à transformer par simple toucher l'or en plomb et le plomb en merde. Petit à petit, Thomson sera passé par chacun de ces stades, avec le concours actif de l'état. Non seulement, la société va carafer ou devoir supporter, à nouveau, une recapitalisation étatique, mais ces opérations se seront faites à grand frais sur l'argent du contribuable. En pure perte : l'argent ainsi brulé aurait certainement pu être laissé dans les poches des contribuables qui auraient certainement trouvé à l'occuper, consommations ou investissements qui auraient permis de soutenir efficacement des sociétés ou des emplois que, finalement, cette injection étatique, artificielle et obligatoire, ne sauvera pas.
Le plus triste, dans l'affaire, est que cette démonstration pourtant limpide de l'effet catastrophique de l'intervention publique n'empêchera pas les mêmes politiques et les mêmes contribuables de réclamer encore plus d'intervention publique, tant dans les technologies que dans la finance, par exemple. L'avantage, c'est qu'on connaît maintenant l'issue fatale de ces interventions.
Cette société est fichue.


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