Profs de fac : «un 29 janvier tous les trois jours !»

Les représentants des professeurs ont voté lundi après-midi une grève « totale, reconductible » de l'université qui pourrait sceller l'union avec les étudiants et les personnels administratifs. Une collégialité née de l'élan du 29 janvier à la visée clairement anti-gouvernementale que menace seulement des tensions internes sur le mode d'action.
« L'université « appelle » à la grève ou « se met » en grève, y'a une nuance !», insiste un grand gars échevelé au balcon de l'amphi Richelieu. Un prof le félicite du rang suivant : «heureusement que les jeunes sont là pour réfléchir !» A 15 heures passé, les animateurs de la tribune de l'Assemblée générale des enseignants ont un peu de mal à démêler les revendications qui déferlent de l'audience qui se tasse jusque dans les escaliers pour assister aux débats. L'annonce du Snesup semble avoir joué en la faveur des organisateurs : à 11 heures, le syndicat affilié à la FSU pointait 45% des activités universitaires (enseignants et administratifs) suspendus.
L'effet 29 janvier
Au coeur des revendications, les réformes du contrat doctoral, l'évolution de la formation des professeurs, la réduction des effectifs et la casse de la recherche. « Derrière toutes ces politiques, qui ne sont pas des réformes mais des régressions, il y a les économies de moyen, il y a la Révision générale des politiques publiques ! », lance un représentant de Sud Écoles Maternelles vivement applaudi.
Pour mot d'ordre : une attaque frontale et généralisée de la politique gouvernementale mêlant enseignants, personnels administratifs et étudiants. « Nous ne voulons échouer comme l'année dernière à cause de la division entre profs et élèves », insiste un syndicaliste de la Sorbonne. Le 29 janvier est dans tous les discours et dans toutes les têtes, un syndicaliste appelant même l'université à organiser « un 29 janvier tous les trois jours ! ». Le texte projeté sur l'écran « appelle à une grève totale, reconductible et illimité de l'université française ». Une fois le vote venu, tous les cartons rouges s'élèvent dans la salle pour le « oui ».
Petites divergences internes sur le mode d'action
La grève votée ne portant que sur les décrets sur le contrat doctoral et la formation des profs, plusieurs s'élèvent pour élargir la plate-forme de revendication : « cette motion doit contenir la suppression de la LRU (loi de responsabilités des universités, votée en août 2007) », insiste un prof d'histoire venu de Rouen. « Un ultimatum sur trois ans de législation, ce n'est pas sérieux, corrige un représentant de la fac de Sciences de Reims. Obtenons le retrait des deux décrets et ensuite nous prouverons que le reste est pourri. »
Quelques moments de tensions font planer l'inquiétude dans la salle. Appelé à la tribune, le représentant de l'Unef et violemment hué, malgré un discours consensuel appelant à la « création d'un rapport de force nécessaire avec le gouvernement ». Quelques minutes après, ça repart : une représentante du collectif Univers Cité, basé à Lille, met en garde contre les tentatives de casse de la mobilisation « par la propagande du Snesup et de l'Unef. »
Les frictions d'appareil masquent mal la volonté d'en découdre : « nous avons quatre revendications lisibles, c'est tout ce dont nous avons besoin », insiste une prof mandatée par le Snesup. Un représentant de Nanterre insiste sur la nécessité de réfléchir au « nerf de la guerre », à la capacité des enseignants de se mobiliser, là où les précaires « ne peuvent pas utiliser l'astuce qui consiste à ne pas se déclarer en grève. » L'air rêveur, un intervenant prend le micro et se contente d'une phrase : « la grève reconductible dont nous parlons, elle a commencé aujourd'hui ! » Prochain bilan d'étape : jeudi 5 février pour une manif unitaire des profs et des étudiants ? Philippe MARX - Agir ! Réagir !