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Caramel, un film à déguster de plaisir…

Par Philippe Chouraqui

Hier soir, je suis allé voir le film de Nadine Labaki, Caramel, portrait de 5 femmes dans le Liban d’aujourd’hui. Le parallèle avec Vénus Beauté est facile et inévitable, bien qu’il ne me semble pas justifié. Caramel est un film d’une grande finesse, véritablement esthétique, à l’image de l’affiche, et instructif sur la condition de la Femme au Liban.

Si les portraits pouvaient laisser craindre la présence de beaucoup de stétérotypes (la maîtresse d’un homme marié, l’homosexuelle, la vieille fille qui a sacrifié sa vie pour s’occuper de sa soeur aînée, la femme très soucieuse de son apparence, la jeune femme non vierge sur le point de se marier), ils ont tous été évités. Il n’est en aucun cas question de femmes marquées par des hommes machos et tous salauds, mais de portraits attachants décrivant des femmes qui tendent vers un mode de vie occidentale avec tout le poids de la tradition.

A de nombreuses reprises, on perçoit que si les femmes sont de plus en plus libres au Liban, que si l’émancipation est réelle, la tradition apporte toujours son lot de contraintes : impossibilité de louer une chambre d’hotel si on n’est pas marié, devoir d’être vierge pour son mari au point de se faire opérer si ce n’est plus le cas, rejeter un amour à 65 ans aparce qu’on n’a plus le droit d’être amoureuse passé un certain âge, et le poids constant du regard des autres et de la famille. A ce titre, le personnage de la Tante Rose est celui qui m’a le plus ému. Non seulement cette femme est belle, mais sa générosité de coeur, sa dévotion à sa soeur, son abandon de sa vie de femme, sont à la fois tristes et extrêmement touchants.

Ce film a aussi le mérite de montrer un Liban coloré, joyeux, vivant. Le tournage s’est terminé une semaine avant le début de cette nouvelle guerre, et on a envie de conserver le visage que Nadine Labaki nous propose. Si elle a hésité à ne pas monter son film après le déclenchement des hostilités, c’est aussi un très beau message d’espoir qu’elle nous délivre.

Contrairement à ce que l’on pourrait craindre, ce n’est en aucun cas un film de filles, devant lequel les hommes risquent de s’ennuyer d’un côté midinette, jamais présent. Les hommes sont présentés, non pas comme des machos, salauds (le seul présent n’est jamais montré à l’écran), mais comme des êtres sensibles, maladroits, timides, mais aussi courageux, comme lorsque le gendarme ose entrer dans ce salon de beauté, lieu réservé aux femmes dont il ignore tous les codes.

Le côté comédie, la musique omniprésente, et le voir en VO ajoutent du charme et de la chaleur à ce film, sans ne jamais retirer l’émotion qu’il nous procure. Comme le dit Nadine Labaki, “Caramel c’est aussi l’idée du sucré-salé, de l’aigre-doux, du sucre délicieux qui peut brûler et faire mal.

J’ai véritablement passé un moment délicieux en regardant ce film… et en dégustant le couscous qui suivit avec ma chère et tendre.



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