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Ces garçons qui venaient du Brésil

Publié le 06 février 2009 par Corcky




Je suis bien embêtée, ami lecteur.
Telle que tu me devines, là, en ce riant mais glacial matin de février, je suis bien embêtée.
Tu connais mon goût immodéré pour l'humour le plus noir, mon attachement profond à la gaudriole la plus crasse et mon amour sincère pour le cynisme le plus assumé.
Tu connais aussi mon indéfectible loyauté envers tout ce qui touche à l'Histoire (note la majuscule, c'est important), parce que comme tu le sais, je reste intimement persuadée que c'est en apprenant de notre passé que nous sommes éventuellement en mesure d'améliorer vaguement notre avenir (note, ici, la profondeur de cette assertion qui n'a rien à envier, question inspiration, au génie d'un discours écrit par Henri Guaino à l'intention de NicolasSarkozy pour l'inauguration de la Foire Régionale du Porc à Plouescat).
Or, lecteur chéri, lorsque l'ancien humoriste Dieudonné (un comique-troupier reconverti dans la promotion permanente des "Protocoles des Sages de Sion" et, accessoirement, dans le roulage de pelles monumentales aux trépanés du bulbe qui aiment marcher au pas de l'oie en écoutant le Horst-Wessel-Lied), lorsque donc ce bon vieux Dieudonné avait dansé un petit pas de deux sur la scène du Zénith en compagnie du négationniste Robert Faurisson, sous les applaudissements de quelques milliers de sympathisants du Front National et du GUD (et en présence du borgne en personne, ce qui est toujours un gage de qualité, car mieux vaut chanter Maréchal, nous voilà devant Dieu en personne que siffloter bêtement Heili Heilo Heila devant ses saints), j'avais hésité, en apprenant la nouvelle et en visionnant la performance, entre une énorme et irrépressible envie de régurgiter séance tenante mon cassoulet au lard du Piémont, et un brûlant et douloureux besoin de soulager mes intestins au plus vite.
Je me souviens d'avoir ensuite plaisanté, avec quelques amis, sur ce que pourrait être la prochaine fellation dieudonesque prodiguée aux sympathiques séides de Brasillach et de Laval.
Un copain avait avancé l'idée d'un spectacle sans doute co-écrit avec Le Pen en personne, une joyeuse farce d'une heure et des poussières remplie de faux déportés fourbes et hypocrites, de nazis bienveillants et de gentils miliciens.
Une amie avait parié sur un boeuf musical énorme, avec sur scène Ultime Assaut, Napalm Rock et Fraction Hexagone, Dieudonné au chant et la chorale d'Hitler en guise de choeurs (avec, en guise de climax musical ultime en fin de concert, le tabassage humoristique et convivial d'un gosse porteur d'une kippa).
Pour ma part, gentil lecteur, et parce que l'esprit de compétition guide chacun de mes pas, comme tu le sais, j'ai voulu jouer la surenchère.
J'ai donc affirmé que lors de son prochain show lepéniste, Dieudonné allait carrément faire monter sur scène le docteur Aribert Heim, le criminel nazi le plus recherché de la planète, lui offrir une clope, un verre de rouge, et puis l'interroger en souriant sur les expériences de vivisection que ce bon vieux "Docteur la Mort" avait l'habitude de pratiquer sur les déportés du camp de Mauthausen.
Seulement voilà.
Aribert Heim est, dit-on, mort de sa belle mort, quelque part en Egypte.
Alors, bien sûr, je suis bien embêtée.
Oh, pas pour moi, rassure-toi. Même si j'ai évidemment perdu mon pari, ma mauvaise foi légendaire aura tôt fait de me sortir d'embarras.
Non, si je suis embêtée, c'est plutôt pour Dieudonné.
S'il ne peut pas faire le tapin l'année prochaine en dansant un slow langoureux avec le "Boucher de Mauthausen" sur la scène de la salle des fêtes de Ploucville, quel gage de bonne volonté va-t-il devoir donner aux nouveaux cagoulards pour lesquels il racole depuis quelques années?
J'ai bien une petite idée, mais si tu le permets, lecteur, je la garderai pour moi.
On ne sait jamais.


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