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“Politic action”

Publié le 07 février 2009 par Jlhuss

J’ai déja évoqué le Obama écrivain à propos de son livre “Les rêves de mon père ” mais également pour “L’audace d’espérer “, vous promettant un compte rendu de lecture. Il est à venir plus globalement, mais je vous livre ici une bonne page. Elle concerne l’exercice de la politique et ses motivations.

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“Dans le monde inter-connecté d’aujourd’hui, il est difficile de pénétrer la conscience d’un électorat très occupé et distrait. En conséquence, gagner en politique se réduit à une simple reconnaissance de son nom et c’est la raison pour laquelle la plupart des sortants passent une grande partie de leur temps entre les élections à s’assurer qu’on répète leurs noms encore et encore, que ce soit quand ils coupent un ruban pour le défilé du 4 juillet ou au fil des émissions-débats du dimanche matin. Les sortants ont un avantage bien connu dans la collecte des contributions financières puisque les groupes d’intérêts -de droite ou de gauche- vont dans le sens des chances de victoire lorsqu’il s’agit de verser de l’argent.[…]

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Un autre facteur entre en jeu, cependant. On en parle rarement mais il contribue à expliquer pourquoi les sondages indiquent régulièrement que les électeurs détestent la Parlement mais aiment bien les parlementaires. Aussi difficile à croire que ce soit, la plupart des hommes politiques sont des gens dignes d’être appréciés.

Pris individuellement, ce sont de merveilleux compagnons. En général ils se révèlent intelligents, réfléchis et travailleurs, disposés à consacrer de longues heures d’attention aux problèmes de leurs États. Certes, il y a ceux qui correspondent aux clichés, qui parlent interminablement ou persécutent leurs collaborateurs, et plus je passe au Sénat, plus je peux discerner dans chaque sénateur les défauts dont nous souffrons tous à des degrés divers : ici un mauvais caractère, là un entêtement profond ou une vanité insatiable. La plupart de temps, toutefois, la fréquence de ces traits de caractère n’est pas plus élevée au Sénat que dans n’importe quelle autre tranche de la population prise au hasard. Même lorsque je discute avec ceux de mes collègues avec qui je suis en total désaccord, je suis  généralement frappé par leur sincérité foncière, leur désir d’améliorer les choses, de rendre le pays plus sain et plus fort, par leur désir de représenter leurs électeurs et leurs valeurs aussi loyalement que les circonstances le permettent.

Qu’est-il donc arrivé pour que ces hommes et ces femmes se transforment en ces personnages lugubres, obstinés, hypocrites et parfois cruels qui peuplent chaque soir nos journaux télévisés ? Qu’est-ce qui a empêché des hommes raisonnables et consciencieux de gérer convenablement les affaires du pays ? Au bout d’un certain temps passé à Washington, j’ai vu certains de mes amis chercher sur mon visage des signes de changement, des manières pompeuses dans mon comportement, des traces de mesquinerie ou de dissimulation . Je me suis examiné de plus près, j’ai discerné en moi certains traits que je partageais avec mes nombreux collègues et je me suis demandé ce qui pourrait m’empêcher de me transformer moi-même en politicien typique de mauvais feuilleton télévisé.

Un des points de départ possibles de mon enquête fut d’essayer de comprendre la nature de l’ambition car, à cet égard au moins, les sénateurs sont différents du commun des mortels. On devient rarement sénateur des États-Unis par hasard. Cela requiert au minimum une certaine mégalomanie, la conviction que, de tous les gens talentueux de votre État, vous êtes, pour une raison ou pour une autre, le plus qualifié pour parler en son nom, une conviction suffisamment forte pour être prêt à subir l’épreuve parfois exaltante, parfois accablante, mais toujours légèrement ridicule, que nous appelons campagne électorale.

De plus, l’ambition seule ne suffit pas. Quel que soit l’écheveau de motivations, sacrées et  profanes, qui nous pousse à devenir sénateur, ceux qui y parviennent doivent faire preuve d’une détermination quasi obsessionnelle, souvent au prix de leur santé, de leurs relations, de leur équilibre mental et de leur dignité. Je me souviens qu’à la fin des primaires (NDLR : Sénatoriales de l’Illinois) j’ai regardé mon agenda, et je me suis rendu compte qu’en un an et demi j’avais pris exactement sept jours de vacances. Le reste du temps, j’avais travaillé douze à seize heures par jour.

Ni l’ambition ni, la détermination obsessionnelle ne rendent cependant totalement compte de la conduite des hommes politiques. Il s’y ajoute un sentiment peut-être plus général et plus destructeur, un sentiment qui, après la griserie de l’annonce officielle de votre candidature, vous prend dans ses griffes et ne vous lâche plus avant le jour des élections. C’est la peur. pas seulement la peur de perdre -encore que ce soit déjà éprouvant- mais la peur d’une humiliation totale.”[…]

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Les hommes politiques prisonniers de leurs riches donateurs ou succombant aux pressions de groupes d’intérêts : voilà un échantillon de la façon de rendre compte de la vie politique actuelle, le fil qui court dans presque toutes les analyses sur ce qui ne va pas dans notre démocratie. Mais pour l’élu qui se soucie de garder son siège, il y a une troisième force qui le tiraille et le bouscule, qui modèle le débat politique et délimite le champ de ce qu’il estime pouvoir faire ou non, des positions qu’il peut prendre ou non. Quarante ou cinquante ans plus tôt, cette force, c’était l’appareil des partis : les patrons des grandes villes, les experts en combines politiques, les décideurs de Washington, qui pouvaient faire ou briser une carrière d’un coup de téléphone. Aujourd’hui, cette force, ce sont les médias.

Une précision, ici :pendant trois ans, du jour ou j’ai annoncé ma candidature au Sénat jusqqu’à la fin de ma première année de sénateur, j’ai bénéficié d’une couverture médiatique positive exceptionnelle et parfois imméritée. Cela tenait sans aucun doute à mon statut d’outsider total dans la primaire, à la nouveauté d’un candidat noir aux origines exotiques. cela tenait peut-être aussi à ma façon de communiquer, parfois décousue, hésitante et verbeuse mais propre peut-être à susciter de la sympathie chez les esprits littéraires.

Personnellement, je n’ai donc pas à me plaindre. Ce qui ne signifie pas pour autant que je peux me permettre d’ignorer la presse. Précisément parce que les médias ont donné de moi une image d’un niveau auquel j’aurai peut-être du mal à me maintenir, j’ai conscience que le système peut rapidement fonctionner en sens inverse.[…]

Ce bruit et cette fureur, amplifiés par la télévision et par internet, ont rendu plus rude la vie politique. Ils poussent les tempéraments à s’enflammer, ils contribuent à semer la méfiance. que les hommes politiques l’admettent ou non, un flot constant de vitriol a des effets sur l’esprit. Curieusement, nous ne nous préoccupons pas trop des attaques les plus grossières. si les auditoires de Rush Limbaugh prennent plaisir à l’entendre m’appeler “Oussama Obama”, je les laisse s’amuser. Ce sont les praticiens plus subtils qui parviennent à vous piquer, en partie parce que l’opinion leur accorde une crédibilité plus grande, en partie à cause de l’habileté avec laquelle ils se jettent sur vos déclarations et vous font passer pour un crétin.” […]

Ce qui rend la juxtaposition de communiqués de presse contradictoires si captivante, c’est qu’elle nourrit ce vieux filon journalistique le conflit personnel On ne peut guère nier que la civilité politique a décliné ces dix dernières années et que les partis ont de profondes divergences sur les sujets essentiels. Mais ce déclin de la civilité provient en partie de ce que, du point de vue de la presse, ladite civilité est ennuyeuse. Vos propos ne seront pas publiés si vous déclarez : “Je comprends l’opinion de l’autre” ou “le problème est vraiment compliqué.” Mais partez à l’assaut et vous aurez du mal à repousser les photographes. Souvent les journalistes s’efforcent d’attiser le feu en posant leurs questions dans des termes visant à provoquer une réponse incendiaire.

Manipulation, grossissement des conflits, recherche tous azimuts des scandales et des bévues : tout cela a pour effet cumulé de saper les normes établies pour juger de la vérité.” […]

Barack Obama dans “L’audace d’espérer”

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