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Jean Paul Betbèze, Crise : une chance pour la France

Publié le 09 février 2009 par Alains

Plaidoyer pour un train de réformes salutaires, inscrivant enfin la France en Europe face au nouvel impératif mondial avec ses atouts, spécialisation agricole et industrielle mais aussi tertiaire et quaternaire(le service à la personne). En neuf chapitres bien sentis, il nous livre une analyse tonique et intéressante des enjeux que devrait considérer la France pour sortir de cette crise moins désabusée, moins résignée et surtout moins négative.

Crise chance pour la france
 

Professeur d’université, Directeur des études économiques du Crédit Agricole, chroniqueur infatigable et incisif, au sein d'hebdomadaires ou de mensuels, il nous livre les nouveaux impératifs qui s’imposent à la France et les accompagne d’un message d’espoir, aux allures stendhaliennes (auteur qu’il affectionne). Le style, l’humour et l’écriture alerte nous font parfois oublier ses aspects techniques et scientifiques pour accéder à l’essentiel : un monde nouveau qui s’est transformé depuis le début des années 90,. Ce monde nous offre une multitude de possibilités et de nombreux motifs à réformer notre vieux pays, fort sympathique et attachant, malgré son inertie légendaire et sa résistance aux changements.

Cette crise est une chance pour la France, car elle va d’abord permettre au nouveau Président de la République d’enclencher des réformes que la sphère politique d’antan et les électeurs français ont  longtemps retardé afin de « ménager » la transition de notre pays  vers la nouvelle économie mondiale, globale et depuis 1990, planétaire. Ensuite, parce qu’elle exige de dire la vérité sur les nouvelles contraintes qui s’imposent à nous et de mobiliser les moyens nécessaires afin d’atteindre ses objectifs et par là rompre avec la gouvernance des affaires des années 70 consistant à faire sans dire malgré les Français. Son message :  « Il faut se réformer : pour profiter de l’Europe et de sa force dans le monde. Pour changer avec elle, et pour la faire évoluer aussi. L’Europe permet et facilite le changement de chacun de ses membres. Elle est un multiplicateur de croissance, mais si et seulement si chacun commence chez lui. »

Déjà faudrait il affronter et vaincre les crises auxquelles l’économie est confrontée, crise des subprime, crise financière, crise bancaire et crise économique annonciatrice d’une nouvelle période de croissance molle (on a connu cela au début des années 90), source de grandes restructurations industrielles et tertiaires.  La crise des subprime n’a pas tué le capitalisme, mais elle a révélé de profonds désordres qui vont le changer en profondeur à commencer par : la rigidité des nouvelles règles comptables, les limites de la valorisation des actifs (fair value quand tu nous tiens), le cloisonnement des régulateurs (l’absence de coopération), la myopie des marchés… (bref, le dispositif présent est à la fête) !

Nous avons apprécié l’étendue des dégâts de la crise financière avec la ruine des actionnaires, la montée des avoirs bancaires au sein de chaque banque centrale, le creusement du déficit financier, l’illiquidité des marchés interbancaires. Nous sommes passés par la faillite de Lehman, et la remise en cause du principe du  « too big to fail », qui pourtant a mené un gros nombre de conglomérats à jouer avec le « hasard moral » en prenant un trop grand risque sur les créances immobilières (directes comme titrisées) et à subir la loi du marché actuel qui fuit les actifs risqués au prix de fortes baisses de leurs prix et d’une déconnexion par rapport à leurs valeurs intrinsèques.

Nous sommes passés ainsi d’une crise de liquidité à une crise de solvabilité (fuite vers la qualité oblige). La comptabilité des avoirs au prix de marché a un effet dépressif durable et comulatif. Du fait de l’incertitude forte qui pèse sur les bilans bancaires et financiers. Les mesures de sauvegarde des autorités publiques, banques centrales et gouvernements, ayant assuré une stabilisation qui mettra du temps à apparaitre comme durable.

La mise en place des réformes sera douloureuse, car avant d’aller mieux, nous allons devoir passer par une phase ou le changement sera perçu négativement (combien de fois, nous sommes nous arrêtés au milieu du gué, alternances obligent). Des différentes mesures, le dispositif fiscal est le plus rapide à faire effet. Pour le reste, "Il y a aussi un mieux si l’on surveille les dépenses publiques, […]. Il y a aussi un mieux sur les prix si l’on accroit la concurrence, un mieux sur l’emploi si l’on augmente la flexibilité."

Au minimum, il faut attendre un à deux ans pour les mesures fiscales, un peu plus pour la concurrence et un peu plus pour l’emploi. » Les réformes nécessitent une volonté, un train de mesures coordonnées et le temps suffisant. La France a toujours été rétive, et surtout a souvent fait évoluer la majorité politique afin de s’y soustraire. L'Allemagne a quatre années d’avance sur nous, avec les résultats que nous avons constaté en 2007 et 2008. C’est pourtant au moment ou les Etats Unis se coordonnent, cherchent une nouvelle voie dans le débat de la refondation du capitalisme que la France doit peser. Sans doute en commençant par coordonner l’Europe.

Pour faire la course en tête, il faudra être source de propositions par la production d’idées : la réforme des universités, la regroupement des campus, la revalorisation de la carrière des chercheurs, la production des normes (pour ne pas les subir), l’harmonisation des contrôles  (actualité oblige, en particulier dans la finance). Il faut assurer aussi pour nos entreprises le renforcement des fonds propres de nos entreprises à partir de l’épargne salariale, mais aussi en réformant les modalités de détention des actions au sein des assurances et institutionnels financiers détenteurs de l’épargne longue. Et, enfin, améliorer les moyens d’informations de la BCE pour affiner son analyse macro économique des économies européennes.

Pour faire la course en tête, « il faut viser les 3% de notre croissance potentielle, sachant que nous sommes à 2% en moyenne ». Et aller chercher ce 1% supplémentaire de croissance, cela passe par l’application du rapport d’Eric Besson en octobre 2008, prendre position sur notre insertion au sein de la mondialisation à horizon de 2025, identifier nos spécialisations internationales, fortifier notre recherche, se prémunir contre les grands risques du 21e siècle, sécuriser notre accès aux ressources naturelles, réformer l’Etat et enfin aboutir à un nouveau contrat social (vivre ensemble).

Il faut enfin compter sur la qualité de nos forces vives, qui seront appelées à travailler plus et plus tard, notre agriculture, nos villes, un nouveau modèle de consommation (low cost : dépenser plus avec autant), notre tourisme, notre logistique, le luxe et le conseil industriel et tertiaire. En s’appuyant sur notre maillage de petites sociétés.

Pour le reste, il est nécessaire d’accompagner dans la durée l’ajustement des déséquilibres financiers internationaux, qui passent par une Amérique qui épargne plus et une Chine qui consomme plus. Mais aussi par une Europe qui se positionne dans cette nouvelle spécialisation internationale. Et c’est par le renforcement de l’Europe, que nous lutterons contre la dureté et la vigueur de cette crise. Cela passe par un redéploiement industriel de nos entreprises européennes, de nos banques et assurances, et bien entendu de la mise à plat de l’expression politique de notre union.

Jean Christophe Cotta, Allocation & Sélection


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