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La frivolité essentielle. Du vêtement et de la mode

Publié le 10 février 2009 par Anonymeses

Monneyron, Frédéric, La frivolité essentielle. Du vêtement et de la mode, Puf, Quadridge, 2001 (1ère édition), 2008

Le vêtement est l'objet d'un refoulement symptomatique : alors qu'il différencie le plus évidemment l'homme de l'animal, distingue les hommes entre eux ou identifie une époque, il a été peu étudié. Objet considéré comme futile, superficiel, son rôle dans la construction des identités individuelles ou sociales est sous-estimé. Si l'on admet volontiers que l'on peut lire l'ambiance d'une époque par sa littérature, son cinéma ou, d'une manière générale, par l'ensemble de ses créations artistiques, pourquoi ne la lirait-on pas par ses vêtements ? se demande l'auteur en préalable de son étude. Etant donné que le vêtement entretient un rapport plus direct avec le corps et concerne un plus large public, sa valeur heuristique promet même d'être supérieure. Ecrire sur le vêtement, ainsi que se le propose Frédéric Monneyron dans cet essai impose donc de renverser l'attitude traditionnelle devant le vêtement, cette chose frivole, simple apparence trompeuse... Le colloque Le Vêtement que l'auteur a organisé au château de Cerisy en juillet 1998 a ouvert la voie à un tel retournement. Le livre dont nous nous proposons de rendre compte La frivolité essentielle s'inscrit dans le prolongement de ce colloque et s'efforce de remédier au manque d'une « théorie et d'une pratique sociologique du vêtement et de la mode » (p 10) L'ouvrage entend réponde à un certain nombre de questions : En quoi l'adoption de tel ou tel vêtement peut-elle modifier un comportement ou déterminer une identité ? Quelle est la fonction sociale de la mode ? Frédéric Monneyron répond à partir de l'exploitation d'un matériau iconographique. Celui-ci n'est pourtant jamais présenté comme tel, ni explicité, ce qui nous fait classer l'ouvrage dans la catégorie essai.

Le premier chapitre « Du vêtement comme anticipation sociale » s'efforce de démontrer l'importance du vêtement : « je voudrais en effet m'employer à esquisser que, non seulement le vêtement ne suit pas l'histoire mais, position quelque peu iconoclaste qu'il la précède ; que bien de nos comportements » sont déterminés par lui. (p17) On ne peut fonder cette primauté du vêtement que sur un renversement de toute la tradition philosophique occidentale, pour qui l'essence de l'homme se trouve sous le paraître. Contre l'idée que le vêtement est une apparence accessoire et souvent trompeuse, Frédéric Monneyron soutient que le vêtement représente « un modèle social déterminant des comportements et des manières d'être » (p 19) Les exemples les plus parlants pris par l'auteur sont ceux de l'identité et de la fonction sexuelles des vêtements. Le dimorphisme sexuel du vêtement contribue à la définition de l'identité féminine et masculine, ce que ne manque pas de souligner le dandysme, qui constitue une remise en question du système vestimentaire et du dimorphisme sur lequel il est assis.

Le chapitre trois « De l'espace et du temps » n'est pas moins intéressant. L'auteur y analyse de façon stimulante le rôle du vêtement ethnique, des emprunts vestimentaires d'une civilisation à une autre. D'une part, ces vêtements dits ethniques nous renseignent sur le regard qu'une société porte sur des cultures différentes, ils disent le désir de sortir des cadres occidentaux, une « révolte contre les valeurs du monde occidental » (p 60). L'introduction par Pierre Cardin en 1968 dans le vestiaire occidental de la veste à col Mao en est un exemple parmi d'autres analysé page 61 et suivantes. Le chapitre quatre « Des sexes et de la sexualité » s'intéresse à la remise en cause du dimorphisme sexuel, à la recomposition des rôles de sexe que symbolisent l'adoption du pantalon ou du complet-veston d'homme par les femmes ou l'utilisation d'éléments du vestiaire féminin par les hommes. Les trois derniers chapitres de l'ouvrage s'attardent sur trois couturiers et rapportent leurs créations à leur époque : Yves Saint-Laurent pour les années soixante-dix, Jean-Paul Gaultier pour les années quatre-vingt, et enfin Christian Lacroix pour les années quatre-vingt dix.

Frédérique


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