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Quitter la Sécu ?

Publié le 20 février 2009 par Roman Bernard
J'ai attendu le centième vote au sondage sur la privatisation de la Sécurité sociale (le nouveau, accessible dans la barre latérale, porte sur le monopole scolaire de l'Éducation nationale, une question déjà abordée ici). Le résultat est sans appel : 71 % des votants sont opposés à la privatisation de la Sécurité sociale. Un résultat qui dépasse largement le traditionnel clivage gauche-droite. Et un résultat qui n'est guère surprenant. J'ai déjà dit, dans le troisième volet de l'entretien avec Timothé Ménard, que je suis favorable à cette privatisation de la Sécurité sociale. Appartenir à la minorité de 29 % ne me convainc que d'une chose, c'est de la longueur du chemin qui reste à parcourir avant que l'État* cesse de s'occuper de la Santé. C'est un travail de longue haleine, auquel s'était attelée Laure Allibert, ancienne membre du Réseau LHC, dans un blog injustement critiqué à mon sens, et qui m'a fourni le titre de ce billet. Les critiques que ce blog a reçues sont dues, me semble-t-il, au tabou qui entoure la Sécurité sociale.
Un tabou qu'avait tenté de briser Malakine, qui n'est certainement pas un partisan de la privatisation de la Sécu, au sujet de l'inflation des dépenses de santé :
Je ne me suis jamais expliqué pourquoi on était si attaché à l’idée de soins gratuits. On trouve normal de payer son alimentation, son chauffage, son coiffeur, ses chaussures – des besoins pourtant fondamentaux – mais on trouve inadmissible d’avoir à payer le moindre euro pour se faire soigner une dent ou pour l’achat de quelques remèdes ! On trouve même normal d’aller chez le médecin, juste pour une ordonnance permettant d’avoir gratuitement ce qu’on avait envie de s’acheter.
L’idée qu’il y a derrière cet absolu refus de payer, c’est qu’on n’est pas responsable de sa santé. Le malade n’a pas choisi d’être malade. Il n’y est pour rien. Ce n’est donc pas à lui de payer pour le traitement, mais à l’Etat.
Voilà l’idée fausse et dangereuse sur laquelle tout le système est fondé et qui fait que celui-ci est inflationniste et irréformable. Notre médecine ne soigne pas des malades, mais des maladies, qui sont censées apparaître subitement, sans raison, aléatoirement. On ne traite d’ailleurs pas la maladie, mais le plus souvent ses symptômes. Et comme tout système qui s’attaque aux effets sans s’intéresser aux causes, le système de santé est terriblement inflationniste.

J'ajouterai à ces observations de bon sens que le terme même de « soins gratuits » est abusif. Les soins ne sont pas gratuits, ils sont pris en charge par les cotisants, qui ne sont pas forcément les mêmes que les bénéficiaires. Les principaux bénéficiaires, d'ailleurs, ne cotisent pas puisqu'ils jouissent des régimes dérogatoires de la CMU ou de l'AME. On en connaît les effets pervers : déresponsabilisation des patients, et ses conséquences. Surconsommation et trafic de médicaments, avec un panier de soins près de deux fois plus cher pour les bénéficiaires de la seule AME par rapport aux autres, bénéficiaires de la CMU compris.
Dans le même temps, les personnes qui gagnent trop pour bénéficier de la CMU mais pas assez pour payer la couverture complémentaire d'une mutuelle sont donc paradoxalement moins bien couvertes que les bénéficiaires de la CMU complémentaire et de l'AME. Telle injustice n'aurait pas été possible si la santé était restée ce qu'elle doit être : une affaire privée. Les 71 % d'opposants à la privatisation doivent aussi savoir cela.
Roman Bernard
Quitter la Sécu ?
Criticus est membre du Réseau LHC.
*NB : j'ajoute, à l'intention des sophistes de passage, que si la Sécurité sociale dépend de l'Assurance maladie et non de l'État stricto sensu, il n'est pas abusif de parler ici de l'État au sens large, puisque la Sécurité sociale est monopolistique, publique, et surtout obligatoire. En un mot, donc, étatique.


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