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Déontologie

Publié le 25 février 2009 par Malesherbes
L’article 87 de la loi du 29 janvier 1993 «interdit» à un fonctionnaire d’aller travailler dans toute société privée lorsque l’intéressé a eu dans ses fonctions la charge d’en «assurer la surveillance», ou «de conclure des contrats de toute nature ou de formuler un avis sur de tels contrats», ou «de proposer directement à l’autorité compétente des décisions relatives à des opérations réalisées par cette entreprise ou de formuler un avis sur de telles décisions».
Le mariage Caisse d’Epargne – Banque populaire est-il une opération réalisée par la nouvelle banque qui en résulte ? Je pressens l’argutie juridique que l’on risque de soulever : l’opération a été réalisée par ses deux génitrices et non par leur société fille. Mais il se trouve que, dans le cas des entreprises, les successeurs ou acheteurs héritent intégralement des contrats de leurs devanciers. Ainsi, je n’ai jamais signé de contrat avec GDF – Suez et je lui suis pourtant lié du fait d’un contrat signé antérieurement avec GDF. De la même manière, j’ai signé il y a quelques années pour ma télévision par câble avec la Lyonnaise des eaux et me suis trouvé, sans avoir à lever le petit doigt, lié successivement avec Noos puis avec Numéricable. Il est donc incontestable que M. François Pérol, secrétaire général adjoint de l’Elysée, ayant négocié directement négocié les conditions de la participation financière de l’Etat au mariage Caisse d’épargne – Banque populaire, est dans l’impossibilité, non seulement de diriger, mais même d’occuper quelque emploi que ce soit dans cette nouvelle banque.
Avec son aisance de bateleur, notre Président s’est exprimé sur ce sujet à Rome. Jusqu’ici, il était de tradition pour les hommes politiques français de ne pas s’exprimer à l’étranger sur des sujets de politique intérieure. Mais l’homme de la rupture n’en a cure et, surtout, s’il respectait ce principe, il aurait beaucoup moins d’occasions de s’exprimer, lui qui préfère l’Irak à la Guadeloupe. Ecoutons le donc : «La commission de déontologie a donné son point de vue, et son point de vue a été communiqué aux deux banques. Il sera rendu public et vous verrez qu’une fois de plus, c’est la différence entre une polémique et un problème, de problème il n’y en a pas». Il semblerait une fois de plus qu’il ait menti effrontément. D’après un membre de cette commission interrogé par em>Libération, la commission ne s’est pas saisie du cas Pérol et ne s’est pas réunie.
Un peu gêné, un porte-parole de l’Elysée a expliqué que «la Commission ne s’est pas encore réunie, mais elle a émis un avis "off", positif, qu’elle a communiqué aux banques. C’est ce qui se passe dans les cas d’urgence». En fait, la même personne, siégeant depuis des années dans cette Commission, n’a jamais connu de réunion d’urgence. M. Chatel a exhibé une lettre du Président de cette commission, M. Olivier Fouquet, dans laquelle celui-ci indique que, à titre personnel, il ne voyait aucun inconvénient pénal à la nomination de M.Pérol. Il conviendrait d’enseigner à cette personnalité indépendante qu’en démocratie, un Président préside, qu’il n’a pas, avant que la commission se soit prononcée, à faire état de son sentiment personnel, et encore moins à des tiers. Dans certaines instances, en cas d’égalité lors d’un vote, le Président dispose d’une voix prépondérante mais, à ma connaissance, c’est là la limite de ses privilèges.
Nicolas Sarkozy ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Il a poursuivi ainsi : «La politique de nomination du gouvernement est toujours fondée sur les mêmes critères: la compétence, la compétence et encore la compétence. J’observe que lorsqu’il s’agit de nommer quelqu’un de compétent qui vient de la gauche, ça vous intéresse moins». C’est sans doute parce qu’il a conservé la direction de l’UMP, où il a supprimé le poste de Président, qu’il n’a pas encore réalisé qu’il n’était plus le chef d’un parti mais le Président de tous les Français. On peut supposer que, s’il attire des hommes de gauche auprès de lui, c’est pour surmonter cette division de la France en deux blocs et faire en sorte que tous, quel que soit leur parti, travaillent pour son succès. Il est donc totalement incohérent de souligner régulièrement cette fracture. Mais, en fait, son souci n’est pas de fédérer les Français, mais plutôt de vider la gauche d’une partie de sa substance.

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