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Comment Sarkozy ne dit rien sur la formation

Publié le 04 mars 2009 par Juan
Comment Sarkozy ne dit rien sur la formationAu sortir de la "réunion sociale" du 18 février dernier entre le chef de l'Etat et les partenaires sociaux, on apprenait que Nicolas Sarkozy avait retenu l'idée d'un fonds d'investissement social, doté de 3 milliards d'euros environ, pour financer des actions de formation professionnelle. Le système français (27 milliards d'euros de dépenses, dont 11 milliards provenant des entreprises) prévoit déjà une grande variété de dispositifs, dont le Congé individuel à la formation, le bilan de compétences, la "validation des acquis", et le droit individuel à la formation. Mardi 3 mars, le chef de l'Etat a voulu annoncé sa réforme de la formation professionnelle. A l'écouter son discours, on retient qu'il resté vindicatif contre "l'égalitarisme", mais flou sur les promesses (*).
Sarkozy contre l'égalitarisme
Ce jour-là, Nicolas s'est donc déplacé dans la Drôme, accompagné de Laurent Wauquiez, le secrétaire d'Etat à l'Emploi, et d'Eric Besson, le ministre de l'identité nationale (bizarre ?) : "Je vous remercie de m'accueillir ici, dans votre beau département de la Drôme. Il me semble cela fait bien longtemps qu'un Président de la République n'y était pas venu, et on se demande bien pourquoi ?

Si j'ai voulu vous rencontrer aujourd'hui, c'est pour vous présenter la réforme de la formation professionnelle, que nous sommes en train de mener à bien avec Christine LAGARDE et Laurent WAUQUIEZ, grâce à l'accord important que les partenaires sociaux ont conclu le 7 janvier dernier. Cette réforme, je m'y étais engagé pendant la campagne présidentielle. "
Nicolas Sarkozy annonce rapidement la couleur. Il est venu présenter la réforme de la formation professionnelle. C'est dit, c'est clair. Ecoutons.
Comme à son habitude, le voici qui rappelle d'abord les enjeux ("Pourquoi accorder tant d'importance à la formation professionnelle? "). Mais il oublie son discours, et s'attarde sur le concept de promotion sociale.  Il glisse ses concepts habituels, ces "tics néo-libéraux" qu'il ne peut s'empêcher de caser à chacun de ses discours: "on parle toujours d'une politique sociale, on parle toujours d'égalité sociale, on ne parle jamais de la promotion sociale. Je ne le dis pas parce que moi je suis devenu président de la république. C'est pas évident..." Il fixe quelqu'un de l'assistance, sourire moqueur aux lèvres... "Franchement.... Je pense que le but pour chacun c'est d'assurer la promotion de sa famille. Le social, c'est pas le nivellement, c'est pas l'égalitarisme, c'est pas le misérabilisme." 
Reprenant le fil de son discours écrit, il enchaîne en dénonçant les lacunes du système actuel. Mais cette fois-ci, il s'agissait d'en critiquer ses inégalités et les injustices : insuffisance des formations professionnelles pour les moins qualifiés, les petites entreprises, les salariés les plus âgés, les chômeurs.
"Moins vous êtes qualifiés, moins vous bénéficiez de la formation professionnelle". "Plus votre entreprise est petite, moins vous bénéficiez de formation" (...) "un salarié dans une entreprise de moins de dix salariés a cinq fois moins de chances de se former qu'un salarié d'une entreprise de plus de 500 salariés" (...) "si vous êtes chômeur, vous avez moins d'accès à la formation que si vous avez du travail". (...) "Quand vous avez dépassé 45 ans, vous avez encore moins la possibilité de vous former" (source)
Nicolas Sarkozy fait ensuite une curieuse accusation : "les petites entreprises payent pour former les salariés des grandes. Ainsi, près de 30% des entreprises, principalement des TPE, ne font que financer la formation sans envoyer leurs salariés en formation. " Rappelons que ces entreprises "qui financent sans former" pourraient tout aussi bien former.
Une réforme encore très floue
A la moitié de son discours, le président démarrait enfin la liste des 5 objectifs de sa réforme, avec trois poncifs du genre"mieux orienter les fonds de la formation professionnelle vers ceux qui en ont le plus besoin", ou "insérer les jeunes sur le marché du travail en nous appuyant sur ce qui marche", ou encore "améliorer la transparence et les circuits de financements et mieux évaluer les politiques de formation professionnelle", et deux axes d'amélioration comme  "développer la formation dans les petites et les moyennes entreprises" ou "simplifier, mieux informer, mieux orienter et accompagner les salariés et les demandeurs d’emploi".
On s'impatiente. Nicolas Sarkozy n'avait-il pas promis de "présenter sa réforme" ? Où sont les annonces ? Les voici. Elles sont maigres. Une loi sera votée en avril.
Comment Sarkozy ne dit rien sur la formation1. La création d'un fonds d'investissement social. Il n'est visiblement pas mûr. Il reprend pourtant une idée de la CFDT, Nicolas Sarkozy s'est contenté de demander au gouvernement de préparer "un projet de charte constitutive" du futur fonds. Son objectif, "former les demandeurs d'emploi, les salariés
peu qualifiés, notamment ceux des plus petites entreprises
". Seul point acquis, "les priorités d’intervention du fonds seront fixées de manière contractuelle entre l’Etat et les partenaires sociaux et relayées au plan régional." Et voici que Sarkozy s'agite: "Ecoutez, il faut quand même mettre un minimum d'ordre dans tout ça." Qui a parlé de désordre ? "Il y a des bassins de formation mais il faut qu'il y ait une stratégie de formation dans le cadre de l'économie mondiale." Vous avez compris ?
2. "Rendre les circuits de financement plus efficients" en demandant aux organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) de développer leur "surface financière" et de s'organiser "par grands secteurs d'activité". En d'autres termes, le président semble préparer les esprits à un regroupement et une réorganisation des OPCA. Ils subiront aussi un contrôle financier tous les 3 ans. Réduction de personnel en perspective ?
3. "La simplification et l'amélioration des outils de la formation" visera, selon le président, à étendre ou faciliter certains dispositifs existants. Sarkozy propose ainsi d'inclure les cours du soir dans le congé individuel de formatio. Cours du soir = congé ? Cette proposition est un vrai recul. Le congé de formation est par définition, un congé de l'entreprise pour se former. Inclure le financement des cours du soir, qui, par définition, échappent au temps de travail dans l'entreprise, dans celui du CIF est simplement ... une arnaque. Une autre idée, plus favorable, est de prolonger le Droit Individuel à la Formation deux ans après un licenciement. Une mesure qui ne doit rien au président puisqu'elle a été négociée par les partenaires sociaux en janvier dernier. En effet, l'accord conclu par les partenaires sociaux en janvier prévoit d'augmenter chaque année de 700.000 le nombre de salariés peu qualifiés et demandeurs d'emploi bénéficiant d'une formation.
4. La dernière annonce est anecdotique, dans la bouche d'un président de la République: pour garantir "un droit à l'information et à l'orientation", l'Etat mettrait en place d'un "centre d'appel téléphonique et un portail internet dédiés pour expliquer les dispositifs, recenser l'offre de formation et orienter vers les interlocuteurs adéquats". Un chef d'Etat annonçant la création d'un numéro vert ? Faut-il qu'il ait besoin de se substituer à ce point à ses secrétaires d'Etat ?
Finalement, que retient-on ? Un fonds dont il faut préciser les contours et le fonctionnement, un numéro vert et un site Web pour mieux informer, un toilettage qui sent l'arnaque sur les dispositifs existantes et une restructuration des organismes de collecte...
Satisfait ?
(*) les citations qui suivent sont issues tant du texte du discours que de l'intervention (plus vivante) diffusée sur le site de l'Elysée.&alt;=rss

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