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Le tonneau des Danaïdes...

Publié le 04 mars 2009 par Raphael57

Le tonneau des Danaïdes...
Il y a quelques jours, je voyais à la télévision une publicité concernant AIG et qui vantait sa solidité financière... Il faut dire que je ne suis pas chanceux : je ne regarde que très peu la télévision, et au moment où je la regarde il me faut tomber sur un spot qui m'énerve m'interpelle. En effet, l'assureur américain AIG devrait annoncer aujourd'hui la plus forte perte trimestrielle de toute l'histoire des Etats-Unis : 60 milliards de dollars au dernier trimestre ! Alors question solidité financière, il y a de quoi rester dubitatif...
Sa solidité financière est d'ailleurs tellement indubitable que pour la troisième fois en six mois, le gouvernement américain va voler à son secours alors qu'il détient 80 % du capital et a déjà injecté près de 150 milliards de dollars de fonds ! Dans le détail, un accord serait intervenu hier entre AIG et les autorités fédérales en vue d'accorder à l'assureur 30 milliards de dollars supplémentaires lui permettant d'émettre des actions préférentielles. En contrepartie, AIG devrait se scinder en trois entités dans lesquelles la FED détiendra une participation largement majoritaire. Il faut dire que l’assureur ne sait plus comment trouver des liquidités : pour rembourser notamment sa dette contractée auprès de l’état américain qui s’élève à 60 milliards de dollars (une révision à la baisse des intérêts versés sur cette ligne de crédit a d'ailleurs été validée par l'Etat américain), AIG n'avait d'autres choix que de se désengager de certaines activités. Pour l'anecdote, le groupe a même mis fin à son sponsoring maillot avec le club de football de Manchester United...

Pourquoi AIG perd-elle autant d'argent ?

AIG s'est laissée tenter par les instruments à risques et a massivement investi sur le marché des CDS (« credit default swaps »), qui sont en quelque sorte des polices d'assurance complexes contre le défaut de paiement d'un émetteur d'obligations Notons que les autres assureurs n'ont que très peu touché à ces instruments en comparaion d'AIG qui est exposée à hauteur de 441 milliards de dollars ! Aujourd'hui, le groupe cherche à déboucler ses positions mais le marché ne s'y prête plus. Mais parallèlement, la recrudescence des défauts de paiement oblige AIG a augmenté ses provisions et à un certain moment ses pertes... Ainsi, même si le gouvernement fédéral a déjà englouti 150 milliards de dollars dans l'assureur, nombre d'économistes estiment encore à 100 milliards de dollars la facture nécessaire pour stabiliser sa situation.

Pourquoi l'Etat vient-il une nouvelle fois en aide à AIG ?

Nous sommes dans une logique appellée « Too big to fail », c'est-à-dire "Trop gros pour disparaître". En effet, il est admis que si AIG faisait faillite, ses liens très importants avec les sociétés financières du monde entier conduiraient à un effet domino, c'est-à-dire des faillites en cascade. C'est ce que l'on appelle un risque systémique. C'est également pour cette raison que les avocats du groupe n'ont pas pu obtenir son placement sous le régime du Chapitre 11 des faillites aux Etats-Unis. Précisons également que la nouvelle aide fédérale devrait lui permettre d'éviter la menace d'une dégradation de ses notes par les agences financières qui rendrait encore plus difficile son refinancement sur les marchés.
Si on résume, on (=les états=nous) injecte donc des fonds pour sauver le système capitaliste qui s'est jeté lui-même dans le précipice. Ensuite, on espère que ces injections de fonds suffiront pour que le risque ne devienne pas sytémique, c'est-à-dire qu'il ne se transmette pas à toutes les sociétés financières. En outre, on nous parle de moralisation du capitalisme financier alors qu'en septembre dernier, soit six jours après avoir été sauvés de la faillite par une injection de 85 milliards de dollars frais, une poignée de dirigeants d'AIG ont fêté ça dans un hôtel de luxe pour la modique somme de 440 000 dollars (dans le détail, 200 000 dollars pour les chambres, 150 000 dollars pour les repas et 23 000 dollars de bains à remous, soins du corps et autres prestations).
Cerise pourrie sur le gateau : j'apprends à l'instant qu'AIG, après tout ce qu'elle a obtenu comme fonds publics, engage une poursuite contre l'Etat fédéral pour 306 millions de dollars de taxes « injustement et illégalement » perçues sur diverses transactions en 1997 !

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