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Liberté d’expression à l’Université et exclusions temporaires d’étudiants (CEDH 3 mars 2009, Temel et autres c. Turquie) par N. HERVIEU

Publié le 09 mars 2009 par Combatsdh

Dix-huit étudiants de l’Université de Afyon (Turquie) ont été sanctionnés par une décision d’exclusion temporaire pour avoir demandé, au moyen d’une pétition, la création d’un cours optionnel de langue kurde. La Cour européenne des droits de l’homme a fait droit à la requête de ces étudiants en condamnant la Turquie sur le terrain du droit à l’instruction (Art. 2 du protocole n° 1 CEDH), interprété “à la lumière” (§ 28) du droit à la liberté d’expression (Art. 10).

Temel et autres c. Turquie (Cour EDH, 2e section, 36458/02 ) du 3 mars 2009 - En anglais

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Actualité Droits-libertés du 3 mars 2009 par Nicolas Hervieu

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De façon inédite, la Cour estime qu’une exclusion seulement temporaire d’un établissement d’enseignement supérieur est constitutive d’une restriction de ce droit (§ 40 - voir sur ce point la critique du juge Cabral Barreto dans son opinion séparée). Elle transpose ensuite son test classique de conventionalité d’une ingérence - pourtant absent de l’article 2 du protocole n° 1 - en recherchant si la restriction poursuivait un but légitime (§ 42). Bien qu’elle ait de “sérieux doutes” (« serious doubts » - § 42) sur la poursuite d’un tel but ici, la juridiction strasbourgeoise concentre néanmoins son examen sur la proportionnalité de la restriction. A cet égard, elle confirme que si le droit à l’instruction ne fait pas obstacle, par principe, à des sanctions disciplinaires, de telles mesures ne doivent pas porter atteinte à sa substance même ni à d’autres droits conventionnels (« such regulations must not injure the substance of the right nor conflict with other rights enshrined in the Convention or its Protocols »- § 45). Or, ici, les juges européens relèvent que les étudiants ont agi sans causer de violences ou de désordres (§ 43) et que les opinions exprimées dans leur pétition n’incitaient pas à la division (§ 44).

Les actes sanctionnés ne constituaient que l’exercice de leur droit à la liberté d’expression, droit conventionnellement protégé dont la Cour rappelle l’importance (§ 44 - « the applicants were suspended from the university for either one or two terms as a result of the exercise of their freedom of expression »). Dès lors, la Cour conclut que les sanctions étaient disproportionnées et condamne la Turquie pour violation du droit à l’instruction (§ 46).

Temel et autres c. Turquie (Cour EDH, 2e section, 36458/02 ) du 3 mars 2009 - En anglais

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