Encyclopédie méthodique ou par ordre de matiéres ...
De Jacques-Philibert Rousselot de Surgy
Publié 1784
Les f on été remplacé par des s.
Les autres termes ont été conservés
COMORES , ISLES COMORES.
Ces iles , situées dans le canal de Mozambique, entre la côte de Zanguebar(1) & de
Madagascar , sont au nombre de quatre.Comeré qui en est la principale ,
et qui a donné son nom à ce petit archipel , est peu connue. Les portugais , qui , dans leurs premières expéditions , la découvrirent , y firent tellement détester , par leurs cruautés , le nom
des européens, que tous ceux qui ont osé s'y montrer depuis ont été massacrés ou fort mal reçus : aussi l’а-t-on entièrement perdue de vue.
Celles de Mayotte et deMoëli ne font pas plus fréquentées , parce que les approches en sont difficiles , et que le mouillage n'y est pas sur. Les anglois ne relâchent qu'à l'ile d'Anjouan.
C'est - là que la nature , dans une étendue de trente lieues de contour , étale toute sa richessee avec toute sa simplicite.
Des coteaux toujours verts , des vallées toujours riantes y forment partout des paysages
variés et délicieux. Trente mille habitants, distribuésen foixante & treize villages, en partagent les productions. Leur langage est l'arabe ; leur religion un mahomérisme fort corrompu.
On leur trouve des principes de morale , plus épurés qu'ils ne le font communément dans cette partie du globe.
L'habitude qu'ils ont contractée de vivre
de lait & de végétaux , leur a donné une aversion insurmontable pour le travail.
De cette paresse est né un certain air de grandeur , qui conduit, pour les gens distingues , à laisser croître excessivement leurs ongles. Pour se faire une beauté de cette négligence , ils les
teignent d'un rouge tirant sur le jaune , que leur
fournit un arbrisseau.
Ce peuple né pour l'indolence, a perdu la liberté qu'il était fans doute venu chercher d'un continent voisin , dont il était originaire.
Un négociant arabe , il n'y a pas un siécle , ayant tué au Mozambique un gentilhomme portugais , se jetta dans un bateau que le hafard conduisit à Anjouan. Cet étranger se servit si bien de la supériorité de ses lumières , & du recours de quelques-uns de ses compatriotes , qu'il s'empara d'une autorité abfolue que son petit-fils exerce encore aujourd'hui.
Cette révolution dans le gouvernement ne diminua rien de la liberté & de la sureté que trouvaient les anglois qui abordaient dans l'ile.
Ils continuaient à mettre paisiblement leurs malades à terre , où la salubrité de l'air , l'excellence des fruits , des vivres & de l'eau les rétablissaient bientôt.
Seulement on fut réduit à payer plus cher les provisions dont on avait befoin, et voici pourquoi.
Les arabes ont pris la route d'une ile où régnait un arabe. Ils y ont porté le
goût des manufactures des Indes; et comme des cauris (2), des noix de coco , & les autres denrées qu'ils y prenaient en échange , ne suffisaient pas pour payer ce luxe , les insulaires
ont été réduits a exiger de l'argent pour leurs bœufs , leurs chèvres , leurs volailles , qu'ils livraient auparavant pour des grains de verre, & d'autres bagatelles d'un aussî vil prix.
Cette nouveauté n'a pas cependant dégoûté les anglois d'un lieu de relâche , qui n'a d'autre défaut que celui d'être trop éloigné de nos parages.
(2) Le cauris est un coquillage originaire des îles Maldives. Introduit en Afrique bien avant la pénétration coloniale, ce coquillage servait de monnaie dans les transactions commerciales, en remplacement du troc. Après la découverte de la monnaie métallique, le cauris a alors été utilisé pour diverses autres fonctions : parures, décorations et objets de divination
Vestiges industriels de Mayotte, Juin 2008