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Un argent de plus en plus vital, par Sociovision

Publié le 11 mars 2009 par Jérémy Dumont

Depuis quelques années, nous voyons progresser régulièrement une attitude qui paraît très révélatrice de l’évolution des relations à l’argent dans notre société.
En 2008, près de 6 millions de Français de plus qu’en 2000 nous disent : "Pour moi, l’épanouissement personnel passe forcément par le fait de gagner beaucoup d’argent". Cette affirmation très matérialiste touche aujourd’hui plus d’une personne sur trois!


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Fait intéressant, le niveau de revenus du foyer n’est absolument pas discriminant de cette attitude : de moins de 1500 euros à plus de 3800 euros, aucune différence significative n’apparaît dans l’adhésion à cette idée.
Elle est en revanche fortement discriminée quand on prend en compte les sensibilités, valeurs et modes de vie des gens.

Un "besoin d’argent vital", expression de nouveaux rapports à l’argent

Les corrélations statistiques de ce que l’on pourrait qualifier de "voracité monétaire" montrent qu’elle est l’une des formes d’expression de la vitalité individuelle actuelle ; elles témoignent d’un nouveau rapport à l’argent qui semble progressivement en train de s’installer dans notre société.
Le matérialisme exprimé nettement ici (confirmé par l’analyse de ses corrélations) s’accompagne en effet d’expressions affirmées d’une vitalité très tonique et émotionnelle, on pourrait presque dire "sans états d’âme". Par exemple, "ce qui compte dans la vie c’est de s’éclater" ou encore "ce que je cherche avant tout c'est une vie riche, animée, pleine de plaisirs et de distractions".

L’argent dont le besoin est si fortement exprimé est avant tout un moyen d’agir, d’avancer, pour des gens dont les sensibilités sont nettement plus "achieveuses" que la moyenne : ("j'aime relever des défis, des challenges" ou encore "je suis prêt à tout pour atteindre les objectifs que je me suis fixés").
Ceci nous semble révélateur du fait que nous sommes progressivement en train de passer d’une société où dominait une vision idéologique et-ou "morale" de l’argent, à une société où l’évaluation de l’argent et le jugement que l’on porte sur lui est beaucoup plus pragmatique et moins conditionné par notre héritage culturel (une culture dite "latine", fortement marquée par le poids de la religion catholique). On en veut d’ailleurs pour preuve aujourd’hui que c’est le milieu de vie le plus idéologique (nous parlons ici des "Intellectuels") qui garde le plus de traces de l’idée selon laquelle l’argent est un peu "sale", ou en tout cas peu glorieux.
Parmi les neuf "Sinus-Milieus®" que nous identifions en France, les "Intellectuels" sont les moins nombreux (et de beaucoup) à partager l’idée, pourtant majoritaire dans tous les autres y compris les milieux les plus "populaires", selon laquelle "une personne qui gagne de l'argent contribue au progrès économique de l'ensemble de la société".

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Ce matérialisme affirmé n’est cependant pas incompatible avec la reconnaissance de l’importance de l’immatériel. Ainsi, comme pour l’ensemble des Français, ce n’est pas de l’argent ou une maison mais de la débrouillardise que les gens disent qu’ils lègueraient en priorité à leurs enfants. Et ils sont plus de 8 sur 10 à penser qu’aujourd’hui "dans notre société, on accorde trop de place à l’économique et pas assez à l’être humain".
Il faut signaler enfin que deux des idées les plus fortement corrélées à cette voracité monétaire touchent environ 7 Français sur 10, comme une sorte d’évidence. "C’est très important de gagner beaucoup d’argent pour faire plaisir à ceux qu’on aime" (66%) et "C’est très important de gagner beaucoup d’argent pour pouvoir être libre de faire ce dont on a envie" (71%). Le revenu n’apparaît pas, là non plus, comme un facteur discriminant.

Un besoin caractéristique de notre "société de consommation"

Ce qui apparaît en revanche plus déterminant de cette "voracité" monétaire est le rapport à la consommation de ceux qu’elle caractérise : tous nos indicateurs montrent qu’ils "baignent" dans la société de consommation et qu’elle soit payante, gratuite, low cost ou de type "para-consommation", la consommation fait partie de leur quotidien aussi naturellement que l’air qu’ils respirent.
De là à dire que la société de consommation dans laquelle nous vivons tous transforme progressivement nos rapports à l’argent… il n’y a qu’un pas que nous pouvons franchir sans prendre trop de risques. Qu’on le regrette, qu’on s’en réjouisse ou que cela laisse indifférent, il est certain que la "démocratisation" de la consommation, les liens étroits qu’elle entretient aujourd’hui avec les populations les plus "modernes" ont changé la façon de considérer l’argent. Finalement, il est en même temps :
- moins valorisé en soi (d’ailleurs on n’en a pas forcément besoin pour consommer, cf. le développement du gratuit et du low cost), mais a de plus en plus de valeur pour ce qu’il permet d’accomplir et parce qu’il aide à se réaliser.
- sans conteste moins tabou que par le passé.

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Source : L'Observation de Sociovision no 67
Auteur : Sociovision
Crédits : Sociovision
Publié par : Nicolas Marronnier
Publié sur : le vide poche / expression


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