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La déflation et les politiques monétaires.

Publié le 11 mars 2009 par Loïc Abadie

Rappel : charte du blog

La déflation d'actifs générale qui nous a concernés en 2008 commence comme je l'attendais à s'étendre aux prix à la consommation (taux d'inflation négatif sur un an) dans plusieurs pays importants. Bien entendu, les économistes qui ont anticipé le contraire et n'avaient pas vu arriver la crise nous garantissent qu'il ne s'agit pas d'un phénomène sérieux, et que la tendance va s'inverser grâce une supposée "reprise" générée par des plans de relance qui ont tous échoué jusqu'ici et qui se mettraient soudainement à fonctionner.

L'Irlande , en déflation pour la première fois depuis plus de 45 ans.

La Chine, en déflation pour la première fois depuis 2002, avec une chute des prix à la consommation de 1,6% sur un an. 

Le Japon : ce pays s'apprête à retourner dans la zone de la déflation qu'il avait temporairement quitté.

L'inflation y est pour le moment de 0%

Les USA :   Le taux d'inflation y est pour le moment de 0% également. Ce pays est donc sur le point d'entrer dans la zone déflation.La Grande-Bretagne : Malgré la forte dévaluation de la livre face aux autres monnaies (rappelons que nous sommes dans un régime de changes flottants, et que c'est le marché et non les états qui décident de la valeur des monnaies), qui aurait du avoir un effet inflationniste, le taux d'inflation y a chuté rapidement, et n'était plus que de 0,1% sur un an en janvier. Cela montre bien la force de la tendance en cours, largement capable de contrer les effets d'une dévaluation importante. 

Ces observations sont l'occasion de parler de l'effet des politiques monétaires sur l'inflation : 

Les USA ont fait "tout ce qu'il fallait" en 2008 pour relancer l'inflation : baisse des taux massive supposée "relancer le crédit", déficit et forte hausse de la dette publique, politique de quantitative easing à partir de septembre 2008, avec un gonflement du bilan de la FED qui s'est mise à prendre en pension toutes sortes d'actifs plus ou moins douteux pour fournir en échange une masse de liquidités aux banques. Malgré cela, comme au Japon, ces mesures n'ont eu aucun effet sur la progression de la crise et sur le taux d'inflation.

Nos dirigeants, conseillés par des économistes keynésiens convaincus de la validité de leurs modèles monétaires imaginent sans doute que l'économie réagira sagement et conformément à leurs "multiplicateurs keynésiens" et autres équations plus ou moins compliquées, qui ont prouvé leur échec jusqu'ici.

Ils pensent que l'inflation est proportionnelle au rythme de création monétaire, et qu'elle peut se piloter à volonté, comme dans le schéma ci-dessous (avec éventuellement un petit temps de retard déflationniste comme sur la courbe verte) :

La déflation et les politiques monétaires.

Ils oublient un point essentiel : Nous sommes dans une situation de crise exceptionnelle, face à la plus grande bulle de crédit de l'histoire, et face à un retournement de psychologie des foule lui aussi exceptionnel : Une masse d'opérateurs qui avait baigné dans une douce euphorie depuis plus de 20 ans est en train de revenir à la réalité. Et quand on a tiré l'élastique vers un extrême (optimiste), il revient avec force vers l'autre extrême (pessimiste).

Cette psychologie des foules ne se met pas en équations, elle n'est pas linéaire mais "avalancheuse", avec des effets de seuil brutaux et impossibles à prévoir et à piloter.

Plus clairement, dans le contexte actuel, au lieu du gentil modèle linéaire de nos économistes keynésiens, le vrai "modèle de réaction monétaire" a toutes les chances de ressembler à ceci :

La déflation et les politiques monétaires.

Avec trois cas de figure :

1) Absence totale d'intervention de l'état : vu la masse d'actifs douteux présents dans les banques, un bank run généralisé a de fortes chances de se produire (perte totale de confiance dans le système bancaire, tout le monde se précipite aux guichets des banques en craignant leur faillite).

2) Intervention limitée de l'état (liquidation ordonnée de la bulle de crédit) :

- Jusqu'à un certain niveau (comme pour les USA jusqu'ici et comme pour le Japon), le "malade" refuse de répondre aux "stimulations" : la déflation se maintient malgré la création monétaire, les opérateurs préférant attendre avoir du cash plutôt que des actifs qui baissent. Cela est vrai tant que la peur de détenir du cash est inférieure à la peur de détenir d'autres actifs.

3) Intervention excessive de l'état (poursuite de la fuite en avant keynésienne dans le crédit)

- Au dela d'une certain niveau de fuite en avant et de création monétaire (c'est à dire de déficits publics et d'impression de fausse monnaie), la peur de détenir du cash finira par devenir supérieure à la peur de détenir d'autres actifs...Seul problème : La peur n'est pas un sentiment qui se pilote ou se met en équations. En situation de crise elle évolue en panique.

On obtient alors un effet d'avalanche, où tous les opérateurs chercheront à changer leur cash pour d'autres actifs (et des monnaies jugées plus sûres d'autres pays). Et on passerait alors très rapidement du mode "déflation" au mode "Zimbabwe" qui aurait des conséquences bien pires encore.

Bien entendu, et quoi qu'en disent nos divers économistes keynésiens (nobelisés ou non) qui conseillent actuellement presque tous les décideurs politiques, personne n'a la moindre idée de l'endroit où se situe cette limite. L'expérience du Japon nous montre simplement qu'elle est sans doute encore assez éloignée...Espérons que les dirigeants se montreront suffisamment raisonnables pour ne pas la franchir !


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