La vie est pleine de contradictions. En la matière, on est bien inspiré de comprendre une fois pour toutes qu'il faut faire avec. Mieux, chaque contradiction nous donne une occasion de dépasser la fausse évidence et d'inventer un troisième terme à l'alternative. Et je ne peux mieux dire que cette phrase du maître zen Taisen Deshimaru, que j'ai mise en exergue de la Zen Attitude : "Si nous ne pouvons embrasser les contradictions notre personnalité se rétrécit".
Court terme ou long terme. Voilà une contradiction courante, une ligne de force qui structure nos choix.
Par exemple, il y a ce que j'appelle la logique du hold-up. C'est : Prends l'oseille et tire-toi. Tenter le coup, une fois. Ca passe ou ça casse. Pourquoi pas ? Ca peut marcher dans une négociation commerciale, par exemple. On essaie un coup de Trafalgar pour enfumer l'adversaire et on en profite pour verrouiller le deal. Ou bien on le prend de vitesse, on le met devant le fait accompli, et il est trop tard pour qu'il puisse réagir. Le hold-up a un inconvénient, en général cela ne fonctionne qu'une fois. C'est comme le bluff au poker. Après, les autres savent à quoi s'en tenir avec vous. Pas idéal pour nouer des relations durables ou entretenir sa crédibilité.
Mais certaines personnes ne savent pas faire autrement. Elles pensent toujours que c'est tout ou rien. Que les situations n'ont que deux portes de sortie. Soit elles perdent, soit elles gagnent. D'une certaine façon, elles ne veulent pas voir plus loin que l'événement immédiat, et elles misent tout sur un seul numéro.
Alors bien sûr, il faut savoir faire preuve d'opportunisme, au bon sens du terme. C'est-à-dire saisir les occasions qui se présentent. Agir avec décision et rapidité : l'histoire ne repasse jamais les plats. Mais il importe aussi d'avoir une volonté sur le long terme. De savoir en gros, ou en détails, ce que l'on vise, et d'affiner ce but au fil du chemin.
Rien ne remplace une stratégie mûrie, mise en œuvre consciemment – et qu'on saura toujours adapter en fonction des circonstances, de nos moyens, quels que soient les difficultés, les obstacles, les oppositions (c'est-à-dire les aspects tactiques). Il n'est de pouvoir que celui qui dure, disent les taoïstes. Sinon ce n'est qu'un feu de paille.
Voir au-delà, des buts plus éloignés, donne la possibilité de relativiser l'enjeu immédiat. Et donc, souvent, de l'aborder avec plus de confort et d'efficacité.