Nous l’avons écouté nous parler des « grandes tribus du Sahara » quand nous recherchions les fondements d’une république .Nous l’avons écouté, dociles nous rappeler qu’on était pas fait pour la démocratie ou que, elle, n’était pas faite pour nous !
Le Roi est venu ; en roi, solennel, fringant.
Nous l’avons reçu en roi ; le « Roi des rois » se promenant dans une des provinces de son vaste royaume. Nous avons courbé l’échine pour ne pas lui faire ombrage. Nous avons déclamé des poèmes louant sa grandeur, sa vision.
Nous avons tendu les bras, nourri l’espoir, chanté le roi. Nous nous sommes prosternés ; nous avons réprimé notre fierté, ravalé nos convictions.
Nous avons tout fait pour lui. Comme il le voulait ; comme doit le vouloir un Roi face à ses sujets venus l’accueillir pour profiter de sa générosité et s’abreuver de sa « science »
Et le Roi nous a fait sa « leçon. »Une leçon de roi, d’un autre âge. De ces leçons desquelles nous avons été nourri pendant longtemps, trop longtemps au gré de « sagesses » douteuses et éphémères.
Ces leçons qui font des « Autres » les sources de vos problèmes, la raison de vos insuffisances.
De ces leçons qui exaltent la différence, revendiquent les spécificités pour justifier, se justifier.
Nous l’avons écouté nous parler des « grandes tribus du Sahara » quand nous recherchions les fondements d’une république .Nous l’avons écouté, dociles nous rappeler qu’on était pas fait pour la démocratie ou que, elle, n’était pas faite pour nous !
Nous l’avons entendu confusément faire l’apologie des coups d’état, dénigrer l’alternance politique, rire de nos velléités démocratiques, s’offusquer de nos choix, se moquer de nos institutions. Nous l’avons écouté, notre Roi, calés dans nos fauteuils, en sueur, fouler au sol les quelques valeurs humanistes, républicaines qui nous restaient.
Nous l’avons écouté, applaudi, ri avec lui, pour lui, de nous, en « bon roi » subjugué par tant de docilité et de réceptivité. Il était incontestablement un Roi… jusqu’à la sortie fracassante mais oh combien digne de ceux qui avaient une autre lecture de la gestion de l’espace politique,une autre leçon : celle de la légalité qui consacre la primauté du droit sur la force,qui affranchit l’Etat des sectarismes primaires,libère les citoyens des atavismes sociaux en instituant l’égalité et la justice comme seul référentiel du vivre –ensemble .Ceux pour qui la seule leçon qui vaille est celle de la démocratie comme exigence universelle des sociétés modernes.
Ibrahima Falilou