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L'HISTOIRE
Emile Cardonnet se rend à Gargilesse un soir d'orage, rejoindre son père et sa mère installés depuis peu dans la région. En chemin il rencontre Jean Jappeloup qui l'emmène au manoir en ruine de son ami, l'ancien noble Antoine de Châteaubrun, que tout le monde s'aime à appeler M. Antoine. Lors du repas improvisé, Emile ne dévoile pas son identité, et celle de Jean est également dissimulée. La conversation tourne autour du père d'Emile qui vient de construire une usine moderne au bord de la Gargilesse. Si Antoine se réjouit de cette modernité, Jean dénonce l'esclavagisme patronal, les méthodes de travail, et la main mise de M. Cardonnet sur les différents pouvoirs de la commune... Emile tente de défendre son père sans révéler son lien de parenté, mais on sent chez lui beaucoup de désillusions filiales. Le lendemain, Emile reprend sa route, non sans avoir aperçu dans l'encadrement d'une fenêtre, le joli visage de Gilberte, fille d'Antoine...
Je ne vous raconerai pas la suite, j'ai juste posé les jalons.
LE ROMAN EN LUI-MEME
Le Péché de Monsieur Antoine est le dernier roman socialiste écrit pas George Sand. Elle commence la rédaction en juillet 1845, le roman paraît en feuilletons d'octobre à novembre 1845. Le thème est donc engagé. George Sand est dans sa grande période socialiste, elle crée plusieurs journeaux, est amie avec Pierre Leroux, philosophe, réfléchit à une solution favorable au bien-être d'un peuple en souffrance. Elle dénonce ou du moins critique le Saint-Simonisme, mais aussi certaines idée de Fourier, donne son opinion sur les Associations... Dans ce roman, s'oppose le capitalisme de M. Cardonnet, et le communisme de Emile et de son ami le marquis de Boisguilbault. C'est une réflexion sur le travail, sur la démocratie...
Mais pas seulement ! Le Péché de Monsieur Antoine c'est aussi le roman du premier amour, de ses obstacles... mais à la façon sandienne. L'héroïne, si elle est jeune, belle et blonde, est aussi une jeune fille qui lit, qui s'interroge aussi sur les préceptes socialistes, en elle rien d'épurée, elle fait le jardin et notamment les boutures, elle court les champs, et évite un viol de justesse !
C'est aussi un beau roman sur le lien père/enfant... sur les oppositions qui naissent quand l'enfant grandit et s'émancipe et commence à regarder le père avec plus de recul... Contester l'autorité paternelle à l'époque de Sand, devient de plus en plus fréquent, ce qui commence à ébranler l'équilibre des familles. George Sand prend souvent le parti de la contestation, les familles légitimes sont souvent les moins bien loties... vous en verrez ici une belle illustration !
MON AVIS
Il ne faut pas vous laisser impressionner par le thème du socialisme, l'histoire nous emporte facilement. Emile est un jeune homme formidable, enthousiaste, amoureux... Gilberte et sa famille deviennent nos propres amis. Antoine est un bonhomme que j'adore et qui est à l'origine du prénom donné à mon fils ! Sand le décrit avec humour, il fait parti de ces pères, un peu maladroits, tendres envers sa fille, et accueillant, bon vivant, avec un petit penchant pour le vin rouge... J'ai lu ce roman 5 ou 6 fois (pour des raisons d'analyse...), et je dois dire qu'à chaque fois j'ai découvert un nouvel aspect, une nouvelle phrase à méditer. En cette période de crise, ce roman est incroyablement actuel.
Pour le lire vous pouvez trouver l'édition De l'Aurore (celle présentée en haut de cette note), une nouvelle édition devrait sortir dans quelques mois aux Editions Champion.
NOTE : 7 / 10