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Martine Aubry : "Nicolas Sarkozy n’a pas souhaité répondre aux Français et s’est exprimé dans un meeting UMP"

Publié le 25 mars 2009 par Letombe
Martine Aubry : Nous venons d’entendre le président de la République à Saint-Quentin, tout le poussait à réagir dans le contexte de crise financière qui n’est pas terminée comme on le voit avec les banques. La crise économique sera encore plus forte et plus durable comme le lui a indiqué l’INSEE il y a quelques jours ( -3 % de croissance cette année). Nous attendions des réponses. Les 300 000 chômeurs supplémentaires que nous attendions pour la fin de l’année nous les aurons avant.

La crise sociale est également là. Elle crée une désespérance pour les Français, qui ont d’énormes difficultés avec le pouvoir d’achat qui stagne et avec les licenciements annoncés jours après jours. Cette crise sociale, les Français l’ont ressentie dans 2 immenses manifestations. Nous pensions donc que ce soir alors qu’il n’avait pas voulu leur répondre le 19 mars, envoyant François Fillon pour dire qu’il n’y avait rien à voir et qu’il fallait circuler, nous pensions qu’il aurait apporté aux Français et à ses partenaires européens, des réponses à la hauteur de la crise.

Nicolas Sarkozy n’a pas souhaité répondre aux Français et s’est exprimé dans un meeting UMP où il est

Martine Aubry :
apparu davantage comme président d’un parti que comme président de la République, fort de ses responsabilités et voulant rassurer le pays. Il a préféré diviser plutôt que rassembler toutes les forces. Les Français, au lieu de réponses, n’ont eu que diversion et obstination, notamment dans une autosatisfaction permanente : nous n’avons commis aucune erreur, alors qu’on nous annonce des licenciements et cette forte récession pour le pays. Nous la gauche et le Parti socialiste nous n’arrêtons pas de lui dire que le bouclier fiscal plombe notre pays et que c’est un véritable boulet qui permet de relancer ni les salaires, ni la consommation. Il nous a dit clairement qu’il faut maintenir le bouclier fiscal et la défiscalisation des heures supplémentaires. On incite les chefs d’entreprise à payer des heures supplémentaires plutôt que d’embaucher, car cela coûtera moins cher ! C’est une première dans le monde. Il n’a y donc aucune mesure de relance et ce qui est le plus frappant, aucune mesure sur les parachutes dorés ou les hautes rémunérations, sujet sur lequel on l’attendait. On a encore un nouvel exemple avec la Société Générale il y a quelques jours et plus récemment avec VALEO, un système qui nous envoie dans le mur. Avec le même appétit, certains continuent à se servir plutôt que de servir leur entreprise. On attendait que sur ce terrain-là que des décisions soient prises.

Nicolas Sarkozy nous a dit avec toute l’indignation dont il sait faire preuve, que ces comportements ne sont pas honnêtes. En réalité ce qui est malhonnête c’est de montrer du doigt tous ces dysfonctionnements, sans rien faire. Cela n’est ni honnête, ni responsable, monsieur le président de la République.

Rappelons le discours permanent du président de la République sur les hyper-rémunérations qui rendent la situation des Français encore plus insupportable, tant l’injustice n’est pas acceptable. En tant que ministre en juin 2006 à Agen, il nous disait «… que la réhabilitation du travail passe par la morale, ceux dont la gestion est un échec et qui négocient une prime d’éviction en forme de parachute en or, il faudra les arrêter ! ». Comme candidat de la République à Toulon, le 7 février 2007, il nous disait « Cela ne peut plus durer, le patron voyou, cela ne peut pas durer et rester impuni, les parachutes en or pour celui qui échoue, les stock-options, réservés à quelques uns ». 

Martine Aubry :

En avril 2007 à Bercy comme président de la République en septembre 2008 aussi : « Je n’hésite pas à dire que les modes de rémunérations des dirigeants et des opérateurs doivent être désormais encadrés, il y a trop d’abus, il y a eu trop de scandales ! » Comme président encore en octobre 2008 « Si les recommandations du Medef sur les rémunérations des dirigeants ne sont pas acceptées par les sociétés depuis la fin 2008, Matignon les reprendra dans un texte de loi. Nous sommes en mars 2009 les exemples se multiplient, l’indignation est toujours là mais l’inaction aussi, inébranlable. Quand on nous dit que l’économie doit retrouver les chemins de la morale, il faut aussi que la politique retrouve ce   chemin-là. Quand on fait de la politique, non seulement on décide, non seulement on fait ce que l‘on a dit, mais on fait en sorte que pour qu’il y ait de l’ordre, il y ait de la justice. Et ce n’est pas ce que fait le président de la République ce soir, malgré tous ces comportements, montrés du doigt.

Je voudrais dire deux choses. Il est urgent d’agir, nous connaissons les prévisions pour la France et les inquiétudes des Français. Mais il faut toujours attendre quand il s’agit de contraindre les stock-options, de supprimer les parachutes dorés, ou d’encadrer les hautes rémunérations, mais on n’attend pas quand il s’agit d’être licencié. Des milliers de Français le savent aujourd’hui. Pour Nicolas Sarkozy, c’est toujours, toujours la même chose, c’est ce qu’il nous a dit ce soir, en continuant avec obstination. Ce sont les bénéfices pour quelques-uns et les sacrifices pour tous les autres. Voilà comment résumer l’intervention du président de la République. Rappelons que le plan de relance du PS est massif et doit aider les Français en matière de consommation et de pouvoir d’achat : relance de l’investissement alors que les PME attendent toujours sur le terrain les conséquences de l’argent donné aux banques. C’est aussi un plan qui accompagne les salariés victimes de licenciements et qui veut éviter les licenciements boursiers que nous voyons comme dans l’entreprise Continental.

Sur tous ces sujets, des mots, de la part de Nicolas Sarkozy mais rien d’autre. Alors je dirai simplement au président de la République que si son indignation est sincère, au moins sur les hautes rémunérations, les stock-options et les parachutes dorés, qu’il fasse voter la proposition de loi que les socialistes ont déposée et qui sera discutée le 30 avril prochain. Voilà ce que je lui demande ce soir. De prendre des mesures pour relancer la croissance et l’investissement et je lui demande puisque la morale et la politique ne doivent faire qu’un, de faire voter cette loi qui mettrait un peu moins d’injustice et de scandale dans la façon dont fonctionne aujourd’hui notre économie. Notre loi sera présentée à l’Assemblée et au Sénat.

Martine Aubry


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