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Franz Bartelt, Un balcon à Nouzon, Thierry Kübler, Mosaïque Film

Publié le 27 mars 2009 par Irigoyen
Franz Bartelt, Un balcon à Nouzon, Thierry Kübler, Mosaïque Film

Vous vous souvenez peut-être que j'ai chroniqué, ici-même, il y a quelques mois, deux romans de Franz Bartelt publiés aux éditions le Dilettante, Les nœuds et La belle maison. Dans ce billet, je disais tout le bien de cet auteur, travailleur acharné, fin observateur de ses semblables ardennais et connu pour manier avec brio la causticité qui dénonce l'absurdité du monde, ce qui lui a d'ailleurs permis de voir un des ses opus, Les bottes rouges, récompensé du grand prix de l'humour noir.

La lecture de plusieurs articles le concernant dans des revues et autres magazines littéraires me laissait penser que l'homme aimait vivre retranché, à l'abri d'une humanité pas toujours des plus folichonnes. De là à en conclure qu'il préférait fuir les interviews et autres sollicitations à dialoguer de la pluie et du beau temps, il n'y avait qu'un pas que je franchissais allègrement.

Franz Bartelt, Un balcon à Nouzon, Thierry Kübler, Mosaïque Film

Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir, à la médiathèque André Malraux de Strasbourg – non, je vous rassure, je n'y passe pas mes nuits – un DVD sur cet auteur. Ainsi donc, Franz Bartelt parle. Oui, il parle à un de ses semblables, Thierry Kübler. Il sourit, nous promène dans sa région, nous fait faire la connaissance de ses copains.

Trouver cette œuvre dans le commerce me semble relever de la gageure. Dommage car les 26 minutes de ce film intitulé Franz Bartelt, un balcon à Nouzon passent vite. Vite dans un décor où tout semble se mouvoir si lentement.

Franz Bartelt nous raconte qu’il a arrêté l’école à 14 ans pour s’installer « non pas comme écrivain mais pour écrire ». Il a ensuite choisi une usine où il pourrait avoir du temps libre pour s’adonner à sa passion. La caméra de Thierry Kübler filme l’auteur dans son processus créatif. On voit la trame de l’histoire se construire lentement rien qu’en regardant la mine réjouie de Franz Bartelt …

Que d’eau dans ce film. L’auteur dit aimer se promener dans la forêt par temps de pluie. Il parle d’une mer verte : celle de la forêt dont la surface ne réfléchit pas le soleil à la différence de celle de la mer : « C’est la mer en pire ».

On serait parfois tenté de croire que Nouzonville est le dernier lieu où s’échouer avant de passer de vie à trépas. Mais c’est sans compter sur la capacité de persuasion de l’auteur qui parle « d’exotisme de la proximité ». J’aime cette idée que l’on peut voir quelque chose de nouveau dans un paysage plus que familier. Mais c’est une force qui n’est pas donnée à tout le monde.

Cette force on la devine aussi chez les amis de Bartelt : Michel, sculpteur, un ami de quarante ans, « un homme sérieux qui n’a pas l’air sérieux, un type qui chante la vie ». Plus tard, c’est Simon qui entrera en scène, « un peintre qui a peut-être le mieux interprété la forêt ». À voir cette charmante compagnie, on se dit qu’ils sont peut-être les derniers hommes libres.

La liberté, justement, parlons-en. Ou plutôt laissons Franz Bartelt en parler : « Il y a deux façons d’être libre quand on est écrivain : être riche ou avoir des livres d’avance ». On apprendra d’ailleurs que l’écrivain a été publié à partir du 33è roman. C’est dire !

Voir se film, c’est céder à cette lenteur qui envoûte, qui relaxe – j’en parlais déjà à propos de Quatre murs et le monde de Marc Weymuller -. Et parce que cette vie va à deux kilomètres/heure le moindre fait devient un roman, « une épopée » comme dit Franz Bartelt. Il faut l’entendre parler de cette femme qui a trébuché par la faute de « chenapans ».

Vous l’aurez compris, j’ai goûté avec délice à cette rencontre-portrait toute simple, qui va au cœur des choses et s’achève en apothéose avec une pensée sur les cons à la famille desquels Franz Bartelt dit appartenir … « Le con est un angoissé, qui se pose des questions. La réponse lui est nécessaire. C’est pour cela que le con est honorable. »

Une vraie leçon de la part d’un homme qui dit ne pas écrire avec son intelligence mais avec ses muscles et ses nerfs.

À méditer.


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