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Un petit coup de pouce !

Publié le 26 mars 2009 par Wilverge

Un petit coup de pouce !

Nad la chauffarde

En route de Ushuaia à Punta Arenas

Ce matin, nous nous levons avec un dilemme. 700 kilomètres nous séparent de Punta Arenas. Il faut traverser toute la Terre de Feu.En bus, cela nous coûtera 140 dollars sinon, il y a toujours l'option pouce qui s'offre à nous. Nous regardons dehors. Il pleut et il fait froid. La réflexion est courte, nous partirons en stop. Pas que j'en ai tellement envie, mais bon, il n'y a pas de petite économie ici!

Un taxi nous dépose à la sortie de la ville près du poste de police. Je ne me sens pas très à l'aise de faire du stop près d'eux mais, mon sentiment change aussitôt quand ils nous indiquent spontanément où nous devons nous installer pour nous faire embarquer!

On s'installe, prêt à attendre patiemment notre bon samaritain. Je sors mon sandwich histoire de prendre des forces. Je me dis que la journée sera longue sur le bord de la route. J'ai tout juste le temps de prendre une bouchée qu'un énorme camion s'arrête et nous siffle pour nous signifier de monter. Wow, ça c'est du rapide.

-Où allez-vous?

-Punta Arenas

-Je ne peux vous emmener qu'à Rio Grande à 230 kilomètres plus loin.

Très bien, nous ne serons pas capricieux et de plus, ce sera toujours bien cela de fait.

Je prends place au centre sur ce qui se trouve à être un lit tandis que Will, s'assoit à l'avant entre hommes. Nous écoutons du death metal espagnol et discutons un peu de tout et de rien en essayant de comprendre toujours un peu plus le jargon argentin. Notre chauffeur, el Indio de son petit nom, est très sympathique et rend la route agréable. Nous arrêtons même prendre un petit café à Tolhuin en sa compagnie et celle de son collègue Marcos tout aussi aimable.

Rendu à Rio Grande, où nous devions le quitter, celui-ci nous avise que nous allons bientôt passer la frontière chilienne. On en déduit que l'on continue avec lui.Nous devrons débarquer à ce moment-là puis rembarquer plus tard, car il n'a pas le droit de voyager avec des pouceux de notre espèce! Il nous tend alors des papiers d'immigration à remplir. Il est vraiment prêt à tout, nous ne sommes certainement pas ses premiers voyageurs.

Nous faisons comme il dit et effectivement, nous nous retrouvons en territoire Chilien en moins de deux. Je crois que finalement, il nous aime bien et qu'il nous fera faire plus de route que prévu. C'est bon pour nous.

Plus la journée avance et plus nous apprenons à connaître notre nouvel ami de fortune. Il est l'heureux propriétaire d'une moufette et d'un gentil bébé castor qu'il a ramassé sur la route près de sa mère écrasée. Il a aussi deux enfants dont il doit réfléchir pour nous donner leur âge et une femme qu'il déteste. Son camion est son repère favori dans lequel il passe la totalité de ses semaines. Il ne rentre que le samedi soir prendre une bière entre amis et voir ses enfants le dimanche.

Pour lui, le Chili est le pire endroit sur Terre et hait ses habitants. Il en profite d'ailleurs pour jeter tous ses déchets par la fenêtre en territoire ennemi et à pester contre eux chaque fois que l'occasion se présente.

Nous roulons ainsi toute la journée en ne sachant toujours pas jusqu'où nous irons avec lui. Nous nous en remettons à notre bonne fortune.

Puis le jour tombe. C'est la pause souper. Le paysage autour n'est que désert, oies et guanacos. Notre hôte prépare le souper sur un poêle au propane dans le camion en prenant tout de même la peine de baisser un peu une fenêtre, mais pas trop! Des nouilles en sachet avec des saucisses à hot-dog. De la grande gastronomie de camionneur!

Marcos nous parle alors de son rêve de posséder son propre camion et nous pose des questions sur les chauffeurs de véhicules lourds du Canada. Nous répondons du mieux que nous pouvons, nos connaissances étant assez pauvres sur ce sujet.

Nous passons un agréable moment en leur compagnie. Leur fraternité semble forte entre travailleurs de la route. Ils ont toujours le sourire et une blague à faire.

Puis le temps passe et nous ne voyons pas l'heure d'arriver. De mon côté, je cogne des clous et tousse beaucoup ayant un rhume depuis quelques jours. Mon état, pourtant pas si terrible, inquiète el Indio qui ne cesse de me demander si j'ai froid ou si je veux du jus de poire pour ma gorge. Il me prépare même une eau chaude avec de la poudre de « Vicks » et me prête son oreiller. Je suis traitée aux petits oignons.

Vers minuit, le camion s'arrête nous réveillant tous les deux. J'ouvre les yeux et surprise, je découvre notre conducteur en bedaine à faire du « air guitar »! Il nous fait ensuite lever nos pieds pour enlever toute la poussière chilienne qui selon lui est la pire d'entre toutes et colle pendant des semaines. Il vaporise ensuite le tableau de bord d'un produit à senteur de pin qui sent plus le désinfectant à toilette que la forêt. Trop bizarre!

Le véhicule prend alors place sur un traversier pour franchir le détroit de Magellan. De l'autre côté, absolument rien. Que des camions stationnés pour la nuit et quelques cabanes abandonnées.

-Bon bien c'est ici que je vous laisse.

-Euh, ok, il n'y a pas d'hôtel dans les environs?

-Non, il n'y en a qu'un seul et il est fermé, mais vous pourrez faire du pouce d'ici demain matin, ce sera plus facile que plus loin.

Chouette! Il est une heure du matin, nous sommes au beau milieu de nulle part, il fait toujours froid, il vente et il se met à pleuvoir. Je crois que toute bonne chose a une fin et que notre bonne fortune nous a lâchés!

Notre tente mouillée sera notre refuge pour cette nuit encore. Quel bonheur! Nous l'installons dans le champ près de la route, cachée du vent froid par un vieil hôtel pourri, et nous endormons complètement crevés.

Au matin, après avoir tout remballé, nous redressons notre pouce pour compléter les derniers 150 kilomètres. La température n'est toujours pas de notre côté. Après un peu plus d'une heure, un bus de touristes nous embarque et nous fait faire la route jusqu'à notre destination finale.Quelle drôle de sensation d'entrer dans un bus touristique et de s'asseoir, sales et mouillés, entre deux personnes qui ont payé leurs passages!

Nous aurons donc pris seulement 30 heures pour accomplir 700 kilomètres. L'expérience fut quelque peu fatigante, mais enrichissante. Nous en connaissons désormais plus sur l'étrange univers des camionneurs et aurons épargné un peu d'argent pour la suite du périple en Patagonie.

À nous les pingouins !!

- Nad qui ne changera pas de carrière!


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