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Israël/ Suliman ou Shlomo [un éclairage sur Shlomo Sand],

Publié le 30 mars 2009 par Drzz

Je suis désolée , j avais encore un article à vous proposer et j ai omis de l ajouter. Sorry . Le voici :
Israël/ Suliman ou Shlomo [un éclairage sur Shlomo Sand],
Michel Gurfinkiel

La liberté de penser ne se limite pas. Encore faut-il penser. Le martyre d'un Suliman Bashear ne peut servir d'excuse aux provocations d'un Shlomo Sand. (M. Gurfinkiel).

06/03/09

Texte (posté le 04/03/09) repris du Blogue de l’auteur

Ils portent presque le même prénom. Ils sont nés à un an d’intervalle. Ils ont embrassé la même profession : historien. Ils ont enseigné à quelques dizaines de kilomètres l’un de l’autre. Le premier a tenté de penser librement : il en est mort. Le second a retourné contre son pays la liberté de penser qui y règne : il se porte bien. Le premier, scientifique de grande envergure, n’est connu que de quelques spécialistes. Le second, médiocre pamphlétaire, est célèbre. Le premier ; Suliman Bashear, est un Arabe israélien, ou si l'on préfère un Israélo-Palestinien. Le second, Shlomo Sand, est un juif israélien antijuif,  ou un alterjuif. Un Plutarque moderne ferait un livre de leurs destins à la fois semblables et différents. Bornons-nous aujourd’hui à relater les faits. En quelques mots seulement.


Suliman Bashear
naît en 1947 dans ce qui est encore la Palestine sous mandat britannique. Sa famille habite Maghar, un village arabe de Galilée. La moitié des habitants sont druzes. Les autres sont chrétiens ou musulmans. En 1948, rares sont ceux qui s’exilent. Suliman grandit en tant que citoyen arabe d’Israël. Il se sent d’abord Arabe et palestinien. Mais il respecte l’Etat juif. Il passe un B. A. d’histoire à l’université hébraïque de Jérusalem en 1971, un M. A., dans la même institution, en 1973. En 1976, il obtient un doctorat à l’université de Londres pour une thèse sur Le communisme dans l’Orient arabe. En 1979, enfin, il accepte un poste de professeur à l’université de Naplouse, en Cisjordanie, qui vient d’être créée avec l’appui du ministre israélien de la Défense, Ezer Weizmann. Son rêve : faire des Palestiniens l’élite du monde arabe ; et contribuer à un rapprochement intellectuel entre Israéliens et Palestiniens.

Voici comment Wikipedia relate la suite : « Bashear fit les gros titres de la presse internationale quand il fut défenestré du second étage de la faculté par des extrémistes musulmans que sa thèse, selon laquelle l’islam s’est développé en tant que religion dans le contexte historique du judaïsme et du christianisme, et non pas à la suite d’une révélation reçue par un prophète, avait rendus furieux ».

Défenestré. Jeté à travers la fenêtre. Il survit, mais ne sera plus qu’un infirme, traînant son existence misérable dans un fauteuil roulant.  En 1984, l’université de Naplouse le révoque après la publication de son premier grand ouvrage, Introduction à l’autre histoire, où il demande aux historiens musulmans d’accepter les mêmes règles scientifiques - même à propos de l’histoire de leur religion - que les chrétiens ou les juifs.  La suite de sa carrière se déroule aux Etats-Unis, où il bénéficie d’une bourse Fulbright, puis en Israël, où il obtient un poste à l’Université hébraïque de Jérusalem. C’est là qu’il rédige son second grand ouvrage,  Les Arabes et les autres communautés dans l’islam primitif. Une crise cardiaque l’emporte en 1991.

Shlomo Sand est le fils de rescapés juifs polonais de la Shoah. Il est né en 1946 à Linz, Autriche, la ville dont avaient été originaires, entre autres, l’agitateur austro-allemand, Adolf Hitler, et le logicien austro-anglais, Ludwig Wittgentstein. Ses parents immigrent en Israël après 1948. A l’âge adulte, Sand milite dans l’extrême gauche antisioniste, favorable à la création d’un Etat binational israélo-palestinien. Il quitte Israël, étudie en France où il devient l’une des coqueluches de la gauche bien pensante. Il écrit, sous la direction de Jacques Julliard, une thèse sur Georges Sorel, un intellectuel français de la Belle Epoque, apôtre de la violence, qui fut le père spirituel du léninisme mais aussi du fascisme.

Rentré en Israël, Shlomo Sand y devient professeur d’histoire contemporaine à l’université de Tel-Aviv, et poursuit, en cette qualité, son action militante contre l’Etat d’Israël, le judaïsme en tant que culture ou religion, et le sionisme. Cela lui vaut d’être classé, toujours par Wikipedia, comme l’un des « nouveaux historiens israéliens », c’est à dire des intellectuels israéliens anti-israéliens. Il publie enfin, en hébreu puis en français, Comment le peuple juif fut inventé (Editions Fayard, 2008), où il entend démontrer que le peuple juif n’existe pas.

Certains prétendront que Sand est l’équivalent juif de Bashear. L’universitaire de Naplouse remettait en question le discours officiel arabe et musulman. Celui de Tel-Aviv s’attaquerait au discours officiel israélien et juif. C’est là une fausse symétrie. Pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, le discours officiel arabe et musulman est une réalité : quiconque s’écarte de ce discours risque sa vie et, accessoirement, son emploi, comme Bashear. Mais il n’y pas, en revanche, de discours officiel israélien et juif. Bashear peut exprimer ses opinions dans ses cours et dans ses livres en toute sécurité. Son université ne l’a jamais sanctionné. Elle accueille d’ailleurs beaucoup d’autres professeurs et enseignants appartenant à la même tendance idéologique ou politique.

Ensuite, les démarches de Bashear et de Sand sont, sur le fond, à l’opposé l’une de l’autre. En voulant mettre en place une recherche historique scientifique sur les origines de l’islam, l’universitaire arabe s’est heurté à une pseudo-histoire non-scientifique, à peine démarquée de l’apologétique religieuse. L’universitaire israélien fait exactement l’inverse : il oppose un  libelle, où les présupposés idéologiques l’emportent sur l’analyse,  à une histoire scientifique, fruit de deux siècles de recherches rigoureuses.

Si Sand peut faire illusion en histoire contemporaine, le domaine où il enseigne à l’université de Tel-Aviv, il se comporte dans d’autres domaines, notamment en histoire juive antique ou diasporique, en amateur non averti. Il reprend, par exemple, une vieille théorie selon laquelle les Khazars, peuple turc converti au judaïsme vers le VIIIe siècle, seraient les véritables ancêtres des Juifs ashkenazes : elle sert trop bien son projet de « déconstruction » du peuple juif. Mais la plupart des spécialistes ne croient plus aujourd’hui à la réalité historique d’une telle conversion, du moins à grande échelle. De surcroît,  plusieurs enquêtes ont définitivement établi, dans les années 1990, que tous les Juifs du monde, ashkenazes ou sépharades, étaient génétiquement plus proches les uns des autres que de n’importe quelle autre population. Y compris des Turcs et Tatares d’Eurasie.

La liberté de penser ne se limite pas. Encore faut-il penser. La liberté universitaire est l’une des bases de la démocratie. Encore faut-il que les enseignants respectent les enseignés en se soumettant à un minimum de contraintes formelles. Le cas Shlomo Sand mérite, à cet égard, plus ample réflexion. Ne serait-ce que par égard à la mémoire de Soliman Bashear.

© Michel Gurfinkiel et Hamodia, 2009


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