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PS : des primaires pour quoi faire ?

Publié le 31 mars 2009 par Hmoreigne

 Le PS vit son quart d’heure américain. Puisque les électeurs ne viennent pas à lui, c’est Solférino qui ira à eux. Intronisé par Martine Aubry grand Chambellan de la Rénovation, Arnaud Montebourg séduit par les sirènes américaines préconise dans un rapport rendu public lundi l’organisation de primaires ouvertes aux sympathisants pour la désignation du candidat à l’élection présidentielle de 2012. L’idée n’est pas nouvelle. Elle est portée depuis décembre 2008 par le think thank de gauche Terra Nova.

Arnaud Montebourg n’a pas eu besoin de faire chauffer ses neurones. Sa proposition de primaires ouvertes n’est que le fruit du retour d’expérience sur la victoire de Barak Obama organisé les 8 et 9 mars derniers à Washington par le Center for American Progress (CAP), principal think tank démocrate américain.

Le PS pour les dernières présidentielles a déjà goûté aux “joies” de primaires mais réservées à ses militants. Le résultat a été loin d’être concluant. Ponctué de coups bas et de phrases assassines, elles s’étaient traduites au final par l’émergence d’une candidate officielle fragilisée, épaulée par un parti engagé à reculons dans la campagne.

La proposition d’Arnaud Montebourg est donc singulièrement différente. Elle repose sur un système de primaires ouvertes, à l’américaine, destinées à créer “un effet de dynamique”. Le député de Saône-et-Loire évoque “la puissance de mobilisation de l’investiture de Romano Prodi par quatre millions de citoyens, ou d’Obama par 35, est incomparable à la désignation par 200.000 socialistes français”.

Il est vrai qu’il y a urgence. Le nombre de militants socialistes a considérablement chuté. En l’absence de chiffres officiels on peut estimer que la jauge actuelle se situe entre 130 et 150 000 militants.

Plutôt que de remédier à cette rupture avec la société, le PS s’apprête à faire avec. Depuis le congrès de Reims Ségolène Royal, en délicatesse avec l’appareil du parti, réclame l’organisation de primaires ouvertes aux sympathisants. L’idée, malgré les réticences de départ, fait son chemin. Le 21 mars Martine Aubry, réservée sur le sujet, a annoncé l’organisation à l’automne d’une convention sur la rénovation. Si Strauss-khaniens et Ségolénistes, qui disposent de candidats très médiatiques, sont favorables à cette révolution, François Hollande et des “Jospinistes” seraient réticents.

Arnaud Montebourg réplique qu’un tel mode de désignation permettrait de “reconstruire une relation avec le peuple de gauche en mobilisant 4 millions de personnes“. Selon l’ex porte-parole de Ségolène Royal, des primaires ouvertes permettraient de reconstruire l’unité du PS d’abord, puis de toute la gauche ensuite. Elles pourraient s’articuler en deux temps : commencer par mettre tous les socialistes d’accord puis, proposer aux partis frères de participer à des primaires de toute la gauche.

Terra Nova a largement mouillé sa chemise sur le sujet ces derniers mois et rendu un rapport à l’intitulé explicite: “Pour une primaire à la française”. Le Think thank relève froidement que la crise actuelle de la gauche française est avant tout une crise de leadership mais surtout que la cause n’est pas conjoncturelle mais, structurelle : “il n’existe aucune procédure institutionnelle pérenne pour permettre la sélection entre les candidats à la succession“. La seule solution consisterait donc en l’émergence d’un leader “naturel”.

Terra Nova revendique une approche très pragmatique. La fondation progressiste indique que la primaire permet d’adapter le fonctionnement des partis au régime présidentialiste français car elle repose sur une légitimité “qui intègre la personnalité du candidat, son adéquation à l’opinion publique“. Sous prétexte de modernité Terra Nova estime que le système de primaires répond à un besoin contemporain de personnification de la politique.

Le principal intérêt du rapport est toutefois de poser le postulat selon lequel, “les débats au sein du parti socialiste se cristallisent à tort autour du corps électoral“. Selon les auteurs, la distinction entre primaires ouverte et fermée est plus limitée qu’il n’y paraît. Ce n’est pas l’enjeu principal. Terra Nova avance que le résultat d’une primaire ne change pas selon qu’elle soit ouverte ou fermée, que “globalement, les militants votent comme les sympathisants. Pour une raison simple : les militants sont représentatifs des sympathisants“.

La fondation ne fait pas abstraction du fait que ce système pose le problème politique du rôle des adhérents et donc, in fine, du parti. “Une primaire ouverte aux sympathisants priverait les militants de la principale raison de leur engagement au sein d’un parti : la possibilité de choisir, le pouvoir de sélectionner le candidat. Elle ouvrirait la voie à un affaiblissement supplémentaire des fidélités partisanes. Cet argument est réel. (…) Mais les exemples étrangers tendent à montrer que les primaires ouvertes ne préfigurent pas la mort, mais la transformation du militantisme et de la vie partisane. (…) Le militant n’a certes plus le monopole de la désignation, qu’il partage avec les sympathisants. Mais il se voit confier deux autres rôles spécifiques. D’abord, l’organisation logistique de la primaire : c’est une fonction importante et valorisante que d’organiser un tel évènement démocratique (…) Ensuite, la présentation des programmes des candidats : les militants deviennent les porte-parole de leur candidat, dans des réunions organisées par le parti pour informer les sympathisants.

Terra Nova souligne que le champ politique de la primaire est un enjeu clé et écarte l’idée d’une primaire de toute la gauche, sur le modèle italien car elle existe déjà : il s’agit du premier tour de l’élection présidentielle. “Le vrai enjeu se situe bien au sein du PS, pour trancher entre ses compétiteurs.”

Mais, c’est surtout dans la date du vote que le think thank voit le principal enjeu. “Choisir le leader en fin de mandature, juste avant la présidentielle, c’est choisir le candidat à la présidentielle : c’est un modèle de type présidentiel, à l’instar des Etats-Unis. Le choix du leader en début de mandature correspond à un autre modèle, de type parlementaire : dès le début de la mandature, la défaite électorale consommée, on choisit un nouveau leader de l’opposition, candidat, sauf accident, à la direction du pays aux prochaines échéances électorales. C’est le modèle britannique, singulièrement celui des tories.

En attendant que le PS ne tranche la question, selon un sondage Ifop publié le 15 mars par Le Journal du dimanche, 68 % des sympathisants de gauche souhaitent des primaires ouvertes.

Terra Nova insiste pourtant sur deux points jugés essentiels : une codification à froid et le fait que le Premier secrétaire doit être un “secrétaire général” de bonne foi organisant la vie collective interne entre les candidats potentiels et le déroulement loyal de la primaire dans l’intérêt général du parti. “Dans l’idéal, il a interdiction statutaire de se porter candidat à la primaire“…


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