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La répartition participaliste

Publié le 06 avril 2009 par Pslys

Michael Albert se penche sur le fonctionnement du système économique en renvoyant dos à dos les deux modèles historiques : liberté du marché d’une part ; planification centralisée d’autre part. Ni les marchés, ni la planification ne vont dans le sens d’une rémunération juste et de la dignité au travail ou de l’autogestion. Le marché a pour unique objectif la maximisation du profit en ne s’intéressant pas aux nuisances qu’il engendre (mal-être social, dégâts environnementaux). Une division de classes apparaît entre quelques « coordinateurs » monopolisant les compétences décisionnelles et qui régissent avec les actionnaires toute l’économie. Et les travailleurs qui obéissent.  Cette hiérarchisation se retrouve dans la planification centralisée où les décideurs accumulent l’information et déterminent les prix, le niveau de production, les salaires… Les ordres partent du sommet, la base doit obéir.

Pourquoi les travailleurs et les consommateurs ne pourraient-ils pas se coordonner consciemment, démocratiquement, équitablement et efficacement ? Pourquoi ne pourrait-on pas mettre en place un processus de planification à plusieurs degrés dans lequel l’offre de production formulée par un conseil de travailleurs ne serait validée par les autres que sous réserve qu’elle soit socialement efficace, de même que la demande émanant des consommateurs serait validée sous réserve qu’elle ne soit pas jugée socialement ou écologiquement abusive ? Voilà le principe d’une planification participaliste. Les travailleurs et consommateurs déterminent la production.  Des instances d’assistance décisionnelle annoncent ensuite des indices de prix et les facteurs de production nécessaire. Les travailleurs et consommateurs font, à leur tour, des propositions en fonction de leurs critères propres. Prévision de production et facteurs de production nécessaires pour les premiers. Prévision des besoins en fonction des ressources disponibles pour les seconds.  Les conseils décisionnels peuvent évaluer les excès d’offre et de demande pour chaque produit et réviser les prix afin d’établir un programme réaliste dans lequel l’offre des producteurs correspond à la demande des consommateurs. Si la demande excède l’offre, l’indice des prix peut être augmenté ou les travailleurs sont incités à augmenter leur productivité ou leur nombre d’employés pour satisfaire la demande. Le but à terme étant d’arriver à un équilibre et à une autogestion.

La planification participaliste encourage la solidarité puisque nos intérêts (producteurs et consommateurs) sont liés.

M. Albert s’interroge sur la façon de mettre en place une économie participaliste. Le but étant d’avancer graduellement pour renforcer la prise de conscience, l’engagement militant et la capacité d’organisation nécessaires afin de parvenir à un changement global. L’auteur se focalise donc sur quelques domaines prioritaires :

- Mise en place des conseils et accès à l’information : le participalisme repose sur des conseils participatifs démocratiques et une diffusion de toutes les informations nécessaires pour prendre des décisions dans le domaine économique. Il faut donc encourager toute mesure qui vise à créer des organisations de travailleurs dans les entreprises ou à obtenir l’accès aux comptes de ces mêmes entreprises ainsi que des institutions gouvernementales.

- Une meilleure tarification : la planification participaliste permet de fixer des prix qui prennent en compte les conséquences sociales et environnementales des biens produits. Encourager des taxes sur des produits nuisibles à l’humanité ou à l’environnement et subventionner ceux qui produisent un mieux-être social ou écologique (santé, éducation, parcs, logement social) va dans ce sens.

- Prise en compte des données qualitatives : pour s’assurer que les prix reflètent bien les véritables coûts et bénéfices sociaux, il convient d’exiger un étiquetage des produits précisant les conditions de travail ou les effets nocifs éventuels de la production.

- Partage et solidarité : l’un des maux du marché est qu’il favorise la consommation individuelle au détriment de la consommation collective. Il faut donc favoriser tout mouvement de consommateurs qui mettent en commun les biens achetés.

- Les besoins humains plutôt que le profit : contrairement au capitalisme, le participalisme gère la consommation et l’investissement collectifs par la planification démocratique. Ceci conduit à orienter la consommation et l’investissement vers la satisfaction des besoins et l’épanouissement du plus grand nombre. Il faut donc revendiquer une démocratisation des prises de décision budgétaires de l’Etat en ménageant un plus grand rôle aux individus sous forme de conseils citoyens. La logique humaine l’emportant sur la logique économique dans les choix budgétaires : réduction des dépenses militaires, limitation des cadeaux faites aux grandes entreprises, développement des investissements sociaux.

- Plus de loisirs, moins de travail : l’économie de marché, par l’intermédiaire de la concurrence, pousse à travailler toujours plus au détriment des loisirs. Une situation d’autant plus regrettable que l’augmentation de la productivité pourrait parfaitement maintenir un haut rendement sans charge de travail supplémentaire. Par conséquent, les demandes concernant la durée du travail quotidien ou hebdomadaire, l’augmentation des congés et la gestion du temps constituent non seulement une excellente méthode de redistribution des richesses mais également un moyen d’accorder une réelle place aux loisirs.

Source : Michael Albert « après le capitalisme »


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