Magazine Humeur

Tua culpa

Publié le 08 avril 2009 par Jlhuss

… le ringard est de nouveau ‘tendance’.

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On y allait avec un pincement au ventre et la gorge serrée, après un sas de remâchement dépressif. -Dans le cabinet du dentiste ? sous la roulette ? –
Non, dans le confessionnal, sous la houlette d’un curé grillagé, missionné pour extraire les caries morales.

Je ne sais plus si l’on ressortait du pieux isoloir plus léger par en-haut, mais très meurtri aux genoux, c’est sûr, après la station sur la planche de chêne, moins accueillante que le divan du psy.
Le confort de l’opération n’est pas la seule différence entre la confession et l’analyse : l’une ne coûtait qu’un Pater et deux Ave, dans l’autre on nous dit que l’ardoise salée fait partie de la cure.

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Sur le fond, différences et ressemblances.
Deux tête-à-tête thérapeutiques, mais tandis que le disciple de Sigmünd souffle au malade : ‘Deviens ce que tu es’, le disciple de Pierre prescrit au pénitent : ‘Deviens ce que tu dois être’.
Dans les deux cas un courageux effort de lucidité, hérité du vieux ‘connais-toi’ socratique ; mais le confessé se juge et s’élague au fer aiguisé de la conscience , l’analysé s’accepte et s’épanouit dans le déverrouillage du surmoi .

On ne pleurera certes pas le confessionnal, cage imitée des ‘fillettes’ de Louis XI, ambigu de sellette et d’alcôve où vous lancinait la hantise d’un ‘péché de la chair’ de nos jours dévitalisée.
Laissons donc s’empoussiérer encore dans quelques églises ce meuble invraisemblable qui rebute même les antiquaires.
Mais l’ ‘examen de conscience’ qu’il théâtralisait, voilà sûrement une notion qui commence à manquer.

Avez-vous remarqué que le moi n’est plus jamais haïssable, à part bien-sûr celui des autres ? Le moi se revendique tout brut, s’expose tout nu, se fête ingénument dans le culte de la seule vertu qui vaille à présent : l’authenticité. ‘Je suis comme je suis, je m’assume pleinement, on me prend ou on me laisse.’
Et bien sûr -corollaire du moi adorable - voici le règne du toi coupable.

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Tua culpa, c’est ta faute, la faute de l’autre : la faute de Marllboro si j’agonise, de mon proprio si je somatise, de mon prof de maths si je cancrelise, d’Antoine Seillières si je clochardise, du maire si ma maison prend l’eau.
Au reste, quand la liberté de Paul, cette belle fierté d’être soi toujours et partout, lui sera revenue bien fort dans le pif comme un boomerang aux couleurs de la liberté de Jacques ; quand on stationnera devant son garage comme il se gare sur le passage piéton, il comprendra que le ‘montage’ chrétien de l’examen de conscience et de ‘l’amour du prochain’ était moins religieux que civil -et toujours facile à laïciser (comme au début du dernier siècle) si décidément dieu nous gêne.

N’y a t-il pas urgence à remettre dans les têtes plutôt que sur les murs un brin de caméra de surveillance, un zeste de surmoi ?  Courage ! Il paraît que ça commence à bouger chez les nouveaux psychologues, pédagogues, sociologues.
Ceux de 68 partent en retraite…Bienfait d’une société qui change : le ringard est de nouveau ‘tendance’.

Arion

[Réédition avec les commentaires d’origine : 30 aout 2005]

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