Douilles d'obus au phosphore trouvées à Khuzna, dans la bande de Gaza, le 24 janvier 2009.
Morceaux de phosphore blanc encore incandescents trouvés dans la ville de Gaza.
L'équipe d'Amnesty International enquête sur l'utilisation du phosphore blanc contre la ville de Gaza.
© Amnesty International / 2 avril 2009 / amnesty.org
Amnesty International a révélé qu'une très importante cargaison de munitions en provenance des États-Unis a été livrée à Israël il y a quelques semaines. D'après des informations parvenues à l'organisation, le Wehr Elbe, un cargo allemand affrété et contrôlé d'un point de vue légal par le commandement du transport maritime militaire des États-Unis, est arrivé le 22 mars au port israélien d'Ashdod, à 40 km au nord de Gaza par la route, et y a déchargé sa cargaison composée semble-t-il de plus de 300 containeurs.Le Wehr Elbe a quitté les États-Unis à destination d'Israël le 20 décembre 2008, une semaine avant que ne débutent les attaques israéliennes contre Gaza, avec une cargaison de 989 containeurs de munitions, de 6 mètres de long chacun, pour un poids total estimé à 14 000 tonnes.
Interrogé au sujet du Wehr Elbe, un porte-parole du Pentagone a confirmé à Amnesty International que « le déchargement de toute la cargaison de munitions américaines s'est achevé avec succès à Ashdod [Israël] le 22 mars ». Il a ajouté que cette cargaison était destinée à une installation de stockage américaine située en Israël. Un accord israélo-américain autorise, si nécessaire, le transfert à l'armée israélienne de ces munitions américaines stockées en Israël.
Certains des obus d'artillerie contenant du phosphore blanc tirés par les forces israéliennes en direction de zones résidentielles densément peuplées de la bande de Gaza en janvier dernier, qui ont blessé et tué des dizaines des civils palestiniens, provenaient de stocks américains – comme l'indiquait clairement la mention « M825 A1 ». D'autres obus au phosphore blanc dont les restes ont été retrouvés sur place avaient également été fabriqués aux États-Unis, tout comme l'immense majorité des autres munitions utilisées par les forces israéliennes pour commettre de graves atteintes au droit international au cours du récent conflit dont la bande de Gaza a été le théâtre pendant trois semaines.
Selon un autre haut responsable américain, les États-Unis examinent actuellement l'usage qu'a fait Israël des armes américaines pendant le conflit de Gaza afin de déterminer si le droit américain a été respecté, mais aucune conclusion n'a encore été rendue.
Pendant ce temps, des civils palestiniens blessés lors d'offensives israéliennes en janvier dernier continuent à mourir. Il y a quelques jours, Ghada Abu Halima, grièvement brûlée lors d'une attaque au phosphore blanc le 4 janvier, a ainsi succombé à ses blessures. Le père et quatre jeunes frères et sœurs de son époux, dont une petite fille âgée d'un an, avaient été tués sur le coup, tandis que Ghada Abu Halima, sa belle-mère et plusieurs autres enfants de la famille avaient été grièvement blessés.
Amnesty International estime que cette livraison aurait dû être stoppée et que l'inaction des États-Unis sur ce plan amène à se demander si le président Obama prendra des mesures afin d'empêcher que des armes américaines n'alimentent des conflits et ne contribuent à des attaques contre des civils pouvant constituer des crimes de guerre, comme ce fut le cas à Gaza.
« D'un point de vue légal et moral, le gouvernement de Barack Obama aurait dû mettre fin aux livraisons d'armes américaines, à la lumière des nombreux éléments attestant que les forces israéliennes se sont récemment servies d'équipements militaires et de munitions de ce type pour commettre des crimes de guerre, a affirmé Brian Wood, responsable de la campagne sur le contrôle des armes à Amnesty International. Fournir des armes dans ces circonstances est contraire aux dispositions du droit américain. »
« Le risque est grand que l'armée israélienne se serve de ces nouvelles munitions pour violer une nouvelle fois le droit international, comme elle l'a déjà fait durant le conflit à Gaza. Nous exhortons tous les gouvernements à suspendre immédiatement toutes les livraisons d'armes à destination d'Israël et de tous les groupes armés palestiniens, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus guère de risque que soient perpétrées des atteintes aux droits humains. »
Les États-Unis étaient de loin le premier fournisseur d'armes à Israël entre 2004 et 2008. Le gouvernement américain a également prévu d'apporter une aide militaire de 23 milliards d'euros à Israël.
Selon un responsable américain, le président Obama n'envisage pas de réduire les milliards d'euros d'aide militaire promis à Israël dans le cadre d'un contrat de dix ans signé en 2007 par le gouvernement du président George Bush. Ce nouveau contrat prévoit une augmentation de 25 % par rapport au dernier contrat entériné par le précédent gouvernement américain.
Amnesty International a relaté en détail les crimes de guerre dont se seraient rendus responsables les Forces de défense d'Israël et les groupes armés palestiniens à Gaza. Le 15 janvier, l'organisation a exhorté tous les gouvernements à suspendre immédiatement les transferts d'armes à destination de toutes les parties au conflit à Gaza afin de prévenir de nouvelles atteintes aux droits humains commises à l'aide de ces armes et d'autres équipements militaires.