En 1986, Jacques Chirac avait conduit une campagne "vivement demain". Aujourd'hui, l'opinion lui dit "vivement hier" quand il était au ... pouvoir.
Crédit photo : Auvinet Nicolas/FlickR
La victoire de Nicolas Sarkozy à la présidentielle 2007 n'était-elle pas d'abord la défaite de Jacques Chirac qu'il avait contesté méthodiquement pendant cinq longues années ?
L'actuelle mode de Jacques Chirac n'est-elle pas l'échec de Nicolas Sarkozy ?
Jacques Chirac incarnait alors "l'ancien pouvoir". Le pouvoir qui avait permis avril 2002 avec l'accession du Front National au second tour de la présidentielle, preuve d'une crise politique profonde.
Cet ancien pouvoir qui ne règle rien. D'ailleurs en 2007, tous les facteurs de la crise de 2002 étaient encore là.
La crise des partis politiques persistait. Rien n'avait été fait pour tenter de surmonter le discrédit généralisé qui éloignait d'eux bon nombre de citoyens et qui favorisait un abstentionnisme à un niveau record.
L'image de "monarchie républicaine" s'était accentuée aggravant d'autant le sentiment que les élites politiques étaient totalement coupées des réalités de la vie quotidienne.
Le Parlement avait continué sa "descente aux enfers", coincé entre l'Europe et des collectivités locales toujours plus puissantes.
Deux autres phénomènes avaient même émergé depuis 2002. Le Conseil Constitutionnel était apparu comme le seul vrai arbitre des débats de société au détriment des pouvoirs politiques habituels. La loi et l'institution judiciaire étaient désormais en crise ouverte avec une commission Outreau battant les records d'audience lors des retransmissions publiques de ses auditions parlementaires.
Le tableau général s'était donc encore noirci depuis avril 2002.
Ce constat semblait être d'abord le fruit de l'inaction qui traduisait un désarroi sans précédent.
Le pouvoir politique paraissait totalement décontenancé face à cette réalité qui lui échappait irrémédiablement.
Le mécano politique paraissait composé de pièces détachées désormais impossibles à remettre en ordre.
Les commentateurs dissertaient sur ce Pouvoir dégageant le sentiment d'un "bateau ivre" dont le seul souci de l'équipage était de reporter l'échéance du naufrage.
La condamnation la plus implacable du second mandat de Jacques Chirac résidait dans l'impertinence et la fronde permanentes opposées par les siens à la tête de son ex-parti et à l'intérieur même de son Gouvernement. Ce Président âgé ne comprenant plus son époque était le "dernier de l'ancien siècle". Après son départ, on allait voir le mouvement, la réforme, la modernité. Une "nouvelle République" allait naître tournant le dos à la monarchie d'antan.
Deux ans plus tard, le représentant de cet "ancien pouvoir" monte sur la première marche du podium des personnalités les plus populaires aux yeux des Français.
La raison réside dans la déception portée par son successeur.
La percée hier de Nicolas Sarkozy était le témoin des échecs de Jacques Chirac. La percée aujourd'hui de Jacques Chirac est le témoin des échecs de Nicolas Sarkozy.
La première était un signe d'espoir. La seconde est un marqueur de regret.
Les Français ne sont pas prêts à vivre cette "nouvelle République" agressive, souvent choquante qui, de surcroît, ne donne pas le sentiment de régler réellement les vieux maux, hier dénoncés, aujourd'hui toujours aussi présents, voire même davantage.
Celui qui avait conduit en 1986 une campagne intitulée "vivement demain" pleine d'optimisme et de joie de vivre avait été marginalisé 20 ans plus tard sur le même thème avant de connaître une embellie qui ressemble fort à un "vivement hier" ...