Magazine Journal intime

Les livres usés

Par Daniel Valdenaire
Saisir un livre c’est sentir son odeur, c’est toucher le papier, c’estfaire vivre l’image de couverture. Si je l’ai déjà lu, c’est me remémorer où je l’ai lu, comme une musiqueévoque des souvenirs, des instants de vie.

Chaque écrit à son histoire, un peu comme le vin qui a une robe ou un caractère.Les livres des bouquinistes ont souvent une odeur de moisissure, ils ont un vécu, contrairement au livre neuf qui dégage une odeur ” nouvelle ” d’encre d’imprimerie. Ce dernier semblable à un nouveau-né, doit trouver sa place parmi les livres plus anciens que lui.

On peut ressentir également comme une excitation dans l’espoir de trouver parmi les pages, une note posée là comme marque-page et oubliée pendant des années. On découvre alors une part du personnage qui a tenu ce livre avant vous. Parfois, bien que je ne le fasse jamais, j’aime à trouver des phrases soulignées au crayon de papier ou des notes dans les marges. Comment a-t-il perçu ce livre ? J’essaie de deviner s’il s’agit d’un homme ou d’une femme.

Les livres numériques ont des difficultés à attirer des lecteurs. La raison principale est qu’un livre se possède, qu’il est personnel. Qu’on le tient dans ses mains et que sa symbolique augmente au fil de la lecture, après laquelle il deviendra une partie de nous. On pourra le regarder comme un complice. Il ne sera pas seul, il rejoindra d’autres livres. 

Michel Tournier :«Or si le spectacle d’une bonne et heureuse manipulation d’un livre a de quoi réjouir le coeur d’un écrivain, c’est bien autre chose encore de voir certains lire avec leurs doigts! Toucher les mots, effleurer les métaphores, palper la ponctuation, tâter les verbes, prendre une épithète entre le pouce et l’index, caresser toute une phrase…»

Extrait de Petites proses.


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