COMMENT EST NÉE L’IDÉE D’ÉCRIRE CE LIVRE ?
Alors que nous travaillions tous les deux ŕ Droits d’Urgence, il y a quelques années, nous avions été sollicités pour rédiger une contribution sur l’accčs au droit et ŕ la justice pour un ouvrage professionnel, le Guide de l’action sociale. Il s’agissait de rédiger un texte destiné ŕ des professionnels et de délivrer des informations essentiellement pratiques ŕ ceux-ci. Nous avions effectué des recherches et disposions d’une « matičre » que nous avons eu envie de mettre ŕ disposition d’un public plus large. Il y a deux ans environ, nous avons contacté un éditeur qui a trouvé intéressante l’idée d’un ouvrage sur ces thématiques. Cet essai est aussi une maničre pour nous de faire une synthčse de notre expérience et de présenter certains principes d’intervention auprčs de publics défavorisés.
POUVEZ-VOUS NOUS RÉSUMER LES THČMES ESSENTIELS DE VOTRE OUVRAGE ?
Le plan de l’ouvrage répond ŕ l’architecture des ouvrages de la collection « Libertés Plurielles » du Cavalier Bleu : hier, aujourd’hui, demain. Nous revenons donc sur le développement de l’accčs ŕ la justice et l’émergence beaucoup plus récente de la notion d’accčs au droit. Nous tentons ensuite de montrer le développement d’une politique publique en matičre d’accčs au droit ŕ partir des lois de 1998 relatives ŕ la lutte contre les exclusions ainsi qu’ŕ l’accčs au droit et aux modes alternatifs de rčglement des conflits. Visant ŕ permettre ŕ chacun de connaître et de défendre ses droits, de nombreux dispositifs opérationnels ont vu le jour, comme les Maisons de Justice et du Droit, les Points d’accčs au droit et les Relais d’accčs au droit. D’initiative publique ou associative, coordonnés par les Conseils départementaux de l’accčs au droit (CDAD), ils ont comme points communs la proximité et la gratuité, bien que leurs positionnements ne touchent pas aux męmes publics. Nous souhaitions également défendre des méthodologies d’intervention développées par des associations comme Droits d’Urgence, Accčs aux Droits Solidarité Paris (ADSP) ou encore l’Association de soutien ŕ la Médiation et aux antennes juridiques (ASMAJ). Celles-ci s’appuient notamment sur la coordination des interventions sociales et juridiques et l’accompagnement des personnes. Ces principes nous semblent essentiels pour permettre un véritable accčs au droit des personnes les plus démunies.
A QUI S’ADRESSE-T-IL ?
Les questions liées ŕ l’accčs au droit et ŕ l’accčs ŕ la justice concernent tout le monde. Chaque justiciable doit pouvoir avoir accčs ŕ une information juridique et savoir comment « saisir la justice » si le besoin apparaît. Partant de lŕ, on pourrait dire que le livre s’adresse ŕ tout un chacun. Cependant, nous sommes assez lucides, et il est évident que le lectorat devrait davantage ętre composé de professionnels de la justice et de l’action sociale et de lecteurs « motivés » car curieux des problématiques liées ŕ la justice. En tout cas, si le livre n’est pas destiné ŕ devenir un best-seller, nous l’avons rédigé de telle sorte que chacun puisse le lire sans difficulté, et nous l’espérons, avec plaisir. Comme nous le disions précédemment, ce projet de livre est né de notre envie de rendre accessible au plus grand nombre un texte réunissant des informations et témoignages ŕ la fois larges et compréhensibles sur l’accčs au droit et ŕ la justice...
Ŕ VOTRE AVIS, LA JUSTICE : UN DROIT POUR TOUS ?
Un bel idéal malheureusement contredit quotidiennement, un sens ŕ l’action politique certainement. Le sentiment d’injustice est prégnant et il est parfois difficile de le démentir. Il ne s’agit pas seulement de l’accčs au service public de la justice mais bien évidemment de la réduction des inégalités et de l’accčs aux droits fondamentaux, ce que visait notamment ŕ garantir la loi de 1998 relative ŕ la lutte contre les exclusions. La poursuite de cet objectif nécessite que chacun ait d’abord connaissance de ses droits pour pouvoir ensuite s’assurer de leur respect et de leur application. L’accčs au droit, l’accčs ŕ l’information juridique sont donc essentiels et constituent un véritable enjeu de société. Comment faire pour que le droit ne soit pas vécu uniquement comme une contrainte mais également comme un levier ? Ŕ ce titre, l’opposabilité de certains droits, comme le droit au logement, permet de renforcer le sentiment de justice en organisant les conditions du recours au juge et en mettant ŕ la charge d’un acteur identifié une obligation de résultat. C’est cependant un travail de longue haleine qui nécessite la mobilisation de tous les acteurs et le déploiement de réels efforts en termes de pédagogie, de vulgarisation et de formations. Enfin, il est important de montrer que la justice n’est pas forcément synonyme de rupture, de conflit mais qu’il est possible de l’appréhender de maničre différente, dans des conditions favorisant le dialogue et parfois męme en dehors de la présence du juge.