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66 applaudissements

Publié le 23 avril 2009 par Magda

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Soixante-six larmes, soixante-six rires, soixante-six étonnements devant Buffalo 66 (1988), un film de Vincent Gallo avec Vincent Gallo. Et Christina Ricci. Est-il permis d’être aussi créatif? Gallo écrit, interprète, filme, chante, joue de la guitare. Il promène, dans ce bijou absolu de film, son extraordinaire talent d’acteur et ses yeux perçants.

Sur le fil très ténu d’une toute petite histoire (un type sort de prison, et enlève une jeune fille pour faire croire à ses parents qu’il était marié, et occupé pendant toutes ces années), Vincent Gallo écrit un personnage énorme. Un homme plein de tics, de peurs, d’explosions et de recroquevillements, obsédé par la propreté et haï par ses parents. C’est l’enfant de la middle-class américaine, né sous pavillon moche, empli des sons des matches de base-ball. Dans cette ville hideuse, Buffalo, au trou du cul des Etats-Unis, Gallo travaille ses personnages et ses atmosphères comme de la dentelle de Calais.

Beau comme un top-model, il se laisse cependant disparaître sous la mélancolie profonde de son personnage brutalisé par la vie. On en oublie son corps de mannequin, son visage acéré et ses yeux éblouissants, pour ne plus voir qu’un homme au cœur de petit garçon élevé sans aucun amour. Christina Ricci incarne avec un naturel gracieux une girl-next-door à l’âme de sainte enfant. Ce couple improbable qui ne se touche pas - lui, l’homme, ne veut pas être touché - raconte l’amour bien mieux que toutes les Love Story. Pourquoi tu m’aimes? J’en sais rien. Quant à Anjelica Huston en mère obsédée par le base-ball, elle est parfaite et détestable, nous faisant rire couleur jaune foie.

Gallo ose le kitsch, dans des scènes face caméra entourées de flou, illuminations momentanées de personnages banals, qui en deviennent des stars aux teintes de gloire passée. Le père de famille indigne qui tout à coup chante sa rengaine de crooner devient Frank Sinatra, la jeune fille trop ronde et mal habillée, qui danse des claquettes dans le bowling, est Ginger Rogers (voir l’extrait ici). Il se permet tout, le Gallo, et ça pétille au visage du spectateur étonné de tant d’audace. Division de l’écran, flash-backs bizarres… tout passe! Quel plaisir de rencontrer un cinéaste qui sait jouer aussi bien avec l’image et ses codes!

Pourquoi ai-je attendu si longtemps avant de voir ce film? En éteignant le vidéoprojecteur, et après avoir pleuré comme une Madeleine touchée par la grâce, je me suis réjouie. Le divin enfant de la réalisation, génération 2000, était né, et je n’avais pas célébré son avènement. Mais mieux vaut tard que jamais. The Brown Bunny, qu’il réalisa en 2004, est un des films qui m’avait le plus laissée perplexe de toute mon expérience cinéphile. Force est d’admettre que je ne l’ai jamais oublié, et qu’il m’a fait une impression remarquablement déroutante.

Allez Vincent, fais-nous vite un autre film, au lieu de poser dans les pubs H&Merde…


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