
Proche des revendications des étudiants mobilisés, le nouveau président de Bordeaux-III croit en son calendrier de crise qu’il soumettra demain au Conseil des études et de la vie universitaire. Bloquée depuis près de trois mois, l’université Bordeaux-III, à l’initiative de son président Patrice Brun en poste depuis le début du mois, doit entamer aujourd’hui «une semaine de réflexions et de débats» sur la situation actuelle de l’université en France. Syndicaliste à l’UNSA et hostile aux réformes du gouvernement sur l’enseignement supérieur, le dirigeant de la faculté de lettres et sciences humaines prévoit une reprise des cours lundi prochain dans le calendrier qu’il présentera demain au Conseil des études et de la vie universitaire (Cevu), en dépit de l’opposition du comité de mobilisation qui se réunit en assemblée générale aujourd’hui.
La semaine dernière, le gouvernement a proposé un report des examens de quelques mois. Est-ce que cela vous conforte dans votre position ?
Absolument pas. Il est évident qu’on ne peut pas étudier le pistolet sur la tempe. ça ne peut pas être autrement.
Comment allez-vous réussir à mettre les calendriers en place au regard des situations très différentes selon les UFR et les années ?
ça va être réalisable. J’ai demandé aux directeurs d’UFR de me rendre un tableau exhaustif de leur situation depuis la mi-janvier. En fonction de cela, on verra. Je leur fais entièrement confiance.
Le second semestre rallongé, tel que vous l’imaginez, devrait couvrir environ deux tiers des cours. En quoi les diplômes auront-il plus de valeur que ceux qui auraient pu être délivrés sur les seuls résultats du premier semestre ?
Parce que beaucoup d’étudiants ont travaillé pendant ces semaines de blocage. Plusieurs enseignants ont donné des cours et des lectures. Sur l’année, entre 80 et 90% de l’enseignement aura été fait.
Considérez-vous votre plan de sortie de crise comme un dernier recours et redoutez-vous son rejet demain ?
Il n’est pas seulement question du calendrier. C’est aussi une position politique qui dit qu’on peut continuer à faire cours mais qu’on n’est pas dupe. Pour demain, j’y crois. C’est très simple : c’était le plan B et il n’y a pas de plan C. Nous sommes dans l’université du discours et de la dialectique, j’ai donc bon espoir de convaincre.
Craignez-vous que l’assemblée générale d’aujourd’hui soit particulièrement tendue en raison de l’adoption mercredi dernier du décret sur les enseignants-chercheurs et le vote demain de votre calendrier ?
Non, mais d’une manière générale, il y a un risque de radicalisation évident. Il faudrait que les pouvoirs publics en prennent conscience. Les ministres de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur doivent clarifier leur position. On est comme dans le fameux jeu des deux voitures qui foncent l’une vers l’autre et où la gagnante est celle qui se détourne en dernier. Aujourd’hui, on est près du choc.
La commission chargée du recrutement et de la formation des enseignants, par ailleurs co-présidée par le recteur de Bordeaux, va se mettre en place. Accepteriez-vous d’y travailler si on vous le proposait ?
Oui. Il faut discuter.
Seriez-vous intéressé ?
Après tout, pourquoi pas ? Je ne crois pas à la politique de la chaise vide.
Vous êtes entré en fonction en plein coeur de la crise. N’avez-vous pas peur de vous ennuyer lorsque la situation sera apaisée ?
Non (rires). Je pourrais travailler dans une plus grande sérénité sur tous les enjeux liés à la recherche et à l’enseignement à l’université.
Propos recueillis par Guillaume Balout«’’»