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Oh brave new world !

Publié le 14 mai 2009 par Jlhuss

51z5wadvssl_ss500_12421206.1242282280.jpg S’étant assuré que la salle avait fait silence, le Président du Tribunal effleura d’un pouce léger son écran de contrôle. Le prompteur s’alluma et il commença à lire :

Attendu que  Melchior B et Sybille T épouse B ont reconnu avoir eu, dans la période du 12 au 20 septembre dernier des rapports sexuels répétés au cours desquelles ils n’ont pas respecté les procédures fixées par les articles 32, 33, 35 et 36 alinéa 1, 2 et 4 de la loi du 20  novembre 2015.

Attendu que ces aveux sont confirmés par le procès-verbal établi par l’inspecteur divisionnaire Duncan Arouine, chef de brigade à la 3° section de la Surveillance et Prévention des Risques (SPR), qui stipule que les boîtes de R - B 325 allouées aux prévenus, conformément aux règlements en vigueur, ont été retrouvées intactes dans l’étang de la zone de loisirs d’Arminval les Borderies où Melchior B et Sybille T épouse B ont avoué les avoir jetées.

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Attendu qu’aux termes des articles 4 et 9 de la loi du 27 mai 2012 sur la protection des milieux naturels, il s’agit là d’un second délit puni d’une peine de six à douze mois de travail non-volontaire en milieu non-ouvert et constitutif d’une circonstance aggravante.

Attendu qu’à la suite de ces rapports, un ovule de Sybille T épouse B a été fécondé par un spermatozoïde de Melchior B ce qui a donné naissance à un embryon qui s’est, par la suite, développé de façon clandestine dans l’utérus de la dite Sybille T épouse B.

Attendu que celle-ci s’est abstenue, comme la loi lui en fait pourtant l’obligation, de se présenter au Centre d’Hygiène Sociale et de Génétique Appliquée dont elle relève.

Attendu qu’à l’issue de sa grossesse, la dite Sybille T épouse B a donné naissance à son domicile, à un enfant de sexe masculin qu’elle a déclaré avoir nommé Gaspard.

Attendu qu’elle a cherché à dissimuler cet événement, mais qu’il a été heureusement porté à la connaissance des autorités légales par Madame Aldebérine G voisine du couple. En effet, cette honorable citoyenne, alertée par les bruits suspects entendus lors d’une visite impromptue chez les B, en a informé, comme c’était son devoir , la SPR. A la suite de quoi l’inspecteur sus-nommé s’est rendu au domicile des B. Il y a constaté la réalité du délit. Il  a mis Melchior B et Sybille T épouse B en état d’arrestation et conduit Gaspard B à la  clinique spéciale d’analyse génique où il a été mis à l’isolement et où on a procédé à une analyse de son capital génique.

Attendu que, comme on pouvait s’y attendre étant donné l’archaïsme de sa conception, cette analyse a révélé que l’enfant Gaspard B est porteur de gènes pouvant interagir négativement ce qui risque de l’amener à développer des maladies difficilement curables ou à présenter des altérités de comportement ou d’aspect physique incompatibles avec son bonheur futur et avec l’harmonie de la société.

Attendu qu’au cours de leur interrogatoire, Melchior B et Sybille T épouse B ont affirmé, que, non seulement, ils avaient voulu avoir un enfant « naturellement » comme l’avaient fait les parents d’Einstein, de Léonard de Vinci ou de Louis Pasteur, mais, qu’en plus, ils avaient pris « un plaisir fou » à cette pratique délictueuse et qu’ils n’hésiteraient pas, le cas échéant, à recommencer.

Attendu que, questionnés de nouveau à l’audience sur ce sujet et, en dépit des paternelles admonestations du tribunal qui leur a rappelé que si la conception naturelle avait donné des génies, elle avait aussi produit Gengis Khan, Hitler ou Tamerlan, ils ont réitéré leurs déclarations, les aggravant même par d’odieuses comparaisons entre notre système transparent, démocratique et participatif de reproduction et les centres de perfectionnement de la race nazis.

Attendu que, par ailleurs, ils ont admis avoir été informés dès leur scolarité primaire et à plusieurs reprises depuis, en particulier lors de la signature de leur Pacte d’Union Universelle (PUU),  des graves dangers que les aléas incontrôlables d’une telle méthode faisaient courir aux enfants ainsi conçus et, par conséquent à la société tout entière.

Attendu qu’ils ne pouvaient, par conséquent, ignorer le système d’Examen et de Sélection Génique et de Gestation Extra-corporelle (ESGGE) qui permet, moyennant le traitement génétique des gamètes et le suivi in vitro de la croissance des embryons obtenus, de s’assurer que les futurs nourrissons seront exempts de quelque handicap cérébral, esthétique ou moteur que ce soit.

Attendu qu’en agissant ainsi Melchior D et Sybille T épouse B ont non seulement violé les lois mais aussi contrevenu sciemment au Principe Constitutionnel de Précaution qui interdit d’exposer les humains, nés ou à naître, à tout espèce de risques qui ne seraient pas reconnus comme sans dangers pour la Société et notre mère la Terre par un comité d’experts indépendants.

Attendu qu’ils ont également bafoué le  principe de Non-Discrimination puisque leur conduite peut, à bon droit, être considérée comme une provocation directe et délibérée à l’égard des citoyens et des citoyennes ayant signé un PUU avec un partenaire de même sexe et auxquels l’ancienne société interdisait les joies de la parentalité partagée qu’autorise désormais l’ESSGE.

Condamne Melchior B et Sybille T épouse B à la peine maximale prévue par la loi ,soit huit ans de soins obligatoires dans des unités de rééducation par la nature en zone reforestisée.  Les condamne en outre à verser à l’ESGGE et à l’association Européenne de Défense de la Non-Discrimination, partie civiles, la somme de quinze mille Eurodollars à titre de dommages et intérêts. Dit qu’à l’issue de leur peine, ils ne seront autorisés à cohabiter que dans un espace géré par un comité de citoyens participatifs, labellisé génétiquement responsables (CPGR)

Dit que Gaspard B sera placé sous la responsabilité de l’association pour l’Aide aux Individus nés du Hasard (AIH) qui l‘hébergera dans l’institution Alexis Carrel, sise à Monestier la Virenne, Cantal maritime.

Dit, en outre, Gaspard B devra rester sous surveillance scientifique rapprochée et qu’en cas de doute sur la qualité de son capital génique devra lui être appliquée la procédure de stérilisation et d’isolement prévue par la loi.

Dit enfin que ce jugement sera rendu public aux frais des prévenus dans les formes appropriées et par tous moyens de communication afin de dissuader quiconque serait tenté de suivre leur funeste exemple.

Chambolle

[NDLR : Photos, 2 ouvrages auxquels je pense en lisant ce texte]

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