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Un avis rapide sur la loi Création et internet

Publié le 14 mai 2009 par Sammy Fisher Jr

Oui, on doit dire comme ça : loi création et internet, ou plus exactement projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, appelé par métonymie "loi Hadopi", en référence à la commission administrative éponyme qu'elle propose de créer.
Je vais en parler une bonne fois pour toute, comme ça ce sera fait, et on pourra continuer à parler de choses plus intéressantes comme la littérature, la peinture ou la meilleure façon de nommer les rues. Je ne vais d'ailleurs pas vous faire perdre votre temps à expliquer en quoi cette loi est mal fichue, d'autres le font mieux que moi. Non, je veux juste faire un petit point sur l'après-Hadopi tel que je le vois, en recopiant ici une bonne partie d'un commentaire laissé en réponse à Olivier sur Facebook. Et comme, au vu du nombre de liens traitant de ce sujet que je poste sur mon blog Tumblr "Libertés numériques", il ne cesse de m'engager à venir expliquer tout ça dans un commentaire d'une de ses revues, nous allons donc faire d'une pierre deux coups.
Que les choses soient claires dès le début : je ne télécharge rien, ni légalement, ni illégalement. Je trouve juste que cette loi tape à côté de la plaque, notamment parce qu'elle confie un pouvoir de sanction à une autorité administrative, parce qu'elle est la porte ouverte à des mesures de contrôle et de surveillance de l'internet, et à des mesures restrictives des libertés d'une manière générale, et que, c'est la cerise sur le gâteau, elle ne règlera absolument pas le problème du piratage. A vrai dire, ce n'est pas une loi, c'est de la communication...
Ceci étant posé, quelle est l'étendue des dégâts à laquelle il faut s'attendre, maintenant que la loi est votée ? Réponse : très faible.
Le Parlement européen a superbement joué son rôle de protecteur des citoyens de l'Union (eh oui, c'est à ça qu'il sert, il vous représente, ne l'oubliez pas... les élections approchent) en adoptant massivement, et à deux reprises encore, des amendements (le fameux amendement "Bono") au "Paquet Telecom", uniquement pour dire qu'il désapprouvait le projet de loi "Hadopi" du gouvernement français. Le dernier mot en la matière revenant au Conseil des ministres de l'UE, il peut toujours passer outre, mais il est fort peu probable qu'il prenne ce risque, d'autant plus que cela reviendrait à différer de plusieurs mois l'adoption de ce fameux paquet telecom, ce qui serait une mauvaise chose pour les citoyens européens.
Il est donc fort probable que le Conseil choisira de mettre la France en minorité, plutôt que de s'opposer au Parlement.
De fait, la loi Hadopi votée ces jours-ci se retrouvera contraire à une norme juridique supérieure ; il faudra peut-être attendre la saisine d'un juge administratif pour voir la vraie fin de la loi Hadopi,  ou plutôt sa non-application, ce qui revient à peu près au même, mais nous pouvons d'emblée la considérer comme condamnée.
De plus, elle n'est pas encore promulguée : il faut encore qu'elle passe devant le Conseil Constitutionnel , que l'opposition ne manquera pas de saisir ; rappellez-vous de la fameuse loi DADVSI qui faisait peur à tout le monde : le Conseil Constitutionnel lui a ôté ses crocs, et la commission créée à l'époque (oui, c'est effectivement une manie) s'est surtout illustrée par son absence relative d'action. Je ne m'engage pas beaucoup en prédisant qu'elle sera sûrement flinguée comme tant d'autres au prochain toilettage dans le maquis des structurettes administratives...
Car après la promulgation de la loi, il faudra encore attendre les décrets d'application pour la rendre effectivement applicable. Etant donné la montagne de difficultés techniques (pour ne pas dire d'impossibilités), on risque de les attendre longtemps... Comme le dit Tristan Nitot :

[...] ne pas le publier serait une façon élégante d'enterrer Hadopi en toute discrétion


Bref, entre une loi votée de façon très médiatique pour satisfaire l'électeur et l'industrie, et son application hypothétique, il y a un très très long chemin... Le problème, et ce sera le mot de la fin, c'est que le gouvernement le sait : ce qui compte c'est l'image, donner l'impression que l'on a fait quelque chose...
Dommage.


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