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Fin du pèlerinage de la Ghriba

Publié le 14 mai 2009 par Drzz

 

Le pèlerinage de la Ghriba, la plus ancienne synagogue d'Afrique, s'est achevé à l'issue de deux jours de recueillement pour des milliers de juifs perpétuant des rites millénaires dans la joie sur l'île de Djerba (500 km au sud de Tunis).

Moment fort du pèlerinage, la procession de la Menara, une relique de la Torah, s'est déroulée par un temps ensoleillé dans une ambiance gaie et haute en couleurs.  Dans l'esprit de ce septuagénaire qui préside aux rites de la Ghriba depuis de longues années, le souvenir douloureux de l'attentat perpétré dans cette synagogue en 2002, est oublié. Il fait désormais partie du passé. Revendiqué par Al-Qaïda, cet attentat avait causé la mort de 21 personnes dont 14 touristes allemands, deux Français et cinq Tunisiens.

Le  dispositif de sécuritaire était  exceptionnellement renforcé cette année. De l'aéroport, aux hôtels et jusqu'aux lieux des rites, des centaines de policiers en tenue et en civil étaient mobilisés, filtrant les passages tout au long de l'itinéraire, tandis qu'un hélicoptère de l'armée opérait épisodiquement des rondes dans le ciel de l'île des lotophages.

Sous haute protection, quelque 6.000 croyants venus essentiellement de France, d'Israël et de Tunisie ont mêlé ferveur et fête, alternant prières et rites dans le sanctuaire, divertissement, danses et concerts inter religieux au casino de Djerba.

Une note triste cependant: l'absence du chanteur Yacoub Bchiri décédé il y a trois mois, après avoir animé de sa voix mélodieuse ce rituel pendant des dizaines d'années.

« C’est encore mieux que l’an dernier », se félicite Pérez Trabelsi, chef de la Ghriba, alors que ses coreligionnaires achevaient le rituel pour se détendre à l’ombre d’une pergola face de la Synagogue.

Selon son fils  René Trabelsi, voyagiste qui organise des vols charters vers Djerba à partir de la France, l'affluence a avoisiné celle de l'an dernier malgré la crise économique et les événements de la Bande de Gaza dont l'impact "s'est petit à petit estompé".

 

Le président de la Fédération des associations juives, Gabriel Kabla, a salué une "vue juste" du gouvernement tunisien pour sa "volonté de soutenir la pérennité du pèlerinage" à la Ghriba. "C'est un vrai succès", commente Monique Hayoun, créatrice de plusieurs sites juifs, dont Ghriba.com, dégustant à l'ombre méchoui et bière fraîche dans le bâtiment jouxtant la synagogue, où des rabbins prodiguaient les dernières bénédictions. Par petits groupes les pèlerins ont défilés  pour une ultime prière, un voeu, allumant un dernier cierge ou préparant la parade rituelle clôturant une « hilloula »

Rites accomplis , les fidèles quittaient avec émotion la Ghriba  ou ils ont allumé des chandelles , formulés des vœux, reçu la bénédiction des rabbins , sans oublier d’embrasser l’armoire qui renferme la Torah aux cylindres d’argent , unique au monde.

Durant ce pèlerinage, les fidèles ont été invités à une ovation spéciale  en hommage à un chanteur tunisien qui a osé chanter la paix en pleine guerre de Gaza .Le Tunisien musulman Houcine Al-Iffrit et l'Israélien Youval Taieb ont donné de la voix en arabe et en hébreu, faisant pleurer d'émotion en implorant en duo "Allah Akbar" et "Chema Israël" ou en improvisant sur le répertoire culte d'Oum Kalsoum, la diva égyptienne de l'Orient.

"Magique!", lance Jalila, musulmane venue de Nabeul partager le moment avec son amie d'enfance juive dans cette ville du nord-est tunisien abritant autrefois de nombreux juifs.

Pour la nième fois arrive  Toni Fellah, doyenne des juifs de Libye exilée en Italie. "Kadhafi nous a virés, la Tunisie nous permet de respirer l'air du pays", déclare l'Italien Filo.

Lors d'une cérémonie à la synagogue à laquelle assistaient le grand rabbin de Tunisie et une foule dense de fidèles, le ministre tunisien du Tourisme Khélil Laâjimi, a plaidé pour "le triomphe de l'esprit et de l'amour sur les instincts destructeurs". Il a souhaité la bienvenue aux fidèles, assurant qu'ils continueront d'occuper "une place privilégiée" en Tunisie, un pays qui se veut "ouvert et tolérant".

Le ministre a, en outre,  rappelé que "la Tunisie avec un substrat civilisationnel plusieurs fois millénaire, est dépositaire d’un héritage culturel aussi riche que diversifié dont les empreintes témoignent de la grandeur des civilisations qui se sont succédé sur son sol. "

Le succès du pèlerinage est une preuve de la coexistence et la tolérance qui existent en Tunisie. Une réalité qui ne peut être remise en question.

Ftouh Souhail, Tunis

 


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