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Le transport maritime dans le Grand Nouméa: une solution miracle ?

Publié le 14 mai 2009 par Servefa

En attendant de collecter quelques photos de la Nouvelle-Orléans, puisque nous avons perdu notre appareil photo l'avant-veille du retour à Montréal, j'ai décidé d'écrire un billet que je projette depuis un bon bout de temps sur le transport maritime. La campagne des provinciales, qui a vu naître un embryon de débat sur la problématique des transports et des déplacements dans le Grand Nouméa (malheureusement sans jamais relier cela à l'action d'urbanisation, en particulier dans sa dimension d'habitat), a en effet souvent mis en avant le transport maritime (parfois sous l'appelation, nous le verrons plus tard plutôt incongrue, de ferry), qui a été présenté comme une solution aux maux des automobilistes calédoniens.

Une telle solution mérite, bien-sûr, une étude attentive, mais dans l'attente d'un tel travail je me permets de lancer la réflexion avec quelques petites remarques que j'ai tenté de mener le plus rigoureusement possible. Ces dernières s'attachent surtout à la durée des trajets pour les usagers, plutôt qu'à d'autres aspects tout aussi important mais plus délicat à aborder, tels que la rentabilité du service, en particulier en perspective d'un objectif de clientèle à atteindre permettant d'alléger la circulation automobile, ou encore la faisabilité "marine" au regard des conditions météorologiques. Pour toutes modestes que sont ces réflexions, elles s'appuient néanmoins sur des observations de systèmes de transport maritime à trois endroits différents: New York, Québec, et la Nouvelle-Orléans. Dans ces trois villes nord-américaines, où, on peut l'espérer, ce type de transport est associé à une certaine efficacité, j'ai entrepris de chronométrer le temps d'accostage et de remplissage, par les usagers, des bateaux. Les vitesses de croisière de ces derniers proviennent des sites Internet des compagnies. Les chiffres proposés ici sont des moyennes des observations dans ces trois villes. Si vous le désirez, vous pouvez m'écrire pour avoir le détail de l'ensemble des calculs dont les résultats sont proposés ici.

Avant de commencer cet esquisse d'étude je me dois d'avouer que je ne connais rien de rien aux courants marins et autres combines liées à la bathymétrie, en dépit d'une certaine tradition familiale de liens avec la mer. Pour tracer les routes  maritimes j'ai donc fait cela au feeling en minimisant au mieux les distances à parcourir et en évitant de passer trop près des ilôts et autres amuseries, tout en restant très sommaire (ce qui explique l'aspect anguleux de mes tracés).

Toutefois au vu de la bathymétrie (pifométrée) du côté de Dumbéa, et de Dumbéa-sur-Mer en particulier, je me suis concentré sur la desserte du Mont Dore, même si d'autres dessertes par voie maritime sont possible dans l'agglomération, comme nous le verrons en conclusion de ce billet.

Conformément à l'entretien de Monsieur le Maire du Mont-Dore de la fin de l'année 2008, le départ du Mont-Dore a été logiquement envisagé à Boulari avec éventuellement un toucher au Vallon Dore. La destination à Nouméa est quant à elle prévue au lieu rassemblant le plus d'emplois, c'est à dire le centre-ville au niveau du quai Jules Ferry. Toutefois, il me semble que Ngéa présente un potentiel de développement tout à fait intéressant à Nouméa pour une éventuelle densification future et la création d'un mini-quartier d'affaire joliment situé en bord de mer, aussi l'opportunité d'un toucher à Ngéa a-t-elle été abordée.

Les routes observées sont les suivantes:

Boulari - Vallon Dore - Ngéa - Quai Ferry

Boulari - Ngéa - Quai Ferry

Boulari - Vallon Dore - Quai Ferry

Boulari - Quai Ferry

Les temps de parcours ont été calculés en fonction des vitesses de service de deux types de navire: ferry (12 noeuds - au moins 500 places) et Navire à Grande Vitesse (NGV - 24 noeuds - jusqu'à 250 places). Les embarquements et débarquements ont été chronométrées dans les différents sites détaillés plus haut avec des durées moyennes prises égales pour l'embarquement et pour le débarquement (ceci est une légère simplification de calcul, minimisant les durées, l'embarquement est finalement plus rapide, il est plus aisé pour un navire de quitter un lieu que d'y accoster). Ces durées sont bien-sûr plus courtes pour les NGV que pour les ferries (navire plus maniable et moins d'usagers à embarquer/débarquer).

Les résultats, simplifiés, sont présentés dans le tableau ci-dessous, comparés à une route terrestre prise dans le cadre d'un aménagement BRT (d'où une vitesse commerciale a priori importante, bien que faible pour un BRT (à comparer aux 35 km/h de vitesse commerciale à Bogòta par exemple) avec des bus d'une capacité d'environ 110 places.

Il apparait que l'option ferry est lourdement handicapée par les faibles vitesses de croisière et les temps d'embarquement/débarquement, des approches de type NGV sont donc à privilégiée. En effet, pour être compétitif, au regard de la perte de confort engendrée (perte d'autonomie une fois à destination, nécessité de marcher pour arriver à sa véritable destination, etc.), un transport collectif se doit d'avoir des temps de parcours comparable à la solution automobile (estimée, en 2007, pour Boulari à 30 minutes, d'après le Plan de Déplacement de l'Agglomération du Grand Nouméa, en heure de pointe). A ce titre, une solution de type NGV n'apparaît intéressante que si on fait fi d'un toucher au Vallon-Dore (les usagers du Vallon Dore peuvent toujours venir à Boulari avec le concept d'un parking-relais). Il semble par ailleurs que la solution terrestre présente des solutions très intéressante en comparaison de la voie maritime. Finalement la solution la plus intéressante reste Boulari - Ngéa mais cette dernière suggère de développer Ngéa (le développement d'un transport terrestre rapide de Ngéa vers le centre-ville apparaît difficile), à moins d'envisager Ngéa sous l'aspect résidentiel et de considérer le développement du côté de Boulari.

En conclusion, loin d'être une solution miracle, il semble que le transport maritime entre le Mont-Dore et Nouméa demeure plus comme une solution d'appoint à un système de transport collectif plus vaste qui ne fera pas l'économie de solutions terrestres efficaces (de type BRT) . La ligne Boulari - Ngéa semble particulièrement intéressante et peut avoir en plus, a première vue, un potentiel touristique important.

Un rapide coup d'oeil sur le Grand Nouméa montre pourtant que le transport maritime pourrait avoir un grand intérêt pour relier Gadji à Nouméa, dans le développement d'une pince de crabe en or.

En effet, le transport en NGV entre Gadji et le centre-ville de Nouméa serait de l'ordre de 25-30 minutes, c'est à dire largement concurrentiel de l'automobile. Gadji serait donc un lieu intéressant pour un TOD où le transport serait assuré par voie maritime. Mais j'y vois, au moins deux inconvenients de taille: la topographie du site, pour le moins chahuté, et surtout, l'implantation du "Centre d'Enfouissement Technique" qui parfume méphitiquement les lieux. Cette implantation m'apparaît grandement préjudiciable pour le développement du secteur, et tout à fait regrettable.

Si quelques lecteurs ont déjà réfléchi à la question, s'y connaissent un peu mieux que moi dans le domaine maritime, ont des critiques à apporter à ma démarche, qui est peut-être tout à fait fausse, je suis preneur de toutes les remarques, de tous les commentaires pouvant apporter des éléments sur la faisabilité d'un transport maritime dans l'agglomération du Grand Nouméa.

Merci d'avance.

François


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