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Peut-on breveter un gène ? Procès entre l’ACLU et Myriad genetics

Publié le 19 mai 2009 par Jpa

peut on breveter le vivant ? Procès ACLU vs Myriad gentics sur les genes BCRA1 et BCRA2

Peut-on breveter le vivant ? La question a souvent résonné dans les prétoires. Depuis le 12 mai, ce débat est au coeur du procès qui oppose la firme Myriad genetics et l’American civil liberties union (ACLU), accompagnée de dizaines d’associations et institutions représentant 150 000 personnes au total. Ils contestent la validité du brevet de Myriad sur les gènes BRCA1 et BRCA2 dont certaines mutations sont responsables de cancers du sein et des ovaires.

Myriad a le monopole sur le test de dépistage qu’il facture 3 000$, pas souvent remboursés par les assurances. procès des gènes brevetés aclu myriad bcra1 bcra2Alors que, comme l’expique Harry Oster qui dirige le programme de génétique humaine de l’Université de New-York dans le New-York Times, ”plusieurs laboratoires sont capables de faire le test à un prix bien moins élevé”. Pire, “3 000$, c’est la moitié du coût du séquençage du génome d’une bactérie”, s’étouffe le blogueur Mike the biologist. 

Une des plaignantes, Genae Girard s’est vue refuser un deuxième avis médical après que Myriad a révélé qu’elle était porteuse des mutations en question. Ce brevet verrouille tout dépistage et toute recherche hors des clous. Rien n’est possible sans verser des royalties à Myriad.

Dans leur plainte, les 150 000 personnes concernées emmenées par l’UCLA déplorent les droits de Myriad sur les gènes BRCA1 et 2.

“Les brevets couvrent les gènes humains eux-mêmes. Ce qui inclut le gène “normal” et ses nombreuses mutations ; certaines ont été identifiées par Myriad, d’autres non. [Le brevet couvre aussi] les mutations qui n’ont pas encore été découvertes. Certaines de ces variations sont corrélées avec un risque accru de cancer du sein ou de cancer des ovaires. Certaines ne le sont pas.

Les brevets couvrent toute les nouvelles méthodes d’investigation de ce gène humain qui pourraient être développées par d’autres, la possibilité de comparer un gène BCRA1 ou BCRA2 avec un autre gène BRCA1 ou BRCA2. (…) [Ces brevets violent la loi] qui interdit le brevetage des lois de la nature, des produits de la nature et des idées abstraites.”

Il est en effet théoriquement interdit de breveter la nature. Mais, dans ce type d’affaires, les firmes attaquées estiment que le gène n’est plus tout à fait naturel puisqu’il est éloigné de son état premier… Dans les précédentes affaires – dont vous pouvez lire un historique dans l’article du site Double X – ces arguments ont été entendus par les tribunaux.

Selon le National Institute of Health étasunien, 20 % du génome humain apparaît d’ores et déjà dans des brevets. D’après Double X, “53 % des laboratoires ont arrêté de proposer ou de développer un test génétique en raison des brevets et 67 % pensent que les brevets interfèrent avec la recherche médicale”. Une étude publiée par le National research council conclue que :

“les restrictions [imputables aux problématiques de] propriété intellectuelle ne sont que rarement un fardeau pour la recherche biomédicale. Il existe toutefois des raisons d’appréhender leur impact futur sur les avancées scientifiques dans ce domaine.”

Ces brevets remplissent allègrement les poches des laboratoires (d’où le sourire colgate de la femme qui trône en une du site de Myriad ?) Ils se justifient en expliquant que ces protections financent leurs futures recherches et tout le bien qu’elles feront à l’humanité.

Economiquement, cette stratégie semble payante puisque Myriad vient d’annoncer de profits records. Selon le Salt Lake tribune, cela n’a toutefois pas calmé la “nervosité des actionnaires”.

Photos :David Reeves et ACLU


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