Arrêt sur les Mots a lancé une chaîne qui me botte, à laquelle donc je vais répondre sans attendre d'y être invité - sinon je pourrais attendre longtemps, ce blog étant désormais connu pour son état végétatif.
[EDIT : afin de n'avoir pas trop l'air de taper l'incruste dans la chaîne, j'avais eu l'audace - je crois que ça ne se fait pas du tout - de réclamer à Nicolas 1er de bien vouloir me taguer. Ce qu'il a fait aussitôt et je peux désormais, après l'en avoir remercié, poursuivre le coeur léger la rédaction de ce billet.]
Ladite chaîne s'intitule donc Votez et faîtes voter pour votre Europe !... à laquelle il s'agit de répondre via trois petites questions : C’est quoi l’Europe pour toi ? Que peux-tu écrire à tes lecteurs pour les encourager à aller voter dimanche 7 juin ? Quelle liste représente les idées que tu veux voir défendre au Parlement européen ?
C’est quoi l’Europe pour moi ?
L'Europe, selon moi, c'est d'abord pour un homme de gauche une évidence, le sens naturel de l'histoire. C'est le chemin d'une abolition des frontières et de l'élargissement des communautés humaines. C'est l'Histoire en marche. L'Europe c'est la mise en place d'une organisation politique plus large que les vieilles petites nations européennes, un espace plus grand pour vivre mieux ensemble plus nombreux, et plus riches de nos différences.
Et si l'Europe est l'Histoire en marche, elle est aussi l'Histoire qui retrouve sa mémoire, toute sa mémoire. Car si quelques siècles de chrétienté ont tissé des fils le long d'un axe qui va de l'Espagne à la Pologne, en passant par le Nord, le berceau de notre civilisation prend sa place autour de la Méditerranée, et plus précisément sur ses rives orientales, cette partie de la Méditerranée où se sont épanouis les empires grec et romain, byzantin et ottoman, depuis Rome jusqu'à Jérusalem, en passant par Istanbul qui fut, un millénaire durant, Constantinople (appelée aussi la Nouvelle Rome).
Bon, ça c'était pour me faire un petit plaisir, parce que n'en déplaise à l'UMP qui n'est jamais à un populisme ni une contradiction près, ce n'est certainement pas le sujet de ces élections, ni de la prochaine décennie. J'en profite pour rappeler que le monde musulman est à peu près aussi divers que la chrétienté, au point qu'il y a autant de ressemblance entre un sunnite ottoman (dont les origines sont à rechercher dans les plaines de l'Asie centrale) et un chiite arabe,, qu'entre un orthodoxe grec et un catholique polonais (même plombier).
Mais l'Europe, c'est aussi, aujourd'hui, la dimension minimale qu'il faut avoir pour peser un peu sur la marche du monde et ses nécessaires régulations - politiques, économiques et sociales. Je suis de ceux qui pensent que depuis une bonne quinzaine d'années, la construction européenne a emprunté de biens mauvaises directions, de Maastricht au traité de Barcelone. Mais on a toujours tort d'être en retard d'un combat et se complaire dans le ressassement de ce qu'il aurait fallu faire, plutôt que de se contraindre à construire à partir d'une réalité qui nous est aujourd'hui imposée. Ainsi en est-il du débat entre ouiouistes et nonistes, inutile et contre-productif ; il s'agit de prendre l'Europe telle qu'elle est aujourd'hui pour la transformer, et d'abord l'arracher aux mains des apprentis sorciers de la dérégulation économique.
Bref, pour moi, l'Europe est un chemin à tracer.
Que puis-je écrire à mes lecteurs pour les encourager à aller voter dimanche 7 juin ?
Un mot : DEMOCRATIE !
L'Europe est trop peu démocratique, c'est un fait. Un autre est qu'elle n'est tournée que trop peu vers les hommes et les femmes qui la peuplent. S'abstenir n'aura jamais d'autre effet que de renforcer cette situation, pour le plus grand plaisir des puissants qui n'apprécient rien tant que les peuples ne se mêlent pas de leurs petites affaires, affaires qui consistent essentiellement à s'engraisser sur leur dos. A jouer les autruches, vous risquez tout simplement d'être les dindons de la farce européenne.
Avec un peu de talent, un dessin vaut bien mieux que de longs discours. Aussi je vous renvoie à l'illustration de ce billet - et en profite au passage pour saluer mon ami SaT. Vous noterez qu'il est rappelé que cette élection ne comporte qu'un seul tour : c'est le 7 juin; et seulement le 7 juin !...
Quelle liste représente les idées que je veux voir défendre au Parlement européen ?
Je vote à gauche et ne voterai jamais que pour des gens qui ont l'ambition de construire. Ça simplifie grandement la question en réduisant l'éventail des possibles de 28 listes (je vote dans la région Ile-de-France) à seulement 3 : la liste du Parti Socialiste, celle du Front de Gauche (le Parti de Gauche de Mélenchon et le PCF) et celle d'Europe Ecologie (les Verts et José Bové ).
Selon moi, si on se préoccupe de voter à gauche et d'avoir une ambition pour l'Europe, seules ces trois listes sont envisageables. Il est à ce propos heureux de constater que la poupée médiatique Besancenot semble en passe de se dégonfler.
Notons également, et en passant - parce que c'est important - que c'est la somme des scores de ces trois listes qu'il s'agira au soir du 7 juin de comparer au score de l'UMP afin d'avoir un aperçu des états respectifs de la gauche et de la droite sur la scène politique française.
Quant au Modem, il suffit de remarquer qu'une fois de plus celui-ci n'a rien à proposer que son éternelle et vaine posture centriste - et si Bayrou est au centre, c'est à mi-chemin entre Le Pen et Besancenot, au centre des candidats autoproclamés "anti-système". L'Europe ? Vous avez récemment entendu Bayrou parler d'Europe ?
Pour ce qui me concerne, je vais sans surprise voter pour la liste socialiste. Pour trois raisons :
1- Les candidats des listes socialistes s'inscrivent dans un projet résolument européen, commun aux 33 partis membres (socialistes, sociaux-démocrates, travaillistes et progressistes) du Parti Socialiste Européen. Un projet tourné vers les citoyens et pour une autre Europe. Un projet à la fois réaliste et ambitieux, tourné vers le XXIème siècle et qui met en avant 71 propositions concrètes et immédiatement applicables, qui constitue une vraie réponse à la crise économique actuelle.
2- Sans parler de l'aberrante cohabitation sur les listes d'Europe Ecologie de Daniel Cohn-Bendit et de José Bové, il n'est plus question pour moi de voter pour des partis qui, pour des raisons tactiques, se refusent à considérer le Parti Socialiste comme un partenaire au sein de la gauche ; une attitude qui revient à rejeter une bonne grosse moitié de la gauche, condamnant de facto celle-ci à demeurer éternellement dans l'opposition. Avec le PS, la gauche pèse autour de 45% et ce n'est déjà pas assez... mais sans, elle ne dépasse pas les 20 ou 25% !!! Or, n'en déplaise au PCF et aux Verts, et maintenant au Parti de Gauche de Mélenchon (qui était un cadre du PS il y a encore six mois), c'est bien du peuple de gauche que le Parti Socialiste obtient sa base électorale.
3- La situation politique française actuelle est largement exceptionnelle, au point que toute occasion de lutter contre le sarkozysme est à saisir avec un sentiment d'urgence. Or, tout le monde l'aura compris, Sarkozy tirera médiatiquement argument des situations respectives de l'UMP et du PS pour renforcer ses positions. Si l'écart entre ses deux partis s'avère important, au profit du premier, non seulement Sarkozy s'en prétendra légitimé pour aggraver la casse sociale, mais il se retrouvera également de facto en bonne position pour remettre ça en 2012. Je me refuse à prendre le risque, en contribuant à l'éparpillement des voix à gauche, de lui faire ce cadeau politique.
C'est une chaîne, il me faut donc y convier les prochains participants. Sont nommés : Rimbus, comme d'hab' ; Juan, parce que je suis curieux de sa réponse ; Hypos, pour voir ; Laure, pour changer ; et puis Ronald... parce qu'il le vaut bien.
[EDIT : Et puis aussi Eric bloggeur citoyen, parce qu'il commente plus vite qu'un octet lancé dans le cyberespace... et Le coucou de Claviers, parce que j'aime bien sa plume.]
© La République des Fourmis par SaT - Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur
Où l'on parle de : Socialiste et européen
Ségolène