Magazine Europe
Après une petite semaine de pause, destinée à vous éviter de lire sur ce blog la même chose que partout ailleurs, voici quelques commentaires personnels sur ces élections, que l'on a du mal à considérer autrement que comme un échec impressionnant.
A quoi servent en définitive les élections, sinon à donner à la collectivité des citoyens la possibilité de choisir un programme, ou du moins une direction générale pour la gestion des affaires publiques? L'objet des débats au donc du être, non pas l'Europe, mais les questions qu'on lui donne à s'occuper: commerce, agriculture, écologie, services publics, normes sociales, fiscalité, gestion de la finance... Chacun aura noté qu'il fut assez peu question de ces sujets.
Partout en Europe, les campagnes ont été totalement nationales, et avec un contenu programmatique restreint. La gauche a joué de son opposition à un repoussoir (Sarkozy, Berlusconi, la droite libérale) ou a tenté de défendre un bilan attaqué. La droite a joué de même les questions personnelles, et a exploité les thématiques locales qui lui étaient profitable. Le point frappant est l'absence des questions européennes, alors même que celles-ci avaient sous-tendu la mise en place des débats.
A gauche, le PSE s'était doté d'un programme commun assez détaillé, et disposait d'un candidat à la tête de la commission faisant la quasi-unanimité. Les écologistes et le centre cherchaient à s'émanciper sur une base transnationale. La droite pouvait arguer d'un consensus relatif sur la poursuite de l'harmonisation concurrentielle, et la reconduction de Barroso. Au bout du compte, finalement, chacun a fait son possible (à l'exception des écologistes) pour évacuer tout débat structuré. Il n'est pas jusqu'à De Villiers qui a mis sous la carpette la dimension européenne de son parti, de crainte peut être de se voir accusé d'être financé par l'Etranger apatride.
Le résultat est net: la droite l'emporte. La possibilité d'une coalition ALDE (centristes) PSE (socialistes), Europe-Ecologie et GUE (communistes) autour de la candidature Rasmussen devient tellement faible que vos serviteurs n'ont pas seulement cru devoir y appeler. Il y aurait fallu l'union sacrée, y compris chez les centristes tendance libéraux, et un rejet de Barroso par les souverainistes. Au final, une part des socialistes (britanniques, espagnols, portugais) fera sans doute privilégier l'intérêt national sur les distances politiques.
Ainsi, les citoyens européens ont fait le choix d'une Commission Barroso, inactive face à la crise, persévérante dans la libéralisation, rétive à l'accroissement politique du poids du Parlement, de préférence à une Commission Rasmussen mettant en place un plan de relance européen, créant un embryon d'Europe sociale et s'appuyant sur une majorité au Parlement face aux gouvernements nationaux.
Posons une question simple: les électeurs savent-ils qu'ils ont fait ce choix?
Et si la réponse est non (comme elle l'est à l'évidence), peut-on réellement parler de mécanisme démocratique? Les citoyens ont-ils un rôle en Europe, ou l'absence d'élections serait sans conséquences pratiques?
Arthur Colin