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Développement durable : pas de communication sans vraie stratégie

Publié le 25 juin 2009 par Jérémy Dumont

Expo-green-washing

Quelle valeur ajoutée la communication sur le développement durable apporte-t-elle aux entreprises ? Cette question, débattue lors de l’Agora organisée en novembre dernier par Syntec Conseil en Relations Publiques, tous les dirigeants se la posent aujourd’hui avec avidité.
Certes 80% des responsables marketing, communication et développement durable français affirment qu’ils se sont engagés dans cette voie, selon le premier Observatoire Limelight de la communication et du marketing responsables*. « 76% des entreprises ont une stratégie RSE » souligne Nathalie Regnault directrice associée de l’institut Limelight. Mais qu’il s’agisse des engagements des entreprises ou de leurs thèmes de communication, la communication est « prioritairement centrée sur l’environnement » (72%), les thèmes sociaux (58%) ne venant qu’en deuxième position, suivis par les aspects sociétaux (42%) et en tout dernier les engagements financiers (29%). Quant au rôle des actions de communication, il est principalement destiné à promouvoir l’image de l’entreprise auprès de l’interne (98%), des clients (91%) et des journalistes (86%). Etonnamment, les ONG arrivent loin dans le classement (47%).

Des résultats qui étonnent Anne Catherine Husson-Traore: « J’ai peur que les entreprises confondent en fait stratégie RSE et rapport DD » ! La directrice générale de Novethic s’inquiète également que la quasi totalité des actions de communication en matière de développement durable soit tournée vers l’interne : « c’est un contre sens absolu. Les salariés ne sont pas censés apprendre des informations dans les rapports DD ! ». Elle s’étonne également que les engagements financiers ne soient pas plus mis en avant : « les agences de notation extra-financière évaluent et notent les pratiques des entreprises portant sur les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance. Les rapports de développement durable sont à la base de l’essentiel de cette évaluation. Ils servent non seulement à être notés mais aussi à être intégrés dans les indices et les fonds spécialisés. Les 400 investisseurs institutionnels mondiaux qui ont signé en 2006 les ‘’principes pour l’investissement responsable”, et gèrent 15000 milliards de dollars d’actifs regardent de plus en plus les entreprises sur ces critères. »
Anne Catherine Husson-Traore souligne également le poids croissant des ONG et l’efficacité de leurs campagnes. « Un des meilleurs exemples en la matière est l’action de Greenpeace qui publie chaque année le rating des entreprises high tech sur les questions environnementales et qui a mené pendant des années un bras de fer contre Apple, obligeant ainsi Steve Jobs à finalement prendre des engagement publics en la matière ».

Dominique Royet, directeur associée d’Altadev renchérit : « quand on voit que plus de la moitié des entreprises disent ne pas s’intéresser aux parties prenantes et notamment aux ONG, c’est une grave erreur. Il faut impérativement les impliquer. Ne pas travailler avec elles serait se couper d’une façon importante de la réputation quelle peuvent construire ». Annabelle Berrengueur, Orange/France Telecom, approuve : « nous avons signé en 2005 un partenariat avec l’organisation environnementale WWF-France pour développer l’usage de la facture électronique auprès de nos clients. ». Collaboration étendue en 2008 avec la signature d’un partenariat pour la protection de l’environnement reposant sur des actions concrètes, aux résultats mesurables, telles que l’évaluation de la performance environnementale des produits commercialisés par Orange, le recyclage, l’éco-conception de ses boutiques et des produits, la pédagogie autour des « gestes verts » menée auprès des consommateurs et des collaborateurs et la réduction des consommations de papier. « Cela nous permet d’avoir une légitimité sur le sujet. Ce n’est pas seulement une caution pour communiquer, c’est aussi un partenaire qui va nous challenger, vérifier que nous mettons bien en œuvre ce que nous avons dit et nous aide à progresser. C’est un aiguillon qui nous aide à prendre des actions complémentaires » explique-t-elle.

La communication sur le développement durable ne doit pas en effet être abordée à la légère. Tous les dirigeants ont très peur de ses effets pervers ou contreproductifs. L’étude Limelight met en avant les freins rencontrés. 60% des interviewés se disent très « prudents » en la matière, 36% redoutent l’effet greenwashing, 15% la banalisation du sujet et 9% s’inquiètent de la maturité des cibles. « Le développement durable est l’un des domaines où l’aval a précédé l’amont. On doit réfléchir à la communication après avoir mis en place une stratégie de développement durable. Or souvent ce n’est pas le cas » remarque Anne Catherine Husson-Traore. Et elle ajoute « quant à la communication, elle doit s’adresser à un consommateur adulte. Tout le monde sait qu’on ne va pas transformer une entreprise du jour au lendemain en un coup de baguette magique, mais celle qui saura diagnostiquer ses problèmes ou ses avantages, qui se fixe une démarche réaliste de progrès à 5 ou 10 ans et qui le dit, peut avoir aujourd’hui un discours tout à fait audible ». Dominique Royet approuve : « avoir une stratégie est fondamental. Cela parait évident, mais ce n’est pas toujours le cas, et pourtant quand les entreprises ont une stratégie originale, cela paye immédiatement, en interne comme à l’externe ».

Quand le même Limelight interviewe les grands patrons du CAC 40 en entretiens face à face, ils reconnaissent que le développement durable est un « mouvement profond, inscrit dans la société de façon irréversible». Tous ont le sentiment « que les entreprises qui ont adopté une telle démarche ont plus de chance de durer que les autres » souligne Nathalie Regnault. Reste alors à bien la mettre en valeur

  • Quelles sont les opportunités ou les leviers que représente la communication sur le Développement Durable pour votre entreprise?

•Pour 67% : avant tout développer une image valorisante et fédératrice auprès de l’interne et des clients
Valoriser l’image (33%),
Fédérer l’interne (13%),
Fidéliser les clients (11%),
Se différencier (10%)
•Pour 10% : développer du business

•Pour 10% : Une quasi obligation, pour s’inscrire dans une dynamique de société
Demande citoyenne (7%), Eduquer les consommateurs (3%)

•Avec des implications constructives pour l’entreprise (13%)
Cohérence avec la stratégie d’entreprise (6%), Développement et valorisation de l’innovation (4%), Réduction des coûts et des risques (3%)

  • Quelles sont les menaces et les freins que représente la communication sur le Développement Durable pour votre entreprise?

•Une grande prudence par rapport à d’éventuels effets pervers ou contreproductifs
•L’effet ‘greenwashing’36%
•La banalisation du sujet15%
•Le manque de maturité des cibles9%
•Des contraintes jugées trop importantes
•Coûts17%
•Complexité13%
•Ou des impossibilités stratégiques
•Incohérence10%


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