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Budget 2008, la chronique de Serge Faubert

Publié le 27 septembre 2007 par Bruno Mouilloud

J’ai parfois du mal à suivre. Nous apprenions, vendredi, que la France était en faillite. Faisant fi de la prudence coutumière en la matière, François Fillon mettait les pieds dans le plat. Lundi encore, il persistait.

Je ne sais pas vous, mais quand mon banquier commence à me tenir ce langage, je me dis qu’il est temps de planquer la carte bleue et de se remettre à manger des nouilles.

Or voilà qu’en lisant le Monde, j’apprends que le budget 2008 reconduit à l’identique le déficit du budget 2007 (un peu moins de 42 milliards). Stupeur et tremblement. Y aurait-il à la tête de l’Etat deux individus répondant au nom de François Fillon ? Depuis que Nicolas Sarkozy a affirmé que son premier ministre et lui-même étaient interchangeables, la question est permise. D’autant que l’hôte de Matignon a parfois des tournures singulières (« Je suis à la tête d’un Etat qui… »).

Il y aurait donc Cassandre Fillon et Cigale Fillon. Le premier ferait peur aux petits enfants et le second leur donnerait des bonbons.

Avouez que tout cela manque un peu de cohérence. Ca devient d’ailleurs la marque de fabrique de ce gouvernement. Un jour, on veut instaurer la TVA sociale, le lendemain, on y renonce. On annonce un plan de rigueur qui est démenti quelques heures plus tard. On menace de faire la guerre à l’Iran pour finir par s’en remettre à l’ONU. On abandonne officiellement les cultures OGM avant de se raviser une semaine plus tard…

Les ministres, eux, n’en sont plus à une contradiction près. Ils se pincent le nez pour évoquer les tests ADN proposés aux candidats au regroupement familial, mais ne démissionnent pas pour autant. Même chose pour les expulsions avec l’intervention surréaliste de Rama Yade à Aubervilliers. On se croirait revenu en 1981, lorsque les socialistes s’installaient au pouvoir. Gaffes, précipitation, cacophonie…

Il y a de ça. Mais il ne faut jamais l’oublier, la droite est au pouvoir depuis plus de cinq ans déjà. Fillon et les hommes clé du gouvernement sont tout sauf des novices.

La vérité est que ce gouvernement se détermine selon un seul baromètre : la côte de popularité du chef de l’Etat. Tout ce qui pourrait l’émousser est écarté. L’action gouvernementale se résume, en fait, à lancer des ballons d’essai. Si ça gronde, on recule. Le président de la République intervient et se pose en modérateur. Et tout le monde crie bravo devant ce chef d’Etat qui est tellement à l’écoute des Français.

Si, en revanche, l’opinion reste atone, on avance. Quota d’expulsions, tests ADN, peines planchers, récidive…

Bref, le débat démocratique est remplacé par un tête à tête médiatique. L’Assemblée nationale n’existe plus. Les lois sont proposées en direct devant les caméras, le taux de bronca qu’elles suscitent déterminera leur avenir.

Voilà pourquoi le président est si souvent sur les plateaux de la télévision, battant tous les records en la matière depuis l’invention de la télévision.

Ce mode de gouvernement n’est pas sans rappeler le césarisme latino américain. Entre Fidel Castro, ou, plus récemment, le président vénézuélien Hugo Chavez, et Nicolas Sarkozy, il n’y a plus qu’une différence de degré et non de nature. El présidente parle, le peuple opine, et les institutions sont priées d’entériner le résultat de cet étrange dialogue qui conjugue populisme, démagogie et autoritarisme. C’est le “perronisme” français, celui des marches des palais nationaux devant lesquelles stationnent les journalistes.

C’est une mauvaise nouvelle pour la République et ses institutions. Mais, paradoxalement, c’est un atout pour tous ceux qui, ces jours-ci, entendent défendre le système de protection sociale.

Revenons sur le budget. S’il n’est pas cette peau de chagrin à laquelle on s’attendait, c’est bien parce que la majorité présidentielle redoute de se prendre une veste aux municipales. Comme, par exemple, en 2004, lors des élections régionales. Le PS qui n’avait vraiment rien fait pour, avait remporté la quasi totalité des régions.

Le sort de notre système de protection sociale est directement indexé sur le résultat des élections municipales. Si la majorité présidentielle se fait étriller, le gouvernement abandonnera ses projets de démantèlement, entendez de rétrocession aux assurances privées de pans entiers du système, et se cantonnera à un nouveau grignotage. En revanche, si elle l’emporte haut la main, le sang giclera sur les murs. Celui des assurés sociaux, bien sûr. Chacun sait donc ce qu’il lui reste à faire.

Il en ira ainsi pour tous les chantiers annoncés. Au moindre revirement de l’opinion, le gouvernement fera machine arrière. C’est là la grande faiblesse de la démocratie cathodique inaugurée par Nicolas Sarkozy. A vider les institutions de leur substance, on s’expose à n’être plus qu’un fétu porté par le vent de l’opinion.

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