Il en était des chevaux du temps jadis un peu comme des automobiles du nôtre : tous n'avaient pas la même taille et la même fonction. En gros il en existait de trois sortes : les chevaux de parade, ou de voyage, les palefrois "por chevauchier à l'aise du cors", qui étaient aussi les montures des dames ; les roncins, bêtes porteuses d'armes et bagages, aussi appelés somiers (de somme), qui servaient également aux écuyers et gens de moindre importance ; enfin les destriers, étaient ainsi nommés parce que l'écuyer les conduisait de la main droite (la dextre) quand il allaient "à vide".
Mes sires Gauvains fu armez,
Et si fist a deus escuiers
Mener an destre deus destriers.
(Le Chevalier de la charrette, XIIe)
C'étaient les chevaux de combat, de belle race et de haute taille - plus le cheval est grand, mieux on domine son adversaire - les grands chevaux.
Or sachiez que, quant ils monterent,
Il i ot ploré maintes lermes.
Trois somiers a robes et armes
Orent, et granz chevax de pris.
(Guillaume de Dole, XIIIe)
Monter sur ses grands chevaux c'est donc le signe de la bataille : "Atant guerpissent (abandonnent) les palefrois, si sont es destriers montés" (XIIIe). Naturellement ce n'est pas une action que l'on entreprend l'esprit calme et serein, il y faut de la fougue et de l'arrogance. "On dit aussi - dit Furetière - qu'un homme monte sur ses grands chevaux ; pour dire qu'il parle en colère & d'un ton hautain."