
Alors, on peut toujours gloser sur l'image de sa discipline que Boonen renvoie au public. Les excès du Flamand, convaincu d'avoir franchi la ligne blanche au moins deux fois en un an, relèvent de la sphère privée, tant qu'il ne sont pas avérés dans l'exercice de son métier. C'est ce que vient de réaffirmer la justice sportive : il y a le droit et il y a la morale. Les pères la vertu prompts à enfourcher le cheval du dopage et à rouler du tambour dans les médias pour se donner bonne conscience devraient méditer cette leçon.
Même pour défendre une noble cause, les chasses aux sorcières appartiennent à une époque révolue. D'autant que même en se plaçant d'un point de vue moral, ce genre d'oukaze est indéfendable. Boonen a certes choisi d'être un champion, connu et reconnu. Mais où est-il écrit, hormis dans les discours ampoulés des barbons de l'olympisme, qu'un gamin d'une vingtaine d'années, confronté à tous les excès de la popularité, devrait dans notre société assurer la fonction de mètre étalon de l'exemplarité ? Ces champions, professionnels du sport glorifiés à longueur d'ondes et de colonnes, nous contribuons tous les jours à les créer, à accentuer les travers de leur spersonnalités, à creuser les failles des plus fragiles d'entre eux. Le sportif de haut niveau est le reflet de notre société, ambigü, soumis au principe du "tout, tout de suite". Nous le façonnons à notre image et devons l'accepter comme tel. Le brûler en place publique pour ses écarts privés revient à nous affranchir de toute responsabilité dans le processus de création de ces monstres médiatiques que sont devenus nos champions. C'est indigne, surtout lorsque ceux les ayant un jour hâtivement bannis, se retrouvent le lendemain pour verser des larmes de crocodiles sur leurs cercueils…