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La goutte de ses larmes

Par Elisabeth Robert

La nuit glisse en mon sang.

Je sens la saleté, l'horreur de ce coeur palpitant.

La caresse de mes maux m'endort.

L'aube de la cruauté me relève.

Je sens en moi couler la crasse, ça colle, ça pue.

Rien n'enlève l'odeur.

Si lisse le goût de ta peau s'enlise dans mes souvenirs.

Cette saveur, horreur de tes mains sur mes cuisses!

Ce regard hautain, fier de ton âge.

Je crois que j'oublierais, que c'est un cauchemar.

Et pourtant la nuit revient encore et encore.

Mes sourires, mon envol se grisent dans ton automne.

Mes poupées me regardent comme si c'était de ma faute.

Plus envie de jouer, plus envie de rire.

Ni de dire... Taire la saleté, cacher la honte.

Continuer de grandir avec une amertume dans les yeux.

Avancer, ne plus y penser.

Dix années... Trop tard, peu importe mon choix je n'y ai plus droit.

Vingt années plus tard, peut-être es-tu mort?

J'ai de la peine, je t'aimais bien.

Je me rappelle de tes bras grands ouverts quand je courais vers toi essoufflée.

La peur de me faire rattraper par ta propre enfance. Je me rappelle des cadeaux lorsque tu venais dans notre logis.

Pas un cocon, le mal est entré.

Le savais-tu? Savais-tu seulement ce qui te rongeais?

Qu'un jour tu serais capable de tant d'ardeur?

Croyais-tu que personne ne le saurait?

Nier ce que l'on est pour donner de belles images à l'entourage.

La nuit dure longtemps, mais ta jouissance fut courte, malsaine, malpropre.

Déchue, un petit ange déchue de sa naïveté.

Plus loin derrière mon épaule je t'aperçois, tu n'as pas changé pourtant presque vingt cinq années nous séparent...

J'ai le soleil devant les yeux tandis que le crépuscule se couche enfin sur ton crime.

Es-tu mort? Es tu mort?

J'en suis presque certaine, à tant de kilomètres, je sens cette saleté, cette odeur qui semble disparaître... enfin.


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