Ça y est, me voici. Une histoire d’écran, à commencer par le tournage À l'origine d'un cri de Robin Aubert (Saints-Martyrs-des-Damnés) et pour finir, je perds mon écran le soir. Eh oui, fiston étant avec nous, il réquisitionne mon ordinateur pour des raisons professionnelles.
Mercredi, j’étais à St-Urbain (en Montérégie près de la frontière) pour le deuxième long métrage de Robin Aubert, réalisateur et comédien (Les Invincibles : le père toffe et absent qui inquiétait P.A. et bientôt dans De père en flic). Si on y va par le cliché, cet homme est hors normes, n’a pas le physique de l’emploi, ni même le comportement typique d’un réalisateur. Il est tout en respect, discrétion, douceur, tout en sachant parfaitement ce qu’il veut. Depuis la quinzaine d’années que je fais de la figuration, c’est une de ces fois où j’ai été le plus admirative et impressionnée de l’ambiance d’un plateau.
Nous avions à faire deux scènes d’endeuillés dans une Église et j’ai eu la chance d’être parmi la vingtaine de comédiens qui étaient de la première, ayant été pointé par R.A pour figurer en « matante ». Un réalisateur très pointilleux qui choisit ses figurants principaux au doigt et à l’œil. Il a si peu la tête de l’emploi, qu’il s’est promené dans notre quartier général (un gymnase d’école) essayant de repérer sur place les « mononcles » qui transporteraient un cercueil. Après son départ, quand je l’ai identifié auprès des autres, les gens restaient incrédules. Il avait passé complètement inaperçu ! Il est arrivé la même chose à Marc stationné devant l’Église, regardant défiler les vedettes (et il y en a toute une brochette dans cette production !), il m’a décrit un homme petit, aspect un peu bum, quel rôle jouait-il ...
J’ai donc eu l’honneur d’assister de près à ce beau spectacle d’ambiance de travail recueilli et patient. C’était délicat techniquement puisqu’une grue déambulait dans l’allée centrale du lieu Saint. Elle servait à promener la caméra qui prenait les scènes de haut et qu’est-ce qu’on voit de haut ... des têtes et des épaules. Les costumières, armées d’un rouleau collant partaient à la chasse de la pellicule pour retirer cette neige indésirable sur les habits noirs. Incroyable le pouvoir grossissant d’une pellicule capable de capturer une pluie de pellicules !
Cent sept figurants, plus la soixantaine de l’équipe comprenant techniciens + comédiens, ça fait bien du monde à messe ! J’ai été bouche bée devant la disposition d’esprit de chacun plaçant sa ferveur au service de Robin Aubert. Ça se voyait que chaque assistant, dont le troisième qui s’occupait de nous, prenait à cœur de répondre à la méticulosité du réalisateur, comme si c’était la sienne. Une ambiance, c’est difficile à rendre en mots, en actions un peu plus, je vous donne donc l’exemple de fin de journée où la masse noire des figurants arrive, joyeusement, sur le parvis de l’Église. Après nous avoir servi un sandwiche au thon (oui, oui, toujours la bouffe) pour tromper l’attente et la faim, on ouvre enfin les portes de l’Église. Sur ce nombre, une grosse majorité sortait d’une attente de sept heures, ça aiguise la patience et malgré cela, aussitôt installée, un silence religieux s’est installé. Pas un mot pendant au moins une heure. Impressionnée, l’équipe technique s’est mise à échanger les infos indispensables au travail à voix basse. Encore là, du jamais vu pour moi. Le comédien, Patrick Hivon (le fils à papa qui prend possession de Rumeurs) a pu reprendre son texte, au message assez lourd, dans un environnement favorisant pleinement la concentration.
Je vous laisse sur une anecdote savoureuse. Imaginez-vous une vingtaine de « mononcles » et « matantes » plantés debout dans un stationnement d’Église en attente d’un signe pour entrer, signe qui ne vient toujours pas après une vingtaine de minutes. Notre charmant troisième assistant essaie de nous distraire, il pense nous raconter une histoire d’enfance avec sa grand-mère, et arrive par derrière lui, Michel Barrette (rôle principal) comme si le mot « histoire » l’avait attiré jusque là. Il entreprend de nous raconter une anecdote personnelle « un dos barré en vacances aux États, un scanner magnétique qu’il a passé et où il a pensé mourir » ... quant à moi, c’est de rire que j’ai pensé mourir ! Cet homme est un conteur hors pair attiré par le monde sans prétention sachant très bien que c’est son public, et qu’on l’aime.
Pour ceux qui les connaissent, font aussi partie de la distribution (pour ne nommer que ceux-là) : Nicole Leblanc, Jean Lapointe, Charlotte Laurier, Bénédicte Décary, Johanne-Marie Tremblay ... et plus.